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Interview de Yseulys Costes, Co-fondatrice et présidente de 1000mercis.com

Interview de Yseulys Costes, Co-fondatrice et présidente de 1000mercis.com

Présentez-nous le groupe 1000mercis ?

Notre société est spécialisée dans la publicité et le marketing sur les médias interactifs, soit Internet et les mobiles. Nous accompagnons des annonceurs qui souhaitent faire la conquête de nouveaux clients et les fidéliser grâce à ce type de médias. Pour cela, nous leur proposons la conception et la mise en place d’opérations de marketing interactif.

Du site millemercis.com, proposant aux internautes de constituer leur liste de cadeaux, à l’agence de marketing interactif 1000mercis, votre concept a-t-il évolué ?

Non, car le modèle économique est toujours resté le même. Nous avons toujours pensé qu’Internet représente un formidable outil pour collecter des bases de données et les utiliser pour pouvoir mieux parler au consommateur ou trouver de nouveaux clients pour les annonceurs. Notre première application pour collecter ces données s’est faite à travers deux sites de liste de cadeaux (millemercis.com et millemercismariage.com). Ces sites ont été le moyen que nous avons trouvé pour commencer à constituer cette base. Aujourd’hui, 35 % de notre chiffre d’affaires provient de la location de base de données intelligente.

Quel a été votre parcours professionnel avant 1000mercis ?

J’ai un parcours entrepreneurial atypique puisque je suis issue de la recherche. J’ai découvert Internet en 1995, lors de mes études aux états-Unis, alors qu’en France, presque personne ne s’y intéressait encore ! C’est comme cela que j’ai décidé de faire de la recherche et de l’enseignement en regroupant mes deux centres d’intérêts : Internet et le marketing. Parallèlement, j’ai participé à la création et été coordinatrice de l’IAB, une association qui regroupe les professionnels du marketing sur Internet, association qui existait déjà aux états-Unis. J’avais donc un pied dans le monde académique et un autre dans le monde professionnel. En 2000, avec mon associé, nous avons eu l’idée de 1000mercis. Nous nous sommes dit qu’il fallait y aller, même si nous n’avions pas l’âme entrepreneuriale à la base. Je n’avais jamais rêvé de créer mon entreprise !

De la recherche au monde de l’entreprise : un parcours atypique ?

Malheureusement oui, dans des pays tels que les états-Unis ou l’Allemagne, on rencontre très fréquemment des créateurs ayant ce type de parcours. Je pense que l’entrepreneuriat c’est avant tout créer de la valeur et, souvent, à l’origine de cela se trouve l’innovation. Pour moi, le pont entre ces deux mondes paraît donc assez naturel. Ce que nous faisons aujourd’hui avec mon associé n’est ni plus ni moins que la continuité de nos travaux de recherche.

L’innovation est au cœur de l’activité de 1000mercis. Comment procédez-vous ?

Nous consacrons 20 % de nos dépenses à la R&D, au travers de partenariats avec de nombreux laboratoires de recherche comme par exemple HEC, l’école Normale Supérieure de Cachan, l’INSEAD ou l’Université Paris Dauphine. Nous accueillons également dans notre équipe des doctorants qui réalisent leur thèse chez nous et des salariés dont une partie de leur activité est consacrée à la R&D.

Comment innove-t-on en marketing ?

On a une vision encore très « industrielle » de l’innovation, alors qu’aujourd’hui la majorité de l’innovation se fait dans le monde de services. Je prends l’exemple d’un travail de recherche que nous faisons actuellement : Price Minister, qui est un de nos clients, ne peut pas envoyer chaque semaine une newsletter présentant 120 millions de produits à 8 millions de personnes ! On doit donc essayer de deviner, grâce à des modèles mathématiques, quelle personne aura besoin de quel produit et quand. Nous recherchons des algorithmes qui pourront définir cela de manière pertinente et ainsi apporter une véritable valeur ajoutée aux consommateurs à qui Priceminister fait ainsi gagner du temps.

Faire de la recherche, qu’est-ce-que cela apporte à l’entreprise ?

Je pense que, pour être en mesure d’apporter de la valeur à nos clients, il faut constamment innover. Dans les périodes de crise économique, l’important est de prendre de l’avance et, ainsi, de créer des vraies barrières à l’entrée pour les concurrents.

Quelles sont pour vous les clés du succès de 1000mercis ?

Cette dynamique de R&D représente bien sûr une des clés du succès de la société. Mais notre force, c’est notre positionnement. Nous essayons d’être vraiment efficaces et concentrés dans notre cœur de métier, sans nous éparpiller.

Comment voyez-vous l’avenir de 1000mercis ? 

L’entreprise a été introduite en bourse en 2006, et ce, notamment pour financer le développement international. Il y a un an de cela, nous avons racheté une entreprise, Ocito, spécialisée dans le marketing sur mobiles. Aujourd’hui, notre projet est d’inventer ce qui sera un mix entre le web et le mobile, afin d’étoffer nos métiers sur les médias interactifs.

Que représente pour vous la création d’entreprise ?

C’est une magnifique aventure et beaucoup de bonheur ! Cela a quand même quelque chose de magique de créer de la valeur et d’avoir pu choisir chacune des personnes de son équipe ! Bien sûr, on ne peut pas faire cela à moitié, et il faut y consacrer beaucoup d’énergie. Il faut en donner et ne pas avoir peur d’en donner. C’est un métier où il ne faut pas compter et ne pas avoir peur de ne pas compter ! Créer de la valeur prend du temps, il n’y a pas de miracles !

Les 5 conseils d’Yseulys Costes aux entrepreneurs

  • Créer une boîte dans un savoir-faire qu’on aime, dans un domaine de passion. 
  • Être conscient que la création d’entreprise c’est un vrai choix de vie qui demande de ne compter ni son temps, ni son énergie.
  • Avoir une approche ludique dans ce que l’on fait. Je pense qu’on crée plus de valeurs quand on le fait en s’amusant, plutôt que dans la douleur. 
  • Avoir beaucoup d’humilité. L’entrepreneuriat c’est de fortes convictions mais aussi d’importantes remises en question. 
  • Garder toujours en tête une vision d’où on veut aller et de la manière par laquelle on peut y arriver.

Interview de Aliza Jabès, PDG de la marque de cosmétique Nuxe

Interview de Aliza Jabès, PDG de la marque de cosmétique Nuxe

Pourquoi avez-vous choisi de créer votre entreprise ?

Au fond de moi, j’ai toujours eu envie de créer mon entreprise. Pourtant les études que j’avais suivies au sein de grandes écoles me prédestinaient plutôt à faire carrière dans un grand groupe. C’est finalement par choix et guidée par mon instinct que je suis entrée dans l’entrepreneuriat.

Comment avez-vous déniché le laboratoire Nuxe ?

En fouinant ! Après mes études, j’avais envie de créer une marque de cosmétiques naturels. Mon père qui est pharmacien a eu échos de la vente d’un petit laboratoire artisanal spécialisé dans les soins naturels. Ce laboratoire, inconnu à l’époque, s’appelait Nuxe, soit la contraction des mots « naturel » et « luxe ». J’ai senti que le mariage du naturel avec le luxe était avant-gardiste. Alors j’ai foncé sur un coup de tête, tout simplement.

Pourquoi vous êtes-vous tournée vers une reprise d’entreprise ?

A l’époque j’envisageais deux scénarios comme possibles : soit je démarrais une marque de zéro, soit je m’appuyais sur un laboratoire existant avec des formules auxquelles il fallait donner vie. C’est finalement cette deuxième option qui s’est imposée à moi.

Comment avez-vous réussi à faire connaître la marque Nuxe ?

Cela a été le parcours du combattant ! Les sept premières années ont été celles de la « vache maigre » et ce, pour plusieurs raisons. D’abord parce que j’avais beau avoir de bons diplômes, je ne connaissais pas ce métier. Je n’avais jamais travaillé dans une boite de cosmétologie, je n’étais pas formulatrice… et je devais quand même remettre sur pieds un laboratoire. Ces sept années ont été consacrées à la R&D. Nous ne développions que très peu la partie commerciale, juste le minimum pour que nous puissions survivre. Nous plantions les fondations de la marque et ne cherchions pas à communiquer. La deuxième phase a été celle de la communication et de la distribution. Comme je n’avais pas de fortune personnelle, j’ai dû utiliser le bouche à oreille pour communiquer sur nos produits. Les journalistes beauté ont découvert la marque Nuxe qu’ils ont tout de suite adorée, puis les célébrités ont adopté nos produits… le buzz médiatique était lancé ! Nous n’avons commencé à communiquer de façon importante que bien plus tard. Nous ne diffusons des publicités que depuis 5 ou 6 ans, ce qui est très récent quand on pense que Nuxe a déjà presque 20 ans.

Comment avez-vous réussi à tenir pendant ces sept premières années ?

Grâce à ma famille qui m’a énormément soutenue pendant cette période mais aussi grâce à mon acceptation de ne rien gagner pendant des années. Avant de créer ma boite, mon job d’analyste financier dans un grand groupe me procurait déjà, de par mes diplômes, un salaire très confortable. Je pense que le propre des entrepreneurs, c’est d’accepter d’avoir un train de vie bas pendant quelques temps. C’est pour cela aussi qu’il est intéressant de se lancer lorsqu’on est encore jeune. C’est sûr que si on a la folie des grandeurs et qu’on veut tout de suite avoir un 200m², il vaut mieux ne pas créer son entreprise !

Quels sont selon vous les secrets de la réussite d’une entreprise ?

Je crois qu’il n’y a pas vraiment de secrets, mais plutôt des caractères propres à l’entrepreneur. Pour mener une entreprise vers la réussite, il faut avoir une capacité de résistance hors du commun ! Des coups, on en prend tout le temps, et en particulier lors des dix premières années. Si on n’a pas une capacité de marathonien, plutôt que celles d’un sprinter, on ne peut pas tenir. Pour réussir, il faut avoir un bon produit et qu’il soit innovant. Il doit correspondre aux attentes mais aussi l’entrepreneur doit compter sur une bonne dose de chance. Les études c’est bien, mais il faut aussi une grande capacité de résistance.

Vous innovez sans cesse. Pourquoi ?

Nous innovons constamment car c’est indispensable dans notre univers. Pour qu’une entreprise soit pérenne et puisse devenir un des fleurons d’une société, pour qu’elle puisse ensuite s’imposer à l’international, il faut être capable d’innover. Les sept premières années, nous avons tout investi sur le labo interne, ce qui est un peu atypique car la logique aurait été d’externaliser cette partie. Ce choix de ma part a été purement instinctif. Avec le recul, je me dis que c’est peut-être cela qui nous a permis de tenir et devenir aujourd’hui un acteur majeur de la cosmétologie naturelle en France et au niveau européen.

Comment imaginez-vous les développements futurs de Nuxe ?

Nous allons continuer à innover pour découvrir de nouvelles molécules, toujours dans le naturel bien entendu. Nous venons de créer une nouvelle marque, Bio-Beauté®, certifié Ecorcert® afin de développer de nouveaux segments sur le marché. Le futur sera donc également axé sur le développement de marques au sein du groupe Nuxe. Le deuxième volet de développement sera l’international. Nous avons embauché beaucoup de collaborateurs à l’international. Aujourd’hui, nous faisons déjà une vingtaine de millions de CA à l’étranger et notre challenge est de faire de Nuxe un groupe international.

Les 5 conseils d’Aliza Jabès aux entrepreneurs

  • Partir d’une idée, avoir une vision.
  • Essayer de fédérer autour de soi sa famille. Dans les débuts, la famille vous soutient généralement mieux que les banques. Et celles-ci vous prêtent plus facilement si la famille vous soutient financièrement.
  • Résister et ne pas penser que l’entreprise décolle en un an ou deux car c’est généralement impossible.
  • Structurer le plus tôt possible dès que vous sentez que le business commence à prendre. Avoir les méthodes des grandes boites au niveau managérial, logistique, gestion… quand vous vous développez, vous freinez l’entreprise si l’augmentation de la production n’a pas été anticipée.
  • Toujours garder l’esprit « petite boite ».

Interview de Denis Payre, Fondateur de Business Objects

Denis Payre, a été élu « Entre-preneur de l’année » en 1996 par l’édition américaine de Business Week après avoir été Sacré « Prix de l’internationalisation » par le Nouvel Économiste en 1995. Il a été également classé à deux reprises dans le « Top 25 Technology Europe » du Time Magazine qui recense les chefs d’entreprise européens les plus visionnaires en matière de technologie et d’innovation.

Aujourd’hui Denis Payre est surtout reconnu pour ses deux grandes réussites entrepreneuriales : BUSINESS OBJECTS qui, en 2005, comptait déjà 30.000 clients, 100.000 utilisateurs répartis à travers 80 pays et 4.418 collaborateurs (le chiffre d’affaires s’élève à un milliard de dollars). Il est également à l’origine de l’association CROISSANCE PLUS. Enfin, de KIALA, en passe de conquérir l’Europe.

Pourriez-vous nous dire où vous en êtes actuellement ?

L’entreprise que je gère actuellement, KIALA, a démarré en 2002 avec 1,4 millions d’euros de chiffre d’affaires. En 2007, nous faisions 26 millions d’euros de chiffre d’affaires. Nous avons donc eu une croissance annuelle pondérée de 80%. Cela ne s’éloigne pas trop de la croissance de ma première création, BUSINESS OBJECTS, qui connaissait à la même période une croissance de 100%. Nous sommes actuellement les leaders dans notre domaine et avons des clients tels que Rue du commerce, Cdiscount, Alapage, Orange, H&M, Neuf Telecom, Free, Esprit… Aujourd’hui, nous sommes au Benelux, en Autriche, en France, en Espagne. Aussi, nous préparons les lancements en Angleterre et en Russie.

Quelles sont les principales qualités que doit posséder un entrepreneur pour réussir ?

Je pense qu’un entrepreneur doit être très complet. Il doit être à la fois capable de vendre son produit ou son service mais doit aussi savoir gérer son entreprise. A défaut, il doit savoir s’entourer des compétences manquantes par le biais notamment d’associés. Il se doit d’être le spécialiste de son produit afin de pouvoir appréhender tous les aspects de sa création et tout risque.

La deuxième qualité dont il doit faire preuve est l’énergie. La vie d’entrepreneur n’est pas simple et il faut parfois travailler avec acharnement sans se poser trop de questions. Ainsi, il se doit parfois de changer les habitudes des consommateurs ou des entreprises pour parvenir à vendre son produit. Il faut rappeler que, même en ayant des avantages concurrentiels forts, il est souvent difficile de percer dans le marché. Il faut arriver à s’y faire une place (et ceci particulièrement en France.)

Je pense aussi que sa grande capacité à résister à l’inertie (qu’il va rencontrer) et sa très grande confiance en lui vont être les véritables facteurs de sa réussite. Pour cela, il ne doit pas trop écouter les autres car on lui répètera très souvent toutes les bonnes raisons qu’il aurait de ne pas se lancer. S’il doit rester réaliste et écouter systématiquement les conseils des autres, il doit apprendre à trier les informations qu’il reçoit.

Que doit vérifier un entrepreneur avant de se lancer ?

Il doit, tout d’abord, vérifier que son idée va rencontrer une demande. C’est la logique de l’offre et de la demande. Sans cette demande il est inutile de chercher à vendre son produit. L’entrepreneur doit faire une étude approfondie du marché.

Il est nécessaire de vérifier les barrières dont il dispose à l’entrée de produits concurrentiels, de s’assurer que le produit ne peut pas être l’objet d’une réplication immédiate. Mais il n’est cependant pas forcément obligatoire de se créer des barrières avec des brevets et des technologies très sophistiquées, les barrières sont souvent, de nos jours, dans le savoir faire ou dans la stratégie mise en oeuvre.

Si vous deviez vous associer, avec qui le feriez-vous ?

En ce qui me concerne, j’ai toujours fait le choix de m’associer. La connaissance technique du produit m’était apportée par mes associés. Pour ma part, j’apportais une approche plus marché/besoin/client. C’est cette complémentarité qu’il faut rechercher à travers l’association. Bien sûr, il ne faut pas s’arrêter simplement à la technique mais au-delà, s’assurer de la compatibilité et la complémentarité des tempéraments des associés.

Quels sont les points essentiels dans la création d’entreprise ?

Je pense qu’il faut recruter les meilleurs et être prêt à y mettre le prix car c’est le moyen le plus efficace de protéger son capital. J’ai souvent payé plus cher que ce que je ne l’aurais voulu mais, jusque là, ils ont largement couvert leur surcoût. Il ne faut pas oublier que nous sommes dans une industrie où il n’y a de richesses que d’hommes.

Il peut donc être utile de mettre en place des stocks options dont le quota peut être proportionnel au temps passé. Bien entendu, pour des raisons que l’on comprend cette solution n’est pas à appliquer avec tout le monde.

La France est-elle un bon pays pour créer son entreprise ?

Le climat s’est amélioré par rapport à celui que j’ai connu lorsque j’ai commencé. A l’époque il n’existait que 2 ou 3 fonds d’investissement. De nos jours, nous ne sommes plus dans la méconnaissance du sujet comme il y a 15 ans mais il reste encore des améliorations à apporter et ce notamment au niveau du financement en amorçage et du droit du travail.

Quelles pourraient être ces améliorations ?

L’entrepreneur doit rencontrer moins d’obstacles, particulièrement au niveau des fonds de départ. Il est pour cela nécessaire de faire un travail et particulièrement sur les business angels. Or, les particuliers sont encore trop peu incités à investir dans les jeunes entreprises même si des progrès ont été faits avec les mesures de l’impôt sur la fortune.

Il reste également un grand axe : le droit du travail pour les PME. En France, lorsqu’on est une entreprise en expansion et que l’on ne parvient pas à réaliser son plan de croissance. La menace pèse alors sur l’entreprise, on se retrouve alors bloqué avec des salariés en surnombre. On privilégie donc des plans moins ambitieux pour ne pas avoir à recourir aux licenciements dont le coût reste trop élevé.

Certes, il y a des progrès mais ils sont encore trop lents et ne sont pas à la hauteur des défis de la mondialisation.

Interview de Philippe Houzé, Président du Directoire du groupe Galeries Lafayette

Interview de Philippe Houzé, Président du Directoire du groupe Galeries Lafayette

Quels sont vos principaux conseils pour les entrepreneurs ?

  • Avoir confiance en soi et savoir douter. La qualité principale d’un bon entrepreneur réside dans la confiance en soi : il faut croire en soi, en son projet et en ses produits. Une fois que l’entrepreneur a mené une réflexion approfondie sur son marché, la confiance en lui déterminera l’énergie qu’il déploiera pour développer son entreprise. Il reste essentiel de savoir se remettre en question même s’il ne faut pas passer son temps à douter. L’important demeure d’avancer avec confiance. Si l’on commence à se faire des montagnes autour des problèmes qui pourraient advenir, on ne va jamais bien loin.
  • Être capable de se mettre à la place des autres (l’empathie). Si l’on possède naturellement peu d’empathie, on peut la travailler. Si au contraire, on ressent facilement de l’empathie, il faut la valoriser. Pour les fonctions marketing et commerciales, avoir de l’empathie leur permet de savoir instinctivement comment l’autre va recevoir leur conception, parole ou action. Pouvoir se mettre à la place des autres facilite la communication : d’un rapport d’opposition on passe naturellement à un lien de compréhension mutuelle.
  • Ne pas penser qu’on manque de chance. Je crois profondément qu’il n’existe pas des personnes ayant de la chance et d’autres qui n’en n’ont pas. Par contre, il existe des optimistes et des pessimistes. L’optimiste n’a pas de chance, il est juste revenu 100 fois sur le sujet et a trouvé la solution parce qu’il a persévéré. Le pessimiste, quant à lui, va essayer une fois ou deux fois. Si cela ne marche pas, il s’arrête en prétextant un manque de chance. La ténacité systématique ainsi que la capacité à toujours voir le coté positif des choses : voilà ce qui génère la « chance ».
  • Ne pas avoir peur de la différence au sein d’une équipe. Ce qui apporte la richesse d’une association réside dans la différence de personnalités. Elle permet de porter un regard autre que le sien. Cela entraîne généralement la prise de meilleures décisions.
  • Savoir utiliser son Quotient Emotionnel (QE). Le système français a tendance à plutôt mettre en avant le Quotient Intellectuel (QI). Or, dans l’activité entrepreneuriale, c’est souvent la créativité, la capacité à sortir des sentiers battus qui détermine la réussite. Comme disent les anglo-saxons, « You have to think out of the box! ». Dans tous les domaines d’activité, le cycle s’est accéléré. Selon moi, une des qualités principales de l’entrepreneur doit être cette capacité à constamment se renouveler et réinventer son business model. Cela aura pour effet de redonner une impulsion et permettra de retrouver la période de maturité du cycle. Tant mieux si l’on a un Q.I élevé, mais, on le sait bien, ce n’est pas la logique qui mène le monde, et cela reste d’autant plus vrai en ce qui concerne l’entreprise : de nombreux événements viennent bouleverser la stratégie de l’entreprise et votre vision du monde. Se baser sur des analyses intellectuelles et logiques restent indispensables, mais l’intuition ne doit pas être mise de côté.
  • Mettre en avant ses valeurs personnelles. J’ai la conviction que la société dans laquelle nous vivons, une société post-déflagration mondiale, aspire à retrouver des valeurs. Le monde qui se désagrège aujourd’hui a détruit les valeurs par dévoiement du système capitaliste. Le monde a détruit les valeurs (humaines) pour créer de la valeur (financière). Le jeune entrepreneur doit être très clair sur ses valeurs personnelles, sa ligne éthique, et ne pas en dévier. Il est indispensable que son entreprise crée de la valeur, mais en aucun cas en trahissant ses valeurs propres. Le monde de demain attend de l’éthique, de l’esthétique, de la relation et de la durabilité. L’entreprise doit dès maintenant s’attacher à développer ces quatre valeurs.

Pouvez-vous expliciter ces valeurs que vous prônez au sein de votre entreprise ?

L’éthique et l’esthétique : je rassemble ces deux valeurs car aujourd’hui les artistes possèdent une vision du futur qu’il faut essayer de comprendre. Le design, l’art, la création font appel à l’émotion et l’intuition qui sont, comme vous l’avez compris, des qualités essentielles à développer au sein de l’entreprise.
Le bien être et la relation : la recherche de naturel et de relationnel caractérisent notre époque. Cette tendance devient perceptible grâce à l’impact des réseaux communautaires tels que Facebook.
La durabilité : je pense que l’entreprise joue un rôle déterminant dans
la société actuelle. Elle doit travailler à la création d’un futur
souhaitable.

Comment développer la confiance en soi ?

Le fait d’entreprendre montre une certaine confiance en soi. J’ai mis très longtemps à la développer. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles je me sens davantage manager qu’entrepreneur. Dans mon parcours, j’ai vécu des périodes de doutes sur les directions à suivre ou des remises en question après des échecs. Dans de tels moments, j’ai pu avancer grâce à ma famille et mes amis qui étaient présents pour m’insuffler cette énergie qui m’a permis de repartir. On peut également trouver des moyens de cultiver cette confiance en soi et je crois que la pratique du sport peut beaucoup aider dans ce domaine. Le sport relie l’effort à un succès visible. Le fait d’aller au bout des objectifs qu’on s’est fixé apporte un sentiment de réalisation personnelle.

Votre secret pour prendre les bonnes décisions et développer sans cesse votre activité ?

Lorsque l’on prend une décision, on ne peut avoir une claire compréhension de la portée qu’elle aura dans le futur. Aussi, la réussite d’une stratégie ne peut être jugée que longtemps après avoir été mise en place. Dans ma carrière, si j’ai pu prendre des bonnes décisions, je l’ai fait de manière intuitive et grâce à l’empathie dont j’ai parlé, c’est grâce à elle que j’ai pu saisir le besoin de mes clients. Je reste en permanence à l’écoute afin de sentir les évolutions de la société. D’autre part, j’ai toujours un œil sur ce qui se fait à l’étranger. Certaines de mes décisions ont pu sembler n’être que des caprices de patron mais elles s’appuyaient sur ce cocktail d’intuition et d’observation.

Interview de Hapsatou Sy, Créatrice du concept d’espaces de beauté Ethnicia

Interview de Hapsatou SyCréatrice du concept d’espaces de … Ethnicia est un concept d’espaces dédiés à une beauté globale et sur mesure.

Parlez-nous de votre entreprise, Ethnicia.

Ethnicia est un concept d’espaces dédiés à une beauté globale et sur mesure. Parce que chaque individu est différent de son voisin, l’offre de beauté doit s’adapter à chaque personne. Aujourd’hui, nous avons 4 salons, dont un qui se transforme en centre de formation et 70 salariés. L’aventure prend forme petit à petit.

Pourquoi à 24 ans vous êtes-vous lancée dans l’aventure de l’entrepreneuriat ?

J’ai toujours eu envie de liberté et j’ai toujours voulu sauver le monde par un moyen ou un autre. Et ce n’est peut-être pas avec l’entrepreneuriat qu’on peut sauver le monde, mais cela permet tout de même d’apporter de l’espoir à ceux qui rêvent d’entreprendre, de leur montrer que c’est possible. En tant qu’entrepreneuse, je souhaite laisser une empreinte positive dans notre société où les informations négatives sont relayées majoritairement.

Quel a été votre parcours jusqu’à Ethnicia ?

  • J’ai commencé à travailler très jeune parce que j’aimais l’indépendance que m’offrait le travail.
  • J’ai toujours ressenti cette fierté de travailler que m’a transmise mon père.
  • J’ai commencé en tant que responsable de marchés internationaux avant de décider de prendre le bateau seule en montant ma boite.

N’était-ce pas dur d’entreprendre à 24 ans ?

J’ai eu de nombreuses difficultés mais cela fait partie du jeu ! Si entreprendre était facile, je n’aurais pas cette adrénaline que je ressens en permanence et qui me plaît. L’entrepreneuriat est certes difficile, mais c’est une expérience formidable. Cela fait cinq ans que je suis dedans et j’ai vécu des choses que je n’aurais jamais pu vivre en étant restée salariée. J’ai la tête dans les nuages, les pieds sur terre et je n’ai pas envie de redescendre ! Je suis passionnée par ce que je fais !

Avez-vous réussi à convaincre des investisseurs de vous suivre ?

Au départ non et ce n’est plus ma motivation première, je cherche plutôt à convaincre les clients, mes équipes. Aujourd’hui des investisseurs viennent me voir, mais je ne cherche pas à mettre davantage mon énergie là dedans, j’essaie de développer mon entreprise par d’autres moyens.

Comment avez-vous financé votre premier salon à l’île Saint-Louis ?

J’avais 30 000 euros pour démarrer qui représentaient le fruit de mes économies. Je me suis lancée en pensant que ce serait comme dans les pubs, que les banques m’aideraient dès que j’entrerais avec mon dossier. Or, c’est loin d’être la réalité ! Avec ces 30 000 euros, j’ai trouvé un magnifique local sur l’île Saint-Louis. Je ne me rendais absolument pas compte du prestige de l’Île Saint Louis, je l’ai choisi car je trouvais que le local était sympa ! Mais j’ai dû laisser 19 000 euros de dépôt de garantie. J’ai acheté mon mobilier, et le jour de l’ouverture, je n’avais pas un euro pour rendre la mon­naie. J’étais en état de cessation de paiement dès le départ. Au départ on pense que ce sera comme à la télé, que les clients vont se bousculer. Mais les clients il faut aller les chercher. Alors avec des copines j’ai distribué des flyers qui disaient « Ethnicia arrive en France », alors que ça n’arrivait que de ma tête ! Tout le monde pensait qu’Ethnicia arrivait des états-Unis !

Vous parlez souvent de la valeur positive de l’échec ?

Je suis agacée de voir les gens avoir peur de vivre des échecs, car si l’on ne se trompe pas, on n’apprend pas et on n’avance pas si on ne fait qu’avoir des réussites. Dans mon dictionnaire à moi, le mot échec a un sens positif.

Comment avez-vous trouvé les ressources intérieures pour faire face aux difficultés ?

Je m’entraîne à avoir le mental d’un sportif, c’est-à-dire de toujours chercher à dépasser mes limites. Pour moi, l’entrepreneuriat c’est du sport de haut niveau ! D’ailleurs les sportifs se préparent à la compétition, ils savent qu’ils ne vont pas toujours gagner. Je n’ai jamais vu un champion de tennis gagner tous ses matchs ! Je pars aussi du principe que ma vie est courte et que je veux qu’elle soit riche. Le jour où j’arriverai à 70 ans, je veux chanter du Piaf en disant « Non je ne regrette rien ! » Je ne veux rien regretter, donc je veux tout tenter.

Quel est votre prochain défi ?

« Les 100 femmes Ethnicia », qui est le projet de ma vie. J’ai décidé de choisir 100 femmes en France qui ont l’envie d’entreprendre et qui vont participer à l’aventure d’Ethnicia. Nous allons leur apporter une formation d’entrepreneuriat. Nous faisons appel à l’entrepreneuriat solidaire pour rassembler toutes les compétences qui vont permettre à ces femmes de réaliser leur projet. A la clé, plus de 1 000 emplois vont être créés. En une semaine nous avons déjà levé un million d’euros d’aide pour ce projet.

Comment expliquez-vous votre réussite ?

Je ne parle pas de réussite car je ne suis qu’au début de l’aventure. J’ai juste un parcours normal d’entrepreneur, mais qui a été très médiatisé. Je pense que je ressemble à madame tout le monde et chacun peut donc s’identifier à mon histoire. Je pense que la presse s’intéresse à moi aussi car je dis les choses comme elles sont, je n’ai pas envie de dire que l’entrepreneuriat est tout rose !

Les 5 conseils pour les entrepreneurs

  • Croire en soi, même s’il faut savoir douter parfois pour se remettre en question. Aller au bout de ses idées.
  • Ne pas avoir peur de vivre des échecs.
  • Viser la lune car, en cas d’échec, vous atteindrez au moins les étoiles. Il faut viser haut.
  • Développer de l’énergie positive autour de soi. On trouve cette énergie d’abord à travers soi et ensuite à travers les autres, mais il faut d’abord qu’elle vienne de soi.
  • Avoir sa propre définition de la réussite. Moi ma définition de la réussite est de pouvoir créer une grande entreprise qui véhicule des valeurs qui puissent toucher tout le monde. Vis ta vie comme tu veux, et si tu souhaites créer une multinationale, dis-toi dès le début qu’elle va un jour détrôner les concurrents !

Interview de Malamine Koné, PDG d’Airness

Interview de Malamine Koné, PDG d’Airness

Que pensez-vous de la jeunesse actuelle dans l’entrepreneuriat ?

Une véritable énergie positive se dégage de la jeunesse. La jeunesse cherche le chemin de la reconnaissance, elle a besoin de prouver beaucoup de choses, besoin d’être écoutée. Cette jeunesse a plein de choses à dire et elle a juste envie qu’on lui en donne les moyens.

Mettez-vous en place des actions pour aider ces jeunes ?

Je vais être le parrain de « créa’jeunes », qui est un projet mis en place par une association de micro finances. Dans ce cadre, nous allons créer un prix spécial M.Kone pour récompenser et justement encourager les jeunes. J’ai longtemps réfléchi à ce que j’avais à transmettre à la jeunesse. Il est vrai qu’aujourd’hui certaines personnes me présentent comme un modèle et, personnellement, je désire vraiment restituer tout cela à la jeunesse parce que je pense qu’elle le mérite et qu’elle a envie de réussir. Elle possède un véritable dynamisme auquel je veux contribuer.

Quelle a été votre force, votre motivation ?

Je n’ai pas eu de banques derrière moi, mais j’avais la foi : pour réussir, il faut croire en son projet. Lorsque l’on y croit, c’est plus fort que tout. Je savais que je n’allais pas obtenir de prêt bancaire alors je suis allé vendre mon histoire à un fabricant de vêtements. Je lui ai demandé de me fabriquer seulement 5 sweat-shirts et lui ai proposé d’aller moi-même démarcher les magasins. Si jamais j’avais des commandes, elles lui seraient facturées directement il prendrait les recettes, et moi, il me suffisait qu’il me rembourse mes tickets de transport…Mon seul désir était de voir un jour les gens porter ma ligne de vêtements. Je ne m’imaginais même pas que je pouvais gagner de l’argent avec… C’est comme cela que mon aventure a commencé.

Pour se lancer dans un projet, faut-il préférer la rentabilité ou la passion ?

Il faut se lancer dans un projet pour deux raisons : tout d’abord parce qu’on en a envie ; parce qu’on a une passion pour ce projet mais également parce que ce projet peut contribuer à la société.
Ce sont les deux éléments qu’il faut prendre en compte. C’est la jeunesse qui fait le monde, le monde n’avancera pas sans elle. De fait la jeunesse doit penser à réaliser des actions pour continuer à faire avancer le monde.

Avez-vous toujours eu la fibre entrepreneuriale ?

Pas du tout, à la base je suis un sportif. Je voulais être inspecteur de police puis commissaire. Mon DEUG de droit, c’était pour rentrer dans la police. Mais l’accident arriva : il eut lieu près de Béziers, lorsque nous fêtions, avec mes amis, ma présélection pour les Jeux Olympiques d’Atlanta de 1996. Ce fut un très grave accident : 12 opérations au genou gauche. A ce moment-là tous mes rêves se sont envolés. Il m’a fallu penser à faire autre chose ! Et je ne voulais surtout pas tomber dans la fatalité. C’est d’ailleurs ce que je souhaite dire à la jeunesse : la volonté doit toujours être plus forte que la fatalité. C’est le fait d’être sportif mais aussi d’avoir vécu autant de temps dans les quartiers qui m’a aidé. Certes, on parle souvent négativement des quartiers ; mais, dans les quartiers on doit tous se faire une place. Le quartier c’est le reflet de la société : il faut se battre tous les jours pour gagner sa place, réussite ou non. Et ma combativité, je l’ai acquise dans les quartiers.

Mon entreprise s’est développée en 6 ans, très rapidement alors que je n’avais pas de notion de gestion. Et je voudrais insister sur le point indispensable qu’est l’éducation : si j’ai réussi, c’est parce qu’au départ il y a eu une écoute des parents. Après mon arrivée en France, nous avions une grande chance : celle de pouvoir aller à l’école, d’avoir des aides…

Vous avez-su saisir votre chance ?

Et cette chance là : il faut absolument la saisir. Pourquoi se mettre des barrières ? Pourquoi se répéter : « parce que je suis noir… » ; « parce que j’habite dans une cité… » On ne peut pas réussir en se disant cela. On se met une barrière qui permet aux autres de réussir et, de fait, on se pénalise soi-même. Si je n’avais pas eu l’audace et le culot de créer ma propre ligne de vêtements, d’en faire une marque de sport et d’avoir osé essayer de concurrencer Nike et Adidas, eh bien jamais je n’aurais pu accéder à la place à laquelle je suis aujourd’hui.

Le plus important dans la vie c’est d’avoir la santé, parce que l’intelligence est également répartie. Personne n’est réellement plus intelligent que l’autre et chacun de nous a une valeur ajoutée. Ce que je peux conseiller à la jeunesse c’est : « Travaillez ensemble ! ». Nous sommes tous complémentaires. Il nous faut apprendre à assembler nos valeurs ajoutées.

Comment conciliez-vous la gestion d’entreprise et l’engagement ?

Ce n’est pas difficile, tous les pays que je visite sont sous contrats avec la marque Airness, notamment j’ai 8 sélections en Afrique, bientôt j’en aurais un peu plus. C’est plutôt du mécénat, on ne se rend pas encore compte qu’une équipe nationale : c’est l’image du pays. Je crois que c’est important de le faire partager, car pour moi la réussite c’est quelque chose qui doit se partager.

Pour moi c’est un code d’honneur, je dois partager ma réussite avec les Français parce que je dois tout ce que j’ai aujourd’hui à la France, et je dois bien évidemment la partager avec l’Afrique parce que c’est une fierté, c’est une marque française mais c’est aussi la marque d’un jeune africain (Magreb et Afrique noire confondus). C’est pour dire à tous ces africains qui ont aussi envie de se battre et de dire qu’en Afrique il n’y a pas que la misère et que nous sommes aussi capables de réussir.

Attention ! Il ne faut pas non plus se servir de mon exemple pour dire : « il faut venir en Europe ! ». Si on vide le pays alors qui pourra le construire ? En Afrique existent d’immenses opportunités : il faut juste s’en donner les moyens. Ce qui bloque ce sont les manques de moyens. Nous voulons être à l’écoute afin de bien répondre à tous les besoins. Le prix « M. Kone » sera tout d’abord remis à des français et, si ce prix obtient tout le succès que nous espérons, nous pourrons alors le remettre à des africains.

Pensez-vous que les gens peuvent se former à l’entrepreneuriat ?

Je crois que c’est quelque chose d’inné. On peut se former à tout mais c’est quelque chose d’inné. On peut se former dans la mesure où on a la volonté. Mais on s’improvise pas chef d’entreprise. Il y a la rigueur dans la gestion. Beaucoup espèrent gagner de fortes sommes tout de suite. Or il faut savoir qu’on perd plus d’argent qu’on en gagne. Il m’a fallu apprendre sur le tas.

Avez-vous eu des soutiens ?

Ma famille, mes amis, mon équipe, je pense qu’encore une fois la réussite c’est d’abord la volonté d’un homme, puis elle se concrétise par le travail d’une équipe. La réussite n’est jamais solitaire. Au début j’ai juste été voir des gens et je leur ai dit que je voulais avoir la première marque française de sport, et j’ai écouté ceux qui me disaient que c’était une bonne idée et qui voulaient travailler avec moi, j’écartais ceux qui réfléchissaient trop, car quand on veut entreprendre, hésiter n’est pas bon. Il faut foncer lorsque l’on a la foi et le projet.

Voilà comment je me suis entouré au début. Je répète toujours qu’il vaut mieux essayer avant de conclure. Le message que je porte à la jeunesse c’est aussi que si l’argent n’a pas d’odeur, la réussite n’a pas de couleur. Je l’ai exprimé naturellement ainsi au Sénat, mais c’est tellement important de le dire. Tout le monde est au même niveau et c’est une façon de lutter contre ce racisme qui monte en puissance. C’est nous-même qui contribuons au développement du racisme : il faut que nous arrêtions de nous sous-estimer ; de nous dénigrer. Il faut montrer que nous sommes intelligents, que nous méritons notre place. Les mentalités vont changer doucement. Soyons patients, mais travaillons. Il faut se l’ancrer dans la tête.

Quelles valeurs doivent avoir les entrepreneurs ?

Il faut être rigoureux dans le travail, dans la gestion, être persévérant parce que l’abnégation c’est très important, aimer le travail, être créatif car l’originalité, pouvoir se dépasser soi-même.

Pensez-vous qu’on peut encore entreprendre en France ?

Ce n’est pas bloqué, il y a de la place. Justement le prix M.Kone aura une spécificité. Il récompense les créations d’entreprises mais aussi la reprise d’entreprises. Parce qu’en France, il existe plus de 500 000 entreprises qui souffrent et qui vont passer la main. Donc il faut former les jeunes dès maintenant à reprendre ces firmes. Il s’agit de 500 000 entreprises potentielles pour demain, c’est à ces entreprises qu’il faut apporter une originalité. Il ne faut pas uniquement parler de création d’entreprise. Aussi, il est nécessaire de se concentrer sur ce que nos parents ont déjà créé pour le développer à notre manière : c’est ce que j’appellerais « le second souffle » dans la création d’entreprise. Je veux personnellement axer ma stratégie vers ce domaine car je trouve qu’on n’en parle pas assez souvent.

Et aujourd’hui, c’est quoi votre plus grande fierté ?

C’est de partager ce que je gagne avec les gens.

Quels sont les conseils que vous donneriez à de futurs entrepreneurs ?

Avec du travail et de l’abnégation, aucune barrière n’est infranchissable. Le premier club de football français, le Havre, créé en 1872 a fait appel à Airness. Ils ont dit qu’ils étaient le premier club français et qu’ils voulaient travailler avec la première marque française. Ils n’ont pas cherché à connaître les couleurs, la banlieue…Ils ont dit « ok » c’est très bien ce que vous faites. Donc cela c’est le travail. Il faut aussi savoir s’entourer, faire confiance aux copains et aussi savoir orienter les copains : marcher ensemble créer un effet de force.

Interview de Jonathan Benassaya, PDG de DEEZER

Interview de Jonathan Benassaya, PDG de DEEZER

Pourriez-vous nous résumer en quelques mots votre entreprise ?

Deezer.com est un site d’écoute de musique gratuit illimité et légal créé en août 2007 par Daniel Marhely et moi-même et qui compte à ce jour 30 salariés. Il s’agit d’un concept simple puisque nous rémunérons les artistes et l’ensemble des ayants droits en partageant les revenus publicitaires. Le site propose aux utilisateurs d’écouter librement plus de 3.7 millions de titres ou d’accéder à plus de 30 webradios thématiques. Grâce au réseau communautaire de plus de 6 millions de membres, les deezernautes peuvent échanger et partager leurs playlists.

Comment vous est venue votre idée de création ?

L’idée vient de Daniel Marhely, 24 ans, autodidacte, qui a rapidement arrêté l’école à 16 ans pour se consacrer à sa passion : l’univers du net. Il avait créé en avril 2006 un site de partage de musique sous le nom de Blogmusik. Le site existait sans accord avec la Sacem. J’ai rejoint Daniel dans l’aventure en janvier 2007 pour réfléchir à une stratégie de « légalisation » du site. A ce moment-là, crise du marché oblige, le site stagnait et sa place interdite par la Sacem devenait une entrave. Nous avons décidé de fermer Blogmusik pour négocier avec les ayants droits. Le 22 août 2007, un premier accord était signé avec la Sacem et Blogmusik s’est refait une santé sous le nom de Deezer.com !

Vous êtes-vous associés ?

Oui ! Daniel et moi sommes associés. En qualité de Directeur Général, il gère toute la partie technique du site. Moi, en qualité de Président, je gère toute la partie business au quotidien.

Quelles sont les premières difficultés que vous avez rencontrées ?

Dés le départ nous étions en difficulté. Nous avions déjà des contacts avec des majors qui nous ont dit « ironiquement » d’aller négocier avec la Sacem avant de venir les voir. Nous devions d’une part convaincre la Sacem et par la suite les maisons de disques de nous rejoindre dans ce nouveau business model. Ce qui n’était pas simple …

Comment les avez-vous résolues ?

Avec de la volonté, de la persévérance mais aussi avec bon sens et du « bagou » ! Le marché de la musique étant en crise, nous avons commencé à leur démontrer que les habitudes de consommation de la musique étaient en train de changer : les ventes de CD étaient en chute libre. Le numérique était en train de prendre le dessus. Le téléchargement illégal ne cessait d’augmenter. Il fallait donc leur démontrer qu’en se réunissant entre acteurs du marché, il existait des portes de sortie et que nous étions peut être une solution face à la crise, en proposant de la musique en écoute gratuite sans limite et surtout légalement.

Comment êtes-vous parvenus à développer votre activité ?

Petit à petit : à deux au départ avec Daniel, puis à 4 puis 10 et 30 aujourd’hui ! Nous avons aussi la chance d’avoir à côté de nous des partenaires financiers qui ont cru en nous, au concept et qui nous soutiennent régulièrement.

Quels ont été vos facteurs clés de succès ?

Je dirais que nous sommes arrivés au bon moment : Radioblog fermait. Aussi, il y avait une place à prendre, une attente de la part des consommateurs. Nous avons eu aussi un bon soutien médiatique. Il faut dire que nous étions les premiers en France à lancer un site d’écoute de musique gratuit et légal ! Nous avons aujourd’hui acquis le soutien des maisons de disques, que ce soit les majors ou les labels indépendants. Et nous avons aussi la chance d’avoir des « deezernautes » fidèles et de plus en plus nombreux, puisque nous sommes passés de 600 000 au lancement en août 2007 à plus de 3 millions de membres en France.

Quels sont vos nouveaux défis ?

Continuer à faire évoluer et développer le site, développer la publicité… car il faut bien tenir compte que nous avons seulement un peu plus d’un an d’existence. Le site a grossi et a évolué très rapidement. Tout cela, il faut aussi le « digérer » et le gérer au quotidien ! mais nous avons sous le coude de nombreux projets !

Quels sont vos axes de développement ?

Nous travaillons sur la notion de mobilité. Les utilisateurs veulent aujourd’hui retrouver et accéder à l’offre de deezer partout ! On a lancé avec succès une application iPhone et iPodtouch pour pouvoir retrouver gratuitement les webradios de deezer sur ces supports. Nous nous sommes associés avec Logitech afin de retrouver également les 30 webradios thématiques sur toute la gamme de radio wifi Squeezebox.

Trois conseils pour ceux qui entreprennent ?

Je pense qu’il faut de la détermination, de l’ambition et du courage !

Interview de Pierre Kosciusko-Morizet, Fondateur et PDG de Price Minister

Interview de Pierre Kosciusko-Morizet, Fondateur et PDG de Price Minister

En quoi consiste l’activité de Price Minister ?

L’activité historique et principale repose sur le principe d’ « Achat-Vente Garanti » que nous avons inventé en août 2000. Ce système permet aux internautes de s’acheter et de se vendre entre eux des produits, sans que le produit passe entre nos mains. La mise en vente d’un produit est gratuite et la somme que paye l’acheteur inclut la commission de Price Minister. Le site Price Minister représente le « Tiers de confiance », c’est-à-dire la garantie pour le vendeur qu’il sera payé et pour l’acheteur qu’il recevra son produit ou, à défaut, sera remboursé. L’activité a démarré autour de la vente de livres, CD, DVD et jeux vidéo, puis nous avons élargi la gamme des produits à la téléphonie, images et sons, informatiques, textiles, articles de sport… Nous proposons maintenant tous types de biens.

Comment vous est venue l’idée de Price Minister ? 

Intellectuellement : l’idée est venue de la frustration que nous avons ressentie en vendant nos livres scolaires, repris à bas prix et partiellement. D’autre part, tout le monde n’habite pas à côté d’un magasin d’occasions. Nous avions donc à l’esprit d’optimiser ce marché.

Pratiquement : l’idée m’est venue aux états-Unis où j’ai travaillé en 1999. J’y ai découvert un site similaire qui a éveillé en moi l’envie de rapporter ce concept en France.

Comment s’est déroulée votre levée de fonds ?

La première levée de fonds s’est effectuée très rapidement. Une fois rentré en France, le 30 juillet 2000, j’ai débuté avec mes associés la réalisation du business plan que nous avons bouclé le 20 août. Le 15 septembre, nous avions les signatures des investisseurs pour un montant de 700 000 euros. Nous n’avons pas dit aux investisseurs potentiels « nous avons un projet », mais plutôt « nous avons monté une société ». Nous avons joué la carte de la mise en concurrence des investisseurs et du langage concret : « il nous faudrait tant, nous allons en faire tant, avec une valorisation de tant… ».

Ce parti pris a bien fonctionné puisque nous avons facilement réussi à lever des fonds en diluant le capital d’un peu moins du quart. En juin 2001, la seconde levée de fonds a été plus délicate. Nous avions mis en ligne le site en janvier 2001 mais, en juin, les transactions se faisaient encore rares. Le véritable décollage ne s’est produit que vers juillet 2001. Mais cela, les investisseurs ne pouvaient pas encore le savoir et nous avons failli être obligés de stopper l’activité car nous n’avions plus de cash. Nous ne pouvions même plus payer le loyer… Autant dire que l’ambiance était assez tendue ! Finalement, nous avons réussi à lever un million d’euros in extremis. Cela nous a permis de gérer la phase de croissance très forte que nous avons connue juste après. Nous avons grossi de 30 % tous les mois pendant deux ans ! Nous avons procédé à une troisième levée de fonds début 2002 à hauteur d’un million d’euros mais notre société avait déjà bien décollé et la procédure s’est avérée plus facile. Pour les trois levées de fonds, nous avons choisi de faire appel à des Business Angels.

Comment pouvez-vous expliquer ce décollage ?

Nous ne saurons jamais trop pourquoi. La théorie de l’effet des réseaux explique que « l’intérêt d’un réseau est proportionnelle au carré de ses utilisateurs ». Traduisons cette théorie par l’image du fax. Au début, la personne s’envoyait des fax à elle-même, puis à ses amis, et enfin, chacun s’étant équipé, tout le monde a voulu un fax… le phénomène a été similaire avec les téléphones, les sites de rencontres, d’emplois et les réseaux sociaux. En 2001, je pense que nous avons su convaincre suffisamment de vendeurs de faire confiance à notre site et de pouvoir ainsi proposer aux acheteurs un choix de produits assez vaste. Les vendeurs ont mieux vendu et ont commencé à conseiller le site à leur entourage.

Vos conseils pour les entrepreneurs ?

  • Montez votre boite ! Le risque est en réalité très léger puisque, si on connait l’échec, au pire des cas on retrouve facilement un travail après. Faites quand même attention à ne pas trop vous endetter car il faut pouvoir rebondir. évitez donc de vous porter caution personnelle.
  • Ne parlez pas de « projet » aux investisseurs mais d’ « entreprise » ! Si vous souhaitez tester votre idée, parlez-en avec vos proches. Mais n’oubliez pas que les investisseurs mettent de l’argent dans une société et non pas dans une idée.
  • Faites attention aux personnes avec qui vous vous associez. Dans les moments difficiles, il est important d’avoir une équipe solide.
  • Cherchez le juste équilibre entre les bons conseils et les discours pessimistes des personnes qui vous disent que cela ne marchera jamais.

Un mot aux investisseurs ?

Je suis moi-même investisseur à mon petit niveau. De par mon expérience, je peux affirmer que ce qui fait la réussite d’un projet se trouve au niveau de l’équipe et ne dépend pas des questions de haut de cycle ou bas de cycle. Si on se demande à quelle période il est préférable d’investir, j’opterai même pour le bas de cycle. Les entreprises qui se montent en période de crise ont moins de concurrence et démarrent sur des bases saines, car le fait de créer dans une période un peu tendue les rend plus solides. L’important est de vendre les actions en haut de cycle car il y a plus de chances d’être gagnant.

Interview de Gilles Babinet, Serial entrepreneur

Autodidacte et passionné par la création d’entreprise, Gilles Babinet s’est fait connaître par ses nombreux succès entrepreneuriaux. Cet entrepreneur en série fourmille d’idées et témoigne d’une véritable émulation créatrice. Prenez garde : sa passion pour la création d’entreprise est contagieuse !

Présentez-nous votre parcours entrepreneurial

Mon parcours est celui d’un autodidacte ayant quitté l’école vers 15 ans pour travailler. Mon baccalauréat, je l’ai finalement passé en candidat libre à l’âge de 20 ans, avant de monter ma première société à 23 ans. Durant deux années, j’ai développé une entreprise d’alpinistes du bâtiment qui n’a rapidement pas trop mal fonctionné. Je me suis ensuite tourné vers un nouveau projet de création d’entreprise dans un tout autre domaine, celui du design industriel de produits high-tech (téléphones, ordinateurs…). Cette aventure a duré 8 ans. J’ai revendu l’entreprise Absolut Design en 2000 au groupe Euro RSCG.

Puis j’ai créé et développé Musiwave, une société spécialisée dans le service de musiques pour les opérateurs de téléphones, jusqu’en 2006 où je l’ai revendue à des américains. Depuis cette date, je me suis impliqué dans plusieurs projets entrepreneuriaux, à titres divers : Mxp4, une société qui produit de la musique interactive, Eyeka, une plateforme reliant les marques à des auteurs de photos et vidéos, DigiCompanion, spécialiste de la distribution de contenus digitaux destinés au campagnes marketing, Awdio, un site permettant d’écouter les clubs en live dans le monde entier et enfin Sawd, dont la vocation est de faire émerger de nouveaux talents dans l’univers de la musique et de l’image. En plus de ma holding personnelle, je suis impliqué donc dans six sociétés.

Quand vous étiez jeune, rêviez-vous de créer des entreprises ?

Je me souviens que vers 20 ans, un ami m’avait demandé ce que je voulais faire plus tard. à cette question j’ai répondu que, selon moi, être entrepreneur était la pire des voies et que gagner de l’argent en montant des entreprises était tout simplement sans intérêt ! A cette époque je cherchais mon orientation professionnelle. J’ai tout envisagé, du métier d’ingénieur jusqu’à certains métiers de la fonction publique, sans découvrir ce qui m’enthousiasmait réellement. Lorsque j’ai crée ma première société, je travaillais comme manœuvre dans une société d’alpinistes du bâtiment. Voyant que ce secteur regorgeait de travail, l’idée m’est venue de créer ma propre société. Je ne connaissais absolument rien à l’entrepreneuriat, et je pense qu’en ce qui me concerne cela ne m’a pas été défavorable : quand un jeune monte une société, il bénéficie d’une certaine bienveillance de la part des autres.

Les investisseurs vous ont-ils toujours fait confiance ?

Je n’ai fait appel à des investisseurs que très tard dans mon parcours d’entrepreneur. Mes premières sociétés, je les ai créées avec mes fonds propres. Aujourd’hui je ne monte plus une entreprise sans lever des fonds. Cela me paraît presque inconcevable de choisir de ne pas profiter de ce levier de développement exceptionnel. Bénéficier de l’argent d’investisseurs représente un avantage conséquent pour l’entreprise car le développement n’est pas freiné par un manque de fonds. Il peut donc se faire rapidement et à une plus grande échelle.

Comment réussissez-vous à conserver cette créativité entrepreneuriale ?

J’ai finalement assez peu d’idées moi-même, mais je lis beaucoup et je rencontre énormément de monde. La clé pour avoir la bonne idée au bon moment reste, je pense, de garder toujours les oreilles et les yeux grands ouverts. Une bonne idée est parfois la synthèse de nombreuses autres.

Votre vision de l’entrepreneuriat a-t-elle évolué à travers toutes ces expériences ?

L’expérience donne évidemment de bons réflexes. La réussite de mes sociétés m’a ouvert de nombreuses portes et m’a permis de me constituer un réseau relationnel solide. Grâce à ce network, j’ai toujours une personne à contacter en cas de difficultés, en ce qui concerne n’importe quelle question relative à la création d’entreprise. Mais, malgré l’expérience, je continue à faire des erreurs.

Quel est le principal réflexe que vous avez acquis à travers vos diverses expériences de création d’entreprise ?

Une chose évidente mais que beaucoup d’entrepreneurs omettent de faire : lorsqu’on a une idée de création, le premier réflexe à avoir est de passer du temps à surfer sur le net et à rencontrer des gens afin d’avoir un aperçu de tout ce qui peut ressembler à son projet, en France comme à l’étranger. Cette démarche apporte beaucoup car elle permet d’analyser le fonctionnement d’une idée proche de la vôtre, de déterminer les pièges à éviter ainsi que les points à développer pour se démarquer.

Interview de Philippe Bloch, Co-fondateur de Columbus Café

Pouvez-vous nous expliquer en quelques mots votre expérience de création des cafés Columbus ?

Après avoir écrit mon premier livre « Service compris », consacré à la qualité de service que les entreprises peuvent apporter à leurs clients et animé de nombreuses conférences sur le sujet, j’ai voulu tester mon aptitude à mettre en pratique dans une entreprise les idées que je prônais. Tout fonctionnait bien pour moi, alors j’ai décidé de me mettre en danger et tenté de réinventer un marché.

Mon idée de création m’apparaît, lors d’un voyage à New York, en observant le succès d’un café copiant le modèle Starbucks. Je parle de l’idée à mon associé, qui n’y croit pas mais qui accepte de m’accompagner. En 1994, nous ouvrons les deux premiers Columbus Cafés qui connaissent un échec. Nous étions convaincus que nous devions lancer le projet tout de suite, sous peine de nous le voir copier, et du coup nous sommes allés trop vite et avons mal choisi nos emplacements. Nous disposions d’assez gros moyens financiers que nous avons dépensés sans faire preuve d’une grande imagination. Ce n’est que plus tard, lorsque nous avons été confrontés à de graves difficultés financières, que nous sommes redevenus créatifs !

Quel était votre différence avec les autres ?

Je ne souhaitais pas simplement vendre du café, mais surtout offrir à nos clients les 15 meilleures minutes de leur journée, 15 minutes de bonheur. De la même manière, ma relation avec mes équipes et mes collaborateurs était beaucoup plus chaleureuse que si mon but était juste de gagner de l’argent. Au bout d’un an de pertes, j’ai failli abandonner. À ce moment-là, ce sont nos équipes de baristas qui nous ont soutenus, et non pas notre banquier qui nous assommait !

Le quotidien était ponctué de difficultés. Mais j’étais passionné par mon projet et j’arrivais à me raccrocher à l’enthousiasme de mon rêve resté intact. J’ai compris que, si l’on veut se sortir d’une période de crise, il fallait l’affronter de manière frontale et courageuse. Nous avons rebondi en fermant nos deux premiers cafés et en ouvrant des points de vente à la Fnac et dans l’agence de pub DDB.

Que s’est-il passé ensuite ?

Nous avons ensuite repris du poil de la bête et acheté des fonds de commerce qui ont très bien fonctionné. En 2001, une dizaine de points de vente Columbus existent et, pour développer l’entreprise qui continue à perdre de l’argent malgré sa forte croissance, je décide de faire appel à des investisseurs, ce qui a été ma grande erreur. Associé avec celui qui était alors mon ami à hauteur de 50 %, je deviens minoritaire dans le capital et ne suis plus chez moi dans cette entreprise. Nous ouvrons un magasin par mois et commençons à nous développer en Belgique et au Moyen-Orient. Des divergences stratégiques apparaissent avec les actionnaires, qui s’opposent à ma volonté de développer l’enseigne en franchise. J’écris « Bienheureux les fêlés » qui rencontre un vif succès, ce qui a pour effet d’attiser la jalousie de mon associé. En 2004, je suis débarqué de ma propre boîte par mon associé et mes actionnaires.
Ils changent les serrures de nos bureaux afin que je ne puisse plus accéder à mes dossiers et à quinze ans de vie professionnelle. L’aventure s’arrête là pour moi, violemment.

Je n’ai cessé depuis d’entreprendre et d’investir dans des start-up, et trouve toujours le même plaisir à innover et à prendre des risques.

Cette expérience ne vous a-t-elle pas dégoûté de l’entrepreneuriat ?

De l’entrepreneuriat non, mais de l’amitié en affaires et de certaines associations, oui. Dans cette aventure, j’ai peut-être perdu d’un point de vue financier, mais j’ai beaucoup gagné en maturité et en expérience. J’assume toutes mes erreurs et mes échecs et n’éprouve aucune rancoeur. Ce ne sont pas les difficultés qui déterminent si l’expérience est bonne ou pas. La question est de savoir si on avance en prenant du plaisir. Cela reste ma plus belle aventure professionnelle.

Comment avez-vous réussi à garder votre enthousiasme au milieu des difficultés ?

Ma conviction est que, quand on s’entraîne à l’adversité, on devient plus fort et on peut par la suite encaisser beaucoup de choses. Quand on vit dix années de difficultés, cela devient un style de vie. Alors, les mauvaises nouvelles font partie du quotidien et les bonnes, on en profite pleinement !
Un deuxième point : je ne sais pas faire les choses sans y mettre une grande ambition. Avec Columbus, je voulais devenir le numéro 1 du café. Lorsqu’on nourrit un grand rêve, les difficultés du quotidien semblent moins importantes. Je me disais que ce n’était pas si grave que cela d’être harcelé par mon banquier pour 10 000 euros de TVA puisque j’allais devenir le numéro 1 ! Avoir un grand but permet d’encaisser toutes les difficultés. Après, je pense que tout le monde n’est pas fait pour entreprendre. Certaines personnes ont une inclinaison naturelle à l’angoisse et risquent de mal vivre le stress lié à la création.

Que pensez-vous de l’entrepreneuriat en France ?

Je ne sais pas encore comment on va sortir de la crise, mais je pense qu’on va voir émerger de nouveaux modes de travail. L’entrepreneuriat sera une valeur en hausse dans les années qui viennent, en France comme ailleurs. Il existe une vraie énergie entrepreneuriale en France. Créer sa boîte est devenu facile et les risques liés à la création ont été dédramatisés. De toute façon, on prend des risques chaque jour dans sa vie, alors autant s’amuser ! Malgré les difficultés, on prend beaucoup de plaisir à créer son entreprise. C’est quand même un beau métier l’entrepreneuriat !

Les 5 conseils de Philippe Bloch aux entrepreneurs

  • Importer l’angoisse et exporter de l’enthousiasme.
  • Penser grand.
  • Ne jamais écouter celui qui vous explique pourquoi ça ne marchera jamais.
  • Être tenace, volontaire, faire confiance à ses équipes.
  • Ne jamais tout faire uniquement pour l’argent