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Comment intégrer une entreprise dans un groupe ?

Etablir un climat de confiance avant de procéder à toute intégration : c’est le crédo de José Pinto, Directeur Général Ile de France du groupe TFN (groupe existant depuis 1944).

Pouvez-vous nous décrire votre parcours ?

J’ai commencé dans le domaine du déménagement, c’est là que j’ai forgé mes armes. Le déménagement demeure un secteur d’activité très spécial : on peut passer de 80 salariés en semaine à 500 le week-end ! La présence d’une population très hétérogène complique également la tâche aux managers.

Ensuite, j’ai reçu une proposition pour entrer dans le secteur du nettoyage où le management est égalément réputé difficile. Depuis je ne l’ai plus quitté puisque j’y travaille depuis 15 ans dont 10 chez TFN.

En ce qui me concerne, j’ai une profonde admiration pour les gens qui travaillent dans ce secteur : ce sont souvent des personnes qui ont des difficultés mais qui sont  extrêmement courageuses. Dans ce type d’activités les relations humaines et le respect d’autrui se révèlent indispensables. C’est sans doute ce qui m’intéresse le plus.

Pourquoi avez-vous privilégié la reprise d’entreprises, et non leurs créations ?

Autrefois, le marché était extrêmement vaste et les entreprises de nettoyage privilégiaient la croissance interne au regroupement. Petit à petit, depuis 10 ans, le marché s’est clôturé. Il s’est resserré car toutes les entreprises ont voulu réduire leurs frais vis-à-vis de ces prestations qui leur coutaient très chères. Il est donc devenu indispensable de regarder à l’externe pour se développer et augmenter les volumes et le chiffre d’affaire.

Chez TFN cependant, les rachats d’entreprise se sont toujours effectués sur d’autres métiers, autour du service aux entreprises. Notre politique reste à la diversification. Ces nouveaux métiers nécessitent de nombreuses techniques et le développement de l’entreprise se fait donc par le recrutement de compétences. Ce sont elles qui alimentent le marché, et c’est pour cela que le coût de la main d’oeuvre devient de plus en plus élevé.

Pourquoi avez-vous choisi cette voie du regroupement ?

Le service à l’entreprise demeure notre coeur de cible : entretien, sécurité, nettoyage… Nous savons faire du service et petit à petit nous affinons nos savoir-faire dans les nouvelles activités : on pourrait ainsi dire que TFN possède une culture du service au client, culture qui perdure depuis trois générations. Nous voulons bien le faire et nous le faisons bien !

Le secteur du service représente l’avenir. Nos clients ont de moins en moins de temps, ils se recentrent donc sur leurs métiers et, de fait, décident de sous-traiter. Le nettoyage en interne n’existe plus.

Quels sont les critères d’une reprise d’entreprise ?

Le premier critère est bien entendu le savoir-faire de l’entreprise rachetée, mais il faut aussi compter avec des critères académiques comme le jeu de l’offre et de la demande. Dans notre secteur, il y a peu de ventes pour beaucoup d’acheteurs et encore plus dans le secteur du service. Ainsi quand le client choisi l’entreprise de service avec laquelle il décide de travailler, son principal élément de sélection réside dans la présence de cette entreprise ou non sur le marché.

Le deuxième critère est celui de la compétence des salariés de l’entreprise que l’on rachète.

Le troisième critère consiste à regarder le portefeuille clients de la société à acquérir.

Enfin, le dernier critère, le plus logique et le plus important : celui des finances, car l’objectif reste toujours d’obtenir un retour sur investissement.

Quelles sont les étapes d’une reprise ?

Dans notre secteur, il n’y a pas de concurrence lors du rachat d’une entreprise. Lorsque que le vendeur vous délivre un mandat d’achat vous êtes le seul. C’est le vendeur qui fait le choix du repreneur de l’entreprise.

La sélection se fait à la base. Le plus souvent, il s’agit d’une entreprise familiale donc d’un bien sentimental. C’est pourquoi il faut séduire le vendeur : c’est à ce moment là que la concurrence apparaît. Séduire, démontrer vos compétences, expliquer votre projet d’avenir représentent des éléments essentiels. En fait, il s’agit de faire du lobbying en amont, un an en avance afin de sonder et de préparer le terrain. Notre groupe, ayant toujours gardé, malgré sa taille, cette « volonté familiale », il reste souvent plus aisé de convaincre le vendeur.

Ensuite, il faut procéder à un audit social sur la partie salariée de l’entreprise : prendre connaissance du nombre de contrats à durée déterminée et indéterminée, savoir s’il y a beaucoup d’actions engagées auxprud’hommes…

Après la vérification du volet social, il faut s’atteler aucôté financier : s’informer des dettes s’il y en a, savoir si son immobilisation est ajustée et si sa trésorerie est en équivalence avec son chiffre d’affaire… Tous ces critères permettent d’estimer la valeur de rachat de l’entreprise.

Quel est le degré d’indépendance des entreprises rachetées ? Y a t il un contrôle total ?

Tout dépend de l’entreprise qui rachète. Il y a quasi systématiquement une totale intégration informatique pour l’entreprise rachetée. Il faut les mêmes outils pour tout le monde : la même gestion, les mêmes réglages des tarifs, les mêmes outils pour les paies… La centralisation est une étape obligatoire.

La phase de démarrage administrative étant amorcée, le pas suivant est celui du personnel. Très souvent, le président de l’ancienne entreprise nous accompagne, afin d’éviter une scission.  Il nous faut conserver un lien avec l’ancienne direction.

Nous conservons les cadres mais il y a une érosion naturelle des postes. Chez TFN nous avons pour règle de replacer absolument ces employés sur d’autres plates-formes. Il s’agit de mutations ou de propositions sur d’autres postes. Certains salariés malgré tout préfèrent partir.

Le problème principal se situe au niveau de la culture d’entreprise. Il y aura toujours des personnes qui se sentiront vexées du rachat de leur entreprise. Le changement de système, de façon de travailler, ajouté à un contrôle accentué, perturbent fortement les salariés. Pour y remédier, il faut porter son attention sur le management humain, basé sur une analyse et un audit du personnel. Nous effectuons également un bilan de compétences avec les salariés afin de savoir si le poste occupé est celui qui convient le mieux. Certains vont tout de même s’adapter en positivant et en voyant les nouvelles possibilités de développement qui leur sont offertes.

Faut-il préférer une reprise nationale à une reprise internationale ?

Pour ma part je n’ai jamais pratiqué de reprises à l’international. Les avantages d’une reprise sur le territoire national sont en premier lieu la connaissance du marché et la maîtrise des pratiques sociales. C’est ensuite une maîtrise des cadres juridiques, sociaux et comptables. A l’international, tout devient plus compliqué, même si un cabinet spécialisé vous conseille. Les licences font que, par nature, la tâche demeure plus ardue.

Selon vous quelle est votre plus grande réussite ?

C’est sans doute d’avoir réussi à fédérer les entreprises du groupe TFN. Auparavant, il y avait au sein de TFN Paris plusieurs sociétés : la Maintenance Paris, TFN, la Rayonnante et Comanet. Tout cela était dispersé en différentes agences avec leurs propres responsables. En 2004 nous avons procédé à une fusion et ce fut le choc des cultures. Cette crise s’est développée en interne, du fait des méthodes de travail subitement différentes. La culture d’entreprise est complexe à gérer dans ces cas là : les gens sont figés par rapport à une marque.

Malgré le travail accompli, des préjugés persistent encore aujourd’hui. De fait, amener les salariés fédérés à penser la même chose que vous ne reste pas une tâche aisée. Lisser les aspérités est un exercice fastidieux mais très noble.

Ce dont il faut être conscient, c’est que sans les salariés vous n’êtes rien. Il ne faut pas l’oublier et tacher de garder les pieds sur terre. Le respect n’est pas incompatible avec la volonté de faire de la marge. Donc, on le fait simplement. Aujourd’hui nous avons un problème de recrutement avec le personnel et nous prenons donc bien soin des personnes en interne. TFN est une entreprise dynamique qui recrute des gens qui veulent avancer. C’est à nous de transmettre l’envie de travailler au sein de notre entreprise. Il faut donc écouter nos salariés, être proche d’eux, établir un climat de confiance, rassurer les gens et ainsi créer des équipes proches où la bonne ambiance règne. C’est cela qui va créer une culture d’entreprise efficace et qui fédère.

S’implanter en Chine

Dynamique entrepreneuriale a interviewé pour vous Jacques Franchet, un ancien directeur des achats d’un grand groupe automobile français en Chine. Il fait le point sur les difficultés de l’implantation et les méthodes pour les dépasser. Jacques Franchet rejoint la Direction des achats du groupe PSA Peugeot Citroën dès les années 80 pour le marché des pièces automobiles. Après la direction des achats, il s’expatrie en Chine où il intégre une joint-venture de 1995 à 2000.

Pourquoi s’implanter en Chine ?

On peut décider de s’installer en Chine dans deux optiques différentes :

  • s’implanter pour réexporter.
  • s’implanter pour conquérir le marché chinois lui-même.

Ce sont deux métiers distincts car dans le cas de la réexportation, il n’y a pas de frais de douanes : les produits ressortent du territoire. Ainsi, il suffit de mettre en place sa structure et on garde la maîtrise complète : maîtrise de son processus, de son produit, de ses achats.

Dans l’autre cas, celui de la conquête du marché, il est nécessaire d’intégrer son processus c’est-à-dire de trouver les matières et les produits sur place. Il faut donc intégrer ses pièces localement pour éviter de payer ses taxes de douanes ainsi que les frais de transport. En effet, ne pas les intégrer entraîne un énorme surcoût : 2 fois et demie le prix de départ.

Quels sont les éléments déterminants dans la réussite ?

Il faut disposer soit d’un expatrié qui connaît parfaitement la Chine, soit d’une personne directement sur place. Cet « associé » aura pour mission d’apporter à l’entreprise une parfaite compréhension de l’organisation du système local. Il doit être aguerri au fonctionnement du pays pour détecter tous les pièges que peuvent tendre les chinois ou leur administration mais cela demeure également valable pour les autres pays.

En Chine plus particulièrement, l’organisation de chaque province est différente et les modalités d’obtention d’un terrain ou d’énergies peuvent beaucoup varier car il n’y a pas d’uniformisation des législations comme en France.

Il faut savoir choisir judicieusement sa région et son emplacement car, même si tout dépend du produit et de ce que l’on souhaite réaliser, il faut pouvoir disposer d’un minimum de moyens logistiques et organisationnels au niveau territorial. Ainsi, il vaut mieux être dans des centres industriels, où l’on trouve de véritables ressources en terme de moyens et de personnels : la mobilité des chinois reste souvent limitée à la région pour des raisons d’organisation du système.

Enfin, rappelons ici que les chinois n’attendent pas les français pour entreprendre et pour créer des produits adaptés à leur marché. Il faut donc se donner toutes les chances d’être crédible vis-à-vis des chinois en leur montrant que des moyens conséquents ont été mis en place en amont. Les chinois ne feront pas de commerce avec vous s’ils ne voient pas les moyens que vous êtes prêt à investir.

Y a-t’il des méthodes ou des appuis pour bien s’implanter ?

Il existe beaucoup d’aides qui ont pour but la croissance du territoire, aides plus ou moins importantes suivant le développement des régions.

On peut également trouver de nombreuses informations dans les CCI françaises et dans les zones de développement économique pour sociétés étrangères, managées en partie par des résidents français pouvant conseiller les entrepreneurs (ce qui a un coût mais lève les obstacles).

En ce qui concerne la forme d’implantation, tout est possible : la Joint-venture ou l’installation à 100%. Les conditions d’implantation sont cependant moins libres quand on touche aux domaines de la stratégie militaire ou de l’automobile (qui fait encore partie des produits stratégiques). En revanche tous les fournisseurs peuvent être indépendants à 100%.

Y a-t-il des différences culturelles notables ?

La principale divergence ne se situe pas forcément sur le plan culturel. Le personnel local que nous avons embauché n’a jamais posé de problèmes, tant sur les méthodes et conditions de travail qu’au point de vue de l’apprentissage. Il suffit d’être civilisé et à l’écoute des individus, c’est un devoir naturel de respect.

Le réel problème réside au niveau de la structure hiérarchique, dans le sens où celle-ci est affiliée au système. Au niveau de l’administration tout prend énormément de temps et l’on n’a jamais affaire au décideur lui-même. Il existe une réelle opacité au niveau de la structure décisionnelle des sociétés avec lesquelles nous travaillons, et notamment dans son comportement vis-à-vis de la société étrangère. Ainsi, au sein de la direction générale de chaque entreprise on trouve un homme du parti que l’on ne connaît pas forcément d’ailleurs.

Pouvez-vous nous donner un exemple de piège culturel ?

En Chine, tout reste très long. Le partenaire ne dira jamais « non », il semblera toujours dire « oui » du bout des lèvres. Il faut bien comprendre qu’en réalité, en période de négociation, l’associé chinois se montre toujours avenant, souriant, aimable et qu’on a donc du mal à saisir ce qu’il pense vraiment. L’autre point sur lequel il est bon d’être vigilent, c’est qu’un contrat signé en Chine n’a pas forcément la même implication que dans notre culture. Bien souvent on ne sait pas sur quel pied danser !

Y a-t-il une anecdote remarquable dont vous pourriez nous faire part ?

Une société X, venue s’implanter en Chine, avait trouvé un partenaire chinois pour faire une joint venture 50-50. Pendant que l’entrepreneur gérait l’installation de l’usine et mettait en place les équipements pour produire des pièces, le partenaire chinois en profitait pour copier tous les procédés industriels venus de France tout en négociant avec l’administration locale pour trois fois le prix de ce qu’il aurait dû.

Parallèlement à cela, il construisait une usine à 50 km de l’usine de son associé français. Le partenaire chinois s’est rendu chez les clients potentiels de la société X qui s’est retrouvée prise au piège et qui a donc dû racheter les 50% de la joint-venture. Ils ont dû trouver de nouveaux clients et ont mis 10 ans pour s’en sortir !

Finalement, conseillez-vous aux entreprises de venir s’implanter en Chine à partir d’une certaine taille ?

Une PME peut décider d’aller s’installer en Chine mais, selon moi, il demeure préférable qu’elle ait une certaine taille structurelle (à partir de 200 personnes environ).

L’implantation en Chine reste à déconseiller aux plus petites structures, sauf si elles adoptent la stratégie du regroupement d’entreprises.

Comment stimuler ses salariés ?

Interview de Mercedes Erra, Présidente Exécutive d’Euro RSCG Monde, Présidente d’Euro RSCG France, Fondatrice de BETC Euro RSCG, première agence française de publicité et Directrice Générale d’Havas. Elle est également Présidente d’Honneur de l’Association HEC et Vice Présidente de l’Association des Agences Conseils en Communication. En Janvier 2008, BETC Euro RSCG, l’agence qu’elle a cofondée, a été nommée « Agence Française la Plus Créative » par le magazine CB News, titre obtenu 11 fois en 13 ans. L’agence a été également nommée « Meilleure Agence Européenne » par le journal américain « Ad Age Global » en 2002.

Pensez-vous qu’il y ait une corrélation entre l’engagement des salariés et les performances de l’entreprise ?

Oui tout à fait ! L’entreprise demeure avant tout un ensemble de personnes. Dans le cas de mon entreprise, qui est une société de service type, les performances sont par excellence liées à l’engagement des salariés. Cela s’applique également dans les entreprises industrielles : il vaut toujours mieux rendre les salariés heureux.

Outre la motivation classique par le salaire, existe-t’il d’autres moyens de motiver les salariés ?

Je pense qu’il faut arrêter de penser que la motivation ne se résume qu’à une histoire d’argent ! On peut avoir un haut salaire et ne pas être motivé. Les études montrent que les salariés sont aussi sensibles à l’attention qu’on leur porte qu’à l’argent.

Ils attendent d’être reconnus et, pour cela, il faut mettre en place des systèmes d’évaluation, d’évolution et ne pas oublier la clarté de l’objectif, le « sens » de l’entreprise. En effet, s’ils sont fiers de leur entreprise, de ses valeurs morales, les salariés seront plus performants. Le fondamental à respecter dans le management, c’est mettre l’humain et ses valeurs au centre des entreprises.

Le « sens » de l’entreprise peut être signifié à travers différents éléments tels que le design du lieu de travail. Un lieu qui a du sens porte les valeurs de l’entreprise, il peut traduire la modernité d’un management, du respect, une hiérarchie peu pesante. Dans notre entreprise, tout le monde a le même bureau.

L’innovation participative, est-ce le seul moyen d’appuyer l’intérêt que l’entreprise porte à son salarié ?

Non ce n’est pas le seul moyen. C’est en réalité plus profond que cela puisque les gens cherchent du « sens », ils aiment être orientés. Tout le monde ne veut pas décider ou forcément participer, il s’agit donc d’orienter. Mais en même temps, il faut que le système soit ouvert, que l’on puisse prendre en compte les différents points de vue.

Créer du sens reste un enjeu difficile, même s’il s’agit d’un enjeu clef pour les entreprises.

On ne peut pas dire, à la tête d’une entreprise: « on pense ce que tout le monde pense ». On doit exprimer un sens.

Ainsi, Air France a émis du sens en disant: « Nous ferons du ciel le plus bel endroit de la terre ».

Devez-vous personnaliser chaque activité pour chaque salarié ou est-il important de créer une unité lors de ces événements, de fédérer ?

Je crois qu’une culture réside d’un partage. Nos salariés travaillent souvent dans les locaux de nos clients et ils se doivent donc de partager une culture d’entreprise qui reste différente de la leur. Nous fonctionnons dans un système dans lequel nous nous nourrissons de la culture de l’autre tout en devant faire vivre sa propre culture.

Le choc des générations ne serait-il pas une limite à l’esprit d’entreprise ?

Je pense qu’on a tout intérêt au mélange et qu’il ne faut pas s’arrêter aux questions d’âge. L’important reste d’écouter ce que disent les individus et non pas ce que tout le monde dit. Aujourd’hui, il y a un problème entre les jeunes et l’entreprise mais pas dans la cohésion entre les générations.

Cependant, ce qui demeure regrettable, c’est qu’en France notre système repose sur l’enfermement. On dit souvent « toi tu es ceci, toi tu es comme cela ». On gagne à sortir des catégorisations et à rechercher le potentiel de chacun. En France, les personnes se doivent d’être compétentes dans tous les domaines, mais c’est une illusion. En réalité, il y a des gens qui sont compétents en organisation, d’autres dans la stratégie.

Existe-t-il des techniques pour stimuler les salariés ?

Il existe énormément de techniques mais je crois à l’exemplarité. Lorsque l’on dit quelque chose, on doit l’appliquer. Il faut que les salariés respectent leur patron et il doit donc le mériter. Les patrons doivent se battre et non se cacher.

Il existe bien entendu des « techniques » comme le fait d’avoir des objectifs, des méthodes d’évaluation…

Comment manage t-on autrement ?

Il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas de management par la technique. Les différentes techniques de management ne comptent pas. Ce qui est intéressant, c’est le management humain.

Je dis souvent que la difficulté réside à rendre les gens généreux. Cependant, plus on donne, plus on reçoit. Il faut savoir donner sans s’attendre à recevoir. Il s’agit d’avoir des valeurs humaines et, cela consiste par exemple à répondre aux jeunes qui postulent, ne serait-ce que pour les orienter. Aussi, il faut faire très attention à ne jamais humilier les gens avec qui l’on travaille.

Dans les échecs, ce type de management se montre particulièrement efficace. Une entreprise peut licencier ou convoquer un salarié qui commet une erreur de façon tout à fait humaine et respectueuse.

On a le droit de ne pas être sûr de soi, d’avoir besoin d’aide. L’entreprise doit aussi soutenir ses salariés.

Le management humain passe par le respect d’une personne, et non d’une fonction.

Les français ont-ils l’esprit d’entreprendre ?

A l’étranger, les gens sont plus sûrs d’eux, l’école les casse moins. Si on regarde dans les parcs en France, on constate qu’une mère regardant jouer son enfant aura tendance à lui dire : « Ne monte pas ! Tu vas tomber ! » tandis que dans d’autres pays on dira après qu’il soit tombé : « Bravo ! Recommence ! »

Le mentorat est arrivé en France.

L’Institut du mentorat entrepreneurial (IME) a été inauguré en avril 2008. Pour vous, Dominique Restino vice-président de l’IME et vice président de la CCIP PARIS a répondu à nos questions. 

Quel est la problématique que vous résolvez ?

L’importance des PME dans le développement économique de notre territoire n’est plus à démontrer. Il faut arrêter de sortir des batteries de chiffres et de passer des mois à les analyser ! Un constat s’impose : nous avons trop peu de grandes PME et aider nos PME à grandir est un réel enjeu économique. C’est dans ce contexte que s’inscrit l’action de l’IME, entièrement dédié aux PME à fort potentiel de développement.

Quel est le rôle de l’ IME ?

L’IME est un nouveau service de la CCIP. Il a pour mission de mettre en relation des dirigeants d’entreprises en forte croissance avec d’autres entrepreneurs expérimentés et reconnus pour avoir à leur actif une réussite entrepreneuriale majeure.

Grâce à cette initiative, un lien privilégié s’élabore entre ces entrepreneurs. Le « mentor », dialogue avec lui lors de rendez-vous individuels mensuels. En parallèle, des ateliers techniques et thématiques réunissent les binômes favorisant ainsi les échanges entre tous les « mentors » et « mentorés ». Ce dispositif facilite le partage de compétences des uns avec les autres grâce à un suivi et une animation permanente organisée par l’IME sur une période de 12 à 18 mois. Pour garantir la pérennité du programme, l’IME encadre la relation mentorale par un code de déontologie et un engagement de confidentialité.

D’où est venue l’idée du Mentorat ?

C’est lors de l’édition 2006 du colloque annuel de la Fondation de l’Entrepreneurship qu’est née l’idée d’adapter au marché francilien le concept québécois du « mentorat d’affaires ». Avec la Fondation de l’Entrepreneurship nous avons décidé de conjuguer nos efforts pour favoriser le mentorat en Ile de France et la transmission (ou relève) d’entreprise au Québec, puis d’échanger nos savoir-faire et expertises dans ces domaines. Une convention de partenariat a été signée, le 13 décembre 2006, entre Régis LABEAUME, Président Directeur Général de la Fondation de l’Entrepreneurship (devenu depuis Maire de la ville de Québec) et Pierre SIMON, Président de la CCIP.

Qui sont les mentors et les mentorés ?

Le mentoré est dirigeant-propriétaire ou actionnaire majoritaire d’une entreprise d’au moins deux ans d’existence qui connaît une progression significative de son chiffre d’affaires, compte au minimum 10 salariés, possède un véritable potentiel de développement.

Le mentor est dirigeant-propriétaire ou actionnaire significatif d’une entreprise. Il a un effet miroir’ pour le mentoré, puisqu’il a traversé les mêmes phases de développement, avec ses hauts et ses bas. Il peut l’aider à voir plus grand, plus loin. Le mentor n’est ni un coach, ni un conseil. C’est une démarche d’entrepreneur à entrepreneur, d’échanges d’expériences (notamment en termes de croissance de l’entreprise), une démarche citoyenne et aussi un engagement personnel actif pour le développement des territoires !

Qu’entendez-vous par « relation mentorale » ?

La relation mentorale, c’est un état d’esprit, une relation humaine. Le mentoré recherche une personne qui a lui aussi eu un jour une vision, une passion et qui a voulu la réaliser. Il recherche une personne avec qui il pourra échanger librement, et pour cela mieux vaut pouvoir confronter cette vision avec un pair, qui lui-même a connu une forte croissance, c’est-à-dire la croissance du chiffre d’affaires et des effectifs. Certains mentors sont passés de 10 à 100, puis de 500 à 1000, voire à 10000 salariés !

A qui le mentoré peut-il se confier ? Au mentor !

Le Mentor, lui, comprend le fait qu’on puisse avoir une idée qui vous tient et ne vous lâche plus. Il respecte la vision, la passion, cette volonté irrépressible d’aller plus loin, plus haut. Mais, il ne juge pas car il est lui même passé par là ! Il sait qu’il est normal de se poser des questions, qu’il est indispensable de faire tester différentes hypothèses auprès de quelqu’un qui restera objectif.

Le mentor apporte son expérience, certes, mais surtout une forme d’apaisement ! En posant des questions pertinentes (ou impertinentes !), il aide le mentoré dans sa réflexion à trouver en lui-même les réponses à ses propres questions. Plutôt que d’entrer dans les problématiques techniques de l’entreprise, il s’agit d’une relation humaine, et non d’une expertise qui apporterait une solution toute faite. De cet échange, le Mentor s’enrichit également humainement et intellectuellement. Il trouve la satisfaction dans le partage puis dans la réussite de son mentoré.

Quelles sont les valeurs de l’IME ?

Des valeurs qui concilient l’humain et le professionnel : reconnaissance et expérience, audace et croissance, citoyenneté et responsabilité, partage et confiance. Avec l’Institut du Mentorat Entrepreneurial, la CCIP s’inscrit donc pleinement dans sa mission d’appui aux entreprises. L’Institut se situe d’ailleurs à la Bourse de Commerce, au cœur de Paris, qui abrite déjà de nombreux services de la CCIP dédiés aux entreprises. Elle apporte une réponse à un besoin réel d’intérêt général, pour aider les PME à se développer.

Une opération menée tambour battant !

Au printemps 2007, Dominique Restino organise une étude de faisabilité pour la mise en place d’un accompagnement mentoral inspiré du modèle québécois, mais entièrement dédié à ces PME à fort potentiel de croissance dont nous parlions au début.

En parallèle, le Ministre des PME, du commerce et de l’artisanat de l’époque, Renaud DUTREIL, décide d’associer la CCIP au projet « Gazelles »  (programme d’aide aux PME de 5 à 250 salariés affichant une forte croissance de leur chiffre d’affaires) et inclut le projet Mentoral dans le dispositif « Statut de la PME de croissance » !

Le 1er novembre 2007, l’IME est créé : Dominique Restino en devient le Président délégué. Le 21 décembre 2007 s’est tenu le premier comité d’orientation avec les cinq principaux partenaires de l’IME : CDC Entreprises, Oséo, le Réseau Entreprendre Paris, Ernst & Young et l’Afic (Association française des investisseurs en capital). Enfin, le 15 avril 2008, la première promotion de dix binômes « mentor/mentoré » est lancée en présence et sous le haut patronage de Christine Lagarde, Ministre de l’industrie, de l’économie et de l’emploi.

Depuis cette inauguration, une deuxième promotion de 10 binômes « mentors-mentorés » a été lancée, le 18 novembre, toujours sous le haut patronage de Christine Lagarde et la troisième promotion est en cours de recrutement !

La solution pour améliorer la survie des entreprises : Le mentorat

Interview de Nicole Laverrière, Directrice du service de mentorat d’affaires de la Fondation de l’entrepreneurship (Canada)

Qu’est-ce que la Fondation de l’entrepreneurship ?

Reconnu comme le plus grand réseau de mentorat d’affaires au Canada, le Service de mentorat d’affaires de la Fondation de l’entrepreneurship compte plus de 70 cellules locales réparties dans les 17 régions du Québec ainsi que 1 300 mentors, qui ont permis de réaliser près de 3 000 jumelages d’entrepreneurs, c’est une croissance exponentielle ! Depuis sa création en 2000, le programme de mentorat d’affaires de la Fondation de l’entrepreneurship s’est adapté aux besoins des diverses clientèles auxquelles il s’adresse.

Afin d’évaluer le programme et son impact, l’organisme a mandaté une firme externe pour recueillir les commentaires d’environ 150 entrepreneurs mentorés. Réalisée en novembre et décembre 2005, l’étude confirme que 83% des répondants se disent satisfaits du programme et qu’ils n’hésiteraient pas à inviter des amis entrepreneurs à y adhérer.

Quel est le but du mentorat d’affaires ?

Le mentorat d’affaires représente actuellement l’une des mesures les plus efficaces pour assurer le suivi et l’accompagnement des entrepreneurs et dirigeants de toutes les sphères de l’économie. Par le biais du mentorat d’affaires, l’entrepreneur ou le dirigeant est assuré de se doter plus rapidement de compétences de bon gestionnaire et du même coup d’assurer la survie, voire la croissance de son entreprise.

Le mentorat vient briser l’isolement que connaît tout nouvel entrepreneur ou dirigeant, enrayant ainsi le découragement de la prise de décisions hâtives et sous-évaluées tout en lui permettant de développer son plein potentiel et sa détermination à réussir.

Un facteur significatif dans le taux de survie et de réussite des entreprises

Rappelons que le but premier du programme de mentorat d’affaires de la Fondation de l’entrepreneurship est de permettre aux entrepreneurs d’acquérir de solides compétences en matière de gestion en plus d’entraîner des retombées positives dans les organisations qui en bénéficient.

Ainsi, dans 66% des cas, on note une hausse du chiffre d’affaires pour les entreprises mentorées. Aussi, 78% des entreprises mentorées par le Service de mentorat sont encore en opération et 70% de celles-ci ont franchi le cap des cinq années d’existence, doublant ainsi les résultats obtenus au Québec lorsque les entrepreneurs sont laissés à eux-mêmes (Enquête sur le taux de survie des entreprises, Gouvernement du Québec, mars 1999).

Soutenir l’humain derrière l’entrepreneur

Dans le cadre des quatre groupes de discussion ayant suivi le sondage, les mentorés participants ont souligné l’impact du mentorat en matière de planification, prise de décision, de motivation et de confiance en soi. La personnalité, le charisme et l’expérience terrain sont des critères incitatifs à choisir un mentor plutôt qu’un autre lors d’un jumelage. On juge qu’il doit être plus apte à transférer ses connaissances que ses compétences.

Lors de ces rencontres, les mentorés ont aussi pris conscience de leurs responsabilités quant au succès de la relation qu’ils ont avec leur mentor. La définition d’objectifs clairs, la discipline, l’ouverture d’esprit, l’utilisation des outils et des formations offertes par le Service de mentorat d’affaires ainsi que le fait de miser sur une relation à long terme sont autant de facteurs qui leur permettront de profiter au maximum de l’accompagnement d’un mentor.

Enfin, l’enquête a permis d’observer que les relations de mentorat durent en moyenne 18 mois à raison d’une discussion mentor/mentoré par semaine. Les principaux thèmes de ces échanges touchent principalement la gestion et l’organisation d’une entreprise. Le Service de mentorat d’affaires ayant toujours préconisé les bienfaits du long terme dans un tel type de projet, on voit que les participants ont adopté cette manière de faire.

100 000 entrepreneurs : le défi de sensibiliser les jeunes à l’entrepreneuriat

Interview de Philippe Hayat : « Beaucoup de jeunes pensent qu’il faut obligatoirement être riche pour pouvoir créer son entreprise. Ils se donnent ainsi une « bonne raison » pour ne jamais avoir à se lancer »

Quel est le parcours professionnel qui vous a conduit à créer 100 000 entrepreneurs ?

Dès 1993, j’ai créé et repris des entreprises que j’ai ensuite développées et revendues. Trois aventures entrepreneuriales dans trois secteurs très différents : l’industrie, les technologies et les services. Parallèlement à mon parcours d’entrepreneurs, j’ai travaillé en tant que professeur en création d’entreprise à l’ESSEC puis à Sciences Po. J’ai toujours été attaché à la notion de transmission de l’expérience professionnelle et cette aspiration s’est concrétisée avec la fondation de l’association à but non lucratif 100 000 Entrepreneurs, dont la vocation est de transmettre l’esprit d’entreprendre aux jeunes de 13 à 25 ans.

Pourquoi cette envie de transmettre ?

Je crois que la transmission de l’expérience fait partie des rôles de l’entrepreneur. L’entrepreneur travaille pour lui-même, pour son entreprise, pour ses salariés et gagne de l’argent. Mais il y a un moment où cela ne suffit plus et où l’entrepreneur doit avoir un rôle citoyen.

Tous les entrepreneurs ont-ils la même vision que vous ?

Les entrepreneurs, qui sont au cœur de leur activité, n’ont en général pas le temps de se consacrer à autre chose qu’à leur entreprise. Mais nous avons tout de même 1500 entrepreneurs, tous en activité, inscrits dans notre base. Ils prennent le temps d’aller parler une demi-journée devant des collégiens ou des lycéens. Je peux vous dire que l’envie de transmettre reste un état d’esprit assez répandu. Il n’y a qu’à voir le nombre d’entrepreneurs qui viennent vers nous chaque année.

Parlez nous de votre association, pourquoi l’avoir nommé « 100 000 Entrepreneurs » ?

Tout simplement parce que notre objectif est de faire 100 000 interventions par an dans des classes de 30 élèves et donc de toucher 3 millions de jeunes chaque année. Pourquoi cela ? Parce qu’il y a 6 millions de jeunes scolarisés entre 13 et 25 ans de la 3e à bac + 5. Si on en touche 3 millions, cela représente la moitié. Je crois que ce n’est qu’en agissant à cette échelle qu’on pourra faire enfin évoluer les mentalités au sujet de l’entrepreneuriat. L’objectif de 100 000 entrepreneurs se place sur le long terme.

Pourquoi avez-vous choisi de vous adresser aux élèves à partir de la 3e ?

C’est en classe de 3e que commencent à se dessiner les premières réflexions sur l’orientation professionnelle. Une option de découverte professionnelle a été mise en place par l’éducation nationale pour ces élèves et il est demandé aux élèves de réaliser un stage de 5 jours en entreprise. La classe de 3e est le meilleur moment pour commencer à stimuler l’intérêt des jeunes à la culture d’entreprendre.

Comment les entrepreneurs sont-ils formés pour intervenir auprès des jeunes ?

Il y a un guide explicatif adapté à chaque niveau (collège, lycée et enseignement supérieur) ainsi qu’une séance de formation destinée à sensibiliser les intervenants sur le message à transmettre aux élèves et la manière de s’adresser à eux, ce qui n’est pas facile.

Quand vous dites à un élève « je fais du logiciel et je suis leader sur mon marché », ils ne comprennent ni logiciel, ni leader, ni marché. Nous avons donc conçu une vraie méthodologie pour parler aux élèves.

Comment réagissent les élèves aux interventions des entrepreneurs ?

Ils sont très attentifs. Au début, ils se demandent ce qu’on fait là. Ils ne connaissent pas vraiment le monde de l’entreprise et encore moins la notion d’entrepreneuriat mais, si on arrive à s’adresser à eux avec leurs mots, qu’on les fait entrer dans notre univers, ils s’intéressent rapidement. On demande à l’entrepreneur d’orienter son intervention vers les questions (De quoi ai-je besoin pour concevoir mes produits ? Où ai-je été chercher l’argent ? Comment ai-je fait pour évaluer le montant de l’argent nécessaire ?…). L’entrepreneur raconte son histoire en interactivité avec les jeunes.

Avez-vous des retours de vos interventions ?

Oui, et ce sont justement ces retours qui nous ont conduits à mettre en place au sein de l’association deux types d’actions supplémentaires. Nous proposons désormais un programme de parrainage entre l’entrepreneur et une classe : pendant l’année scolaire, l’entrepreneur intervient à plusieurs reprises auprès des élèves, les invite à visiter son entreprise et aide les enseignants à leur trouver des stages. Nous avons aussi développé des actions de tutorat pour les élèves de bac à bac +5. Ce programme s’adresse aux élèves porteurs d’un projet entrepreneurial. Un entrepreneur suit l’élève tout au long de l’année et le conseille sur son projet.

Comment financez-vous cette association ?

Au début nous avons été financés par des sponsors (principalement SAP, PPR, SFR) et par la subvention public du Codice, un comité créé par le ministère de l’économie pour permettre la diffusion de l’économie après des jeunes. Nous nous sommes également rendus éligibles afin de pouvoir bénéficier de la taxe d’apprentissage : on peut demander aux entrepreneurs de nous verser une partie de leur taxe d’apprentissage, ce qui nous permet de nous financer d’une façon plus régulière.

Lors de vos cours à Sciences Po, vous répétez à vos élèves : « Ne dites plus : je n’ai pas d’argent donc je ne peux pas entreprendre ». Expliquez nous.

Beaucoup de jeunes pensent qu’il faut obligatoirement être riche pour pouvoir créer son entreprise. Ils se donnent ainsi une « bonne raison » pour ne jamais avoir à se lancer dans l’aventure de l’entrepreneuriat !

J’essaie de bien faire comprendre à mes élèves que trouver de l’argent n’est pas un problème si le projet s’avère bon. Il est tout à fait possible de lever des fonds auprès d’actionnaires ou de banquiers. Mes élèves me répondent alors en général que si ce n’est pas d’eux mêmes que viennent les fonds de leur entreprise, ils risquent d’en perdre tout contrôle. Mais il faut savoir qu’on peut très bien aller trouver des fonds à l’extérieur de l’entreprise et en garder entièrement le contrôle opérationnel. Ne pas avoir d’argent ne doit pas être un frein pour ceux qui veulent d’entreprendre.

Pensez-vous qu’il est difficile en France de créer son entreprise ?

Non, je ne crois pas. C’est une idée reçue qu’il faut dépasser.

La masse de documents administratifs ne représente-t-elle pas un obstacle ?

La situation évolue en France et les démarches administratives pour une création d’entreprise se simplifient. Aujourd’hui on peut se rendre aux CFE – Chambre de Commerce pour une entreprise et Chambre des Métiers pour une profession libérale ou artisanale et s’immatriculer en quelques jours seulement. Il ne faut alors que 10 jours pour recevoir son Kbis. Et si vraiment cet aspect administratif vous rebute, il existe des offices de formalités qui peuvent tout régler cela pour vous à moins de 1 000 euros. Un nouveau statut pour l’auto-entrepreneur vient même d’être voté : si vous débutez votre activité avec un chiffre d’affaire faible, une simple déclaration au CFE reste désormais nécessaire, vous n’avez même pas besoin de vous immatriculer (Ndlr : Loi de modernisation de l’économie du 22 juillet 2008). Démarrer son activité en France est devenue, malgré ce que l’on en dit, assez facile.

Pensez-vous que l’information soit suffisamment claire ?

Il y a beaucoup de sources d’informations disponibles : des sites de références comme ceux de l’APCE ou du Ministère des PME et, bien sur les différentes Chambres de Commerce. Je pense franchement que l’entrepreneur qui s’arrête à la difficulté de s’immatriculer n’est pas fait pour être entrepreneur ! L’immatriculation représente peut être la moindre des difficultés qu’il rencontrera.

5 mots pour définir un bon entrepreneur ?

Je dirais : volontaire, imaginatif, persévérant, vendeur et chef d’équipe. Toutes ces qualités doivent être également soutenues par une bonne dose de bon sens.

Quels conseils donneriez-vous à un jeune entrepreneur ?

Mon premier conseil est de ne pas se donner de mauvaises raisons pour ne pas se lancer. Je m’explique : on peut entreprendre à n’importe quel âge et dans n’importe quelle condition. Il n’est pas forcément utile d’attendre d’avoir une expérience, un réseau, de l’argent…

Il existe selon moi deux préalables à l’acte d’entreprendre :

  • •Savoir si on a une âme d’entrepreneur et si on a réellement envie de le devenir. Beaucoup de gens se lancent dans un projet de création alors qu’ils ne possèdent pas un esprit d’entrepreneur et beaucoup d’autres n’osent pas se lancer car ils ignorent qu’ils sont par nature de vrais entrepreneurs. Il faut bien se connaître et savoir ce qu’on désire vraiment faire dans la vie avant de créer son entreprise. être entrepreneur n’est pas qu’un choix professionnel, c’est avant tout un choix de vie. Il faut déjà se poser la question de base : Est-ce que j’ai envie de travailler pour moi ou pour les autres ? Il faut être en cohérence avec soi-même.
  • •S’assurer que son idée d’entreprise est bonne. Il faut avoir conscience que les bonnes idées restent rares : environ 99 % des idées peuvent être considérées comme mauvaises. Il faut vraiment prendre le temps d’étudier son projet avant de se lancer, c’est-à-dire qu’il faut confronter son idée au marché, aller interroger des clients, des fournisseurs, des concurrents, réaliser une vraie étude de marché… tout cela pour se rendre compte sur le terrain de la pertinence ou non de l’idée.

Quels sont les pièges à éviter par le futur entrepreneur ?

Je dirais d’abord qu’il ne doit pas avoir peur de parler de son idée et d’interroger beaucoup de monde à ce sujet. Il faut confronter son idée au marché car cela demeure la seule façon de savoir si elle est bonne ou non. Le piège réside dans le fait de rester seul dans son coin avec son idée.

Ensuite, il doit bien faire attention à qui il donne le capital. Le capital de l’entreprise représente la seule décision irréversible pour un entrepreneur : il est crucial d’être très précautionneux avant de donner des parts de capital à quelqu’un. Si on a besoin de lever de l’argent, il faut bien étudier toutes les solutions possibles afin de trouver celles qui ne sont pas trop gourmandes en termes de capital.

Enfin je voudrais ajouter que la clé se trouve dans le fait de bien savoir s’entourer. Lorsque l’on est entrepreneur, il faut accorder l’essentiel de son emploi du temps à vendre, dégager/générer des commandes et animer son équipe. Le reste doit être délégué ou sous traité pour avoir le temps de se concentrer sur les tâches majeures. Je pense, par exemple, qu’il est judicieux de faire le choix d’embaucher une secrétaire car, même si cela coûte un peu d’argent, le temps économisé sera utilisé à promouvoir et vendre son produit, et donc à faire plus de profits.

Quels sont vos futurs projets ?

Je crée actuellement SERANA capital, un fond d’investissement à but lucratif pour aider les entrepreneurs désirant développer des entreprises en leur donnant les moyens financiers nécessaires.

Les méthodes pour fidéliser les jeunes

Interview de Corinne DESCOURS, Directrice de la communication ressources humaines chez AREVA.

Pourquoi recruter et former des jeunes ?

Il faut recruter des jeunes pour répondre au besoin du business mais, en réalité, il faut surtout s’assurer du transfert de compétences des plus expérimentés vers les plus jeunes et de la professionnalisation de chaque individu.

Comment fidéliser les jeunes, selon vous ?

Il est nécessaire de donner du sens au travail qu’on leur confie. Concrètement, cela consiste à leur faire comprendre la dimension de l’entreprise et, par exemple, en ce qui concerne notre entreprise : « les grands enjeux énergétiques ». Quand je dis donner du sens, c’est montrer aux jeunes qu’ils vont participer à une grande aventure. Pour les entreprises comme AREVA, ils se montrent très sensibles au contexte de croissance de l’entreprise. Enfin, la dimension internationale du groupe les attire énormément, et ce même s’il n’y a pas un nombre d’expatriés aussi important qu’on puisse le croire. Dans notre cas, nous travaillons souvent avec des équipes internationales en mode projet mais la mobilité des français reste réduite.

Quelles sont les méthodes concrètes pour les fidéliser ?

Ce qu’il faut bien comprendre c’est que, si les jeunes décident d’entrer dans l’entreprise qu’ils ont choisie, ils ne la quittent qu’à cause du management. C’est la fameuse maxime « on intègre l’entreprise pour l’entreprise et on la quitte pour le manager ». S’il existe donc une méthode de fidélisation des jeunes à l’entreprise, elle passe par l’implication des managers. Il y a aussi d’autres techniques qui vont lui permettre de mieux s’intégrer comme le parrainage par exemple.

Il faut aussi leur montrer leur importance pour nous. C’est pourquoi au sein d’Areva nous avons fait le choix de les réunir au cours de la première année avec la présidente, les chefs des filiales et le top management. Nous avons également mis en place ce que nous appelons des rapports d’étonnement.

Il demeure également primordial qu’ils puissent se rencontrer. En France, 1000 des 4000 nouveaux embauchés se sont réunis pendant 2 jours lors de séminaires d’intégration où ils ont participé à des séances de Team Building de 250 personnes.

Ensuite, il faut pouvoir les faire évoluer avant la troisième année. La présence d’une politique salariale permet cette fidélisation : pour les jeunes de moins de 30 ans, nous révisons deux fois les salaires au lieu d’une fois car nous savons par expérience que la fidélité des jeunes n’est plus la même qu’auparavant.

Enfin, le point essentiel tient dans le principe de toujours « dire ce qu’on fait et faire ce que l’on dit » tout en restant le plus proche possible de la réalité. Par exemple, si l’on affirme que le développement durable représente une nécessité, il faut traduire ce principe en actes concrets. Il faut également donner des informations très précises sur les postes avant qu’ils ne soient pourvus.

Avez-vous des méthodes innovantes pour fidéliser ?

Nous sommes en train de travailler sur la notion de réseaux sociaux au sein de l’entreprise, voire en dehors. Il nous est même arrivé de recruter sur Facebook ! Et nous avons pu constater que des groupes composés de nos salariés se sont déjà créés et que ces communautés se repèrent suivant le pays, la filiale, le métier. Nous pensons aussi mettre en place des systèmes type blog etc. Nous espérons ainsi obtenir un sentiment d’appartenance à l’entreprise et permettre à l’esprit d’équipe de se développer.

Exemple d’un poste

Filiale à 100% d’AREVA NC, SGN, spécialiste en ingénierie du cycle du combustible nucléaire, recherche pour son site de Bagnols-Sur-Cèze un Technicien Etudes en Automatisme et Contrôle Commande (I&C) F/H.

Mission : Au sein des équipes de projet et sous la responsabilité d’un Responsable d’équipe Opérationnel REO, vous serez en charge des missions suivantes :

  • Conception des installations dans le domaine des Automatismes et du Contrôle Commande et de l’instrumentation
  • Élaboration des chaines de sécurité en classement SIL selon CEI 61511 & CEI 61508
  • Réalisation des Analyses Fonctionnelles
  • Élaboration des spécifications des équipements de contrôle commande (SNCC, API)
  • Dimensionnement des équipements de Contrôle commande et estimation des investissements
  • Rédaction des cahiers des charges, consultations et analyses des offres fournisseurs
  • Vérification des documents fournisseurs
  • Analyse et vérifications des interfaces techniques avec les autres corps d’états

Comment rédiger les statuts de votre entreprise ?

Les statuts vont déterminer les rapports que vous entretiendrez avec vos futurs associés. Voici les points auxquels vous devez être particulièrement attentif.

La définition des statuts

Les statuts permettent d’arrêter les règles de fonctionnement d’une société. Ils peuvent être notamment établis par un avocat ou juriste d’entreprise. En cas de difficultés, les Centres de Formalités des Entreprises (Décret du 18 mars 1981 et Loi du 11 février 1994) accompagnent le créateur dans l’immatriculation de son entreprise. Celui-ci fournit alors à un guichet unique les pièces demandées au préalable, ainsi que le statut désiré. Le créateur reçoit ensuite sous huit jours l’extrait K bis.

Le contenu des statuts

Une attention particulière s’impose lors de la définition et la rédaction de l’objet de l’entreprise. Il convient de ne pas être trop précis, car par la suite, et selon l’évolution de l’entreprise, de nouvelles idées peuvent venir à se développer. La tendance est aujourd’hui à la rédaction de statuts simplifiés, notamment pour éviter d’avoir à les modifier trop souvent en cas de changement législatif ou réglementaire.

Les mentions obligatoires

Un contenu plancher insusceptible d’être réduit est cependant prévu par le législateur. Deux textes sont notamment à prendre en compte :

  • l’article L 210-2 du Code de Commerce : la forme, la durée (99 ans maximum), la raison, la dénomination sociale, le siège social, l’objet social, le montant du capital social ;
  • l’article 1835 du Code Civil : les apports de chaque associé et les modalités de fonctionnement, doivent être déterminés par les statuts de la société.

Les mentions facultatives

La clause d’agrément ou du type procédure d’éviction

Dans l’hypothèse où la structure comprend des associés, il peut être utile d’inclure dans les statuts l’une des clauses ci-dessus En effet, alors que la première permet d’envisager l’évincement d’un associé qui a refusé plus de deux fois la validation des comptes, la seconde empêche quant à elle, la vente de parts à un tiers.

Définition du statut du dirigeant

Il est cependant important de bien définir le statut du dirigeant car celui-ci peut avoir des répercussions sur ses biens propres.

La modification des statuts

Une modification ultérieure des statuts fera l’objet d’une décision extraordinaire. L’article 1836 du Code Civil dispose que les « statuts ne peuvent être modifiés, à défaut de clause contraire, que par l’accord unanime des associés » ; mais le code de commerce a prévu, pour les sociétés commerciales, des conditions de majorités distinctes selon la société en cause.

En effet, l’acte de société résultant de la volonté collective des associés, seule cette dernière peut le modifier. Elle s’exprimera alors en assemblée générale en pratique qualifiée d’extraordinaire. Formalisme lourd inhérent aux modifications statutaires voire coûteux dans le cas des sociétés par actions qui peuvent regrouper des milliers d’actionnaires.

Les documents complémentaires : les documents extra-statutaires

Des documents peuvent venir compléter les statuts, tels que : le règlement intérieur, les conventions extra-statutaires, les pactes d’actionnaires :

Après la signature des statuts des formalités sont à prévoir :

  • l’enregistrement des statuts dans le délai d’un mois à la recette des impôts ;
  • l’enregistrement de l’entreprise au registre du commerce et des sociétés ;
  • l’insertion d’un avis dans un journal d’annonces légales ;
  • le dépôt des actes constitutifs en annexe au RCS (formalité du dépôt en double exemplaire au greffe du TCom ou TGI statuant en matière commerciale du lieu du siège social)
  • la publication d’un avis au BODACC.

Par Lydia Da Costa

Thomas Chaudron, past-président du CJD, association de plus de 3300 entrepreneurs.

Interview de Thomas Chaudron qui nous partage sa vision d’un spécialiste de l’entrepreneuriat

Quelles sont les caractéristiques communes des entrepreneurs que vous rencontrez ?

Le point commun entre tous ces entrepreneurs ? C’est qu’ils ont pris et qu’ils prennent tous les jours des risques. Entreprendre est un acte audacieux, il faut avoir une certaine dose de folie pour se lancer dans l’inconnu. D’ailleurs l’idée de liberté est très ancrée dans l’esprit de ces aventuriers. Mais attention, il ne s’agit pas de la liberté telle que celle des « sauvages » dont parlait Rousseau, car certaines contraintes (comme les attentes des clients par exemple) sont omniprésentes.

Etre entrepreneur ce n’est pas faire ce que l’on veut quand on veut !

On remarque également que le gain important et immédiat est rarement une motivation première. En effet, pour percevoir vraiment de grosses sommes d’argent, il faut déjà avoir constitué une entreprise de taille conséquente. En fait, si l’on veut gagner beaucoup d’argent, il vaut mieux en général privilégier un parcours dans les grands groupes.

Enfin, une dernière caractéristique que partagent les entrepreneurs que je rencontre, consiste dans l’envie de progrès, d’une remise en cause personnelle et professionnelle constante. Il existe beaucoup de formations, mais peu offrent un réel apprentissage des savoirs nécessaires pour entreprendre. Or, au CJD, nous considérons qu’être entrepreneur, c’est un métier à part entière et qu’au-delà de savoirs techniques (comptabilité, gestion, management…) et de savoirs personnels (qualités humaines), d’autres types de compétences restent à acquérir pour être un vrai professionnel.

Je suis conscient, cependant, que les entrepreneurs du CJD ne représentent pas tous les types d’entrepreneurs. En effet, les adhérents partagent des valeurs communes dont celle de mettre l’économie au service des hommes. C’est pourquoi le CJD n’a pas vocation à rassembler tous les jeunes dirigeants mais à rassembler des dirigeants, jeunes, qui possèdent d’abord une approche humaniste de l’entrepreneuriat.

Quelles sont les qualités que doivent avoir les entrepreneurs ?

L’expression, qui représente bien pour moi l’entrepreneur idéal, s’exprime par la maxime : « la tête dans les étoiles et les pieds dans la glaise ». Autrement dit, il faut voir loin et agir localement. On peut citer également les qualités personnelles nécessaires comme l’humilité, car rien n’est jamais acquis ni gagné, ou encore la ténacité, mais aussi, et c’est peut être le plus important, le respect car c’est en respectant que vous serez respecté. Et sans respect, il ne peut y avoir de confiance, élément fondamental pour toute entreprise humaine. Respecter les collaborateurs, les clients, les fournisseurs ou l’environnement, sont forcément une des qualités de bases pour un entrepreneur. Sinon, il n’aura aucune chance de réussir dans la durée !

Quels ont été vos premiers défis ? Comment les avez-vous dépassés ?

Le premier défi que j’ai rencontré, à l’âge de 23 ans, était celui de me faire accepter comme patron car la propriété du capital n’amène pas pour autant l’autorité. Il a donc fallu que je m’impose comme dirigeant et pas uniquement comme actionnaire majoritaire de l’entreprise que je venais de créer. En réalité, ce défi je l’ai franchi non pas en agissant sur les autres mais en progressant moi-même, en me professionnalisant dans mon métier et en apprenant de mes erreurs.

Le deuxième défi fut la difficulté à prendre de la hauteur. De manière imagée, on peut vouloir pédaler de plus en plus vite mais tout ce que l’on va faire, si on va dans le mur, c’est juste se faire encore plus mal au moment de l’impact. Il faut donc rapidement réussir à prendre du recul afin d’acquérir une vision à moyen terme pour son entreprise et se faire une idée objective des raisons du succès et des échecs. Le troisième défi, ce fut bien sûr de trouver et fidéliser les clients !

Que doit faire l’entrepreneur en priorité ?

Une entreprise représente un système complexe, qui doit être appréhendée comme un tout.

La grande difficulté pour l’entrepreneur réside dans le fait qu’il ne peut pas juste segmenter ses activités pour avoir une vision claire et précise de ce « tout ». En effet, les interactions générées par ses différentes actions ne sont pas mesurables, et pourtant c’est en cela que réside la richesse de ce métier : impossible de se dire « lundi je m’occupe des collaborateurs, mardi des clients, mercredi des actionnaires etc.. ». Les décisions du lundi auront un impact les jours suivants et réciproquement. C’est pourquoi, la première tâche consiste à bien définir une vision et une stratégie à moyen terme, pour avoir un cap et s’y fixer dans les décisions de tous les jours. C’est, à mon avis, la seule possibilité pour donner un sens et une cohérence aux priorités définies.

« N’importe qui peut devenir entrepreneur » : que pensez-vous de cette affirmation ?

Tout dépend de ce que l’on entend par le mot « entrepreneur ». Si on parle simplement de constituer une structure juridique, d’en apporter le capital social initial et de prendre la tête de cette structure, tout le monde peut le faire. Mais si, par le mot entrepreneur, on désigne quelqu’un qui veut aller de l’avant, qui prend un risque et qui l’assume, je pense que la part de la population concernée devient plus faible. D’ailleurs, je ne lie pas la propriété du capital à cette qualité : on peut tout à fait être entrepreneur dans sa vie ou dans son entreprise.

Que suggérez-vous pour faciliter la tâche des dirigeants d’entreprise ?

On peut toujours considérer que l’herbe sera toujours plus verte ailleurs, mais je pense qu’il faut aussi savoir s’accommoder des contraintes et composer avec elles.

Bien sur, des progrès pourraient être faits avec moins de nouvelles lois et une meilleure application de celles déjà en vigueur. L’enjeu réside aujourd’hui dans l’évolution vers une plus grande équité des entreprises face à la loi. Et pour que la notion d’équité devienne une réalité, il faudrait admettre que toutes les entreprises ne sont pas équivalentes.

Peut-on en effet traiter de la même manière le cas d’une entreprise cotée au CAC 40 et celui d’une PME ?

Toutes les sociétés ne peuvent pas être régies par les mêmes règles de droit car leurs enjeux restent différents. Pour autant, je me méfie des décisions hâtives qui consistent à supprimer toutes les obligations et contraintes sous prétexte que les PME n’ont pas systématiquement les moyens de s’y adapter. N’oublions pas que l’enjeu majeur des années qui viennent se trouve dans la pénurie de main d’œuvre. Il faut donc arriver à une voie médiane grâce à laquelle on permettra aux PME de vivre et de se développer plus facilement sans leur enlever les moyens d’attirer les nouveaux collaborateurs dont elles auront besoin. Certaines idées séduisantes, de prime abord, se sont surtout soldées au final par un écart encore plus grand entre les PME et les grands groupes en termes d’attractivité. C’est un écueil à absolument éviter.

Quelles seraient les mesures nécessaires pour favoriser le développement des entreprises françaises à l’étranger ?

Il faudrait encourager les grands groupes à accompagner les PME à l’export. Certes, on ressent une véritable frilosité chez nombre de dirigeants de PME au sujet de l’international. Mais pour beaucoup, leur marché est devenu mondial, et nous avons la chance d’avoir de grands groupes présents partout dans le monde.

Cela sous-entend également que les dirigeants développent leur capacité à travailler en réseau. La conquête à l’étranger reste toujours plus facile lorsqu’on s’y engage à plusieurs : cela permet par exemple de mutualiser les frais de traduction ou d’implantation, etc…

Enfin, sur un mode différent, il faudra aussi revoir le financement de notre protection sociale, qui pèse très fortement sur le travail. Aujourd’hui, à prix d’achat égal de matières premières, l’impact de la masse salariale sur le prix de vente rend les entreprises françaises beaucoup moins compétitives que leurs principales concurrentes européennes.

Véhicule de société : quel est le prix pour motiver les troupes ?

Le véhicule de société est un incontournable des stratégies de rémunération globale. Pas forcément parce qu’il se révèle attractif, au terme des calculs comparatifs, mais en raison de sa haute charge symbolique. Il s’agit, pour le praticien du conseil en rémunération, d’un périphérique au salaire particulièrement difficile à valoriser. Le calcul d’équivalence, permettant de comparer l’attribution d’un véhicule de fonction avec une augmentation de salaire suppose un chaînage complexe.

C’est pourquoi le véhicule de société peut très facilement devenir un avantage acquis et démonétisé. Dans ce cas, c’est au pire moment qu’il retrouve une valeur, parfois fantasmée : quand l’entreprise décide sa suppression. Pour disposer d’une évaluation objective de l’avantage voiture, nous allons distinguer deux cas : le cadre, pour lequel l’entreprise voudra déterminer un équivalent salaire, et le dirigeant possédant, qui cherchera à réduire les charges pesant sur sa société.

Le coût d’un véhicule pour l’entreprise

En premier lieu, comme le particulier, l’entreprise assume ce que nous appelons les coûts directs : l’achat ou la location, la carte grise et les coûts d’exploitation (assurance, carburant et entretien). Pour illustrer ce premier poste de charges, nous allons considérer trois véhicules, d’entrée, milieu et haut de gamme. Aux coûts directs, il convient ensuite d’ajouter les coûts indirects, réservés aux véhicules de société. Ils proviennent de quatre sources : la taxe sur les véhicules de société, l’impôt société sur les coûts non déductibles, la taxe professionnelle et les charges sociales patronales dues sur le montant de l’avantage en nature.Ces calculs, comme vous pouvez le constater, démontrent l’augmentation très significative des coûts indirects, notamment après la loi de finances 2006. Un véhicule haut de gamme déclenche des coûts indirects d’environ 80 % des coûts directs !

Modes de calculs des coûts indirects

La taxe sur les véhicules de société

Pour les véhicules ayant fait l’objet d’une réception communautaire, dont la première mise en circulation intervient à compter du 1er juin 2004, et qui n’étaient pas possédés ou utilisés par l’entreprise avant le 1er janvier 2006, le tarif de la taxe sur les véhicules de société est désormais basé sur un barème écologique. Il est calculé en fonction du taux d’émission de dioxyde de carbone, en gramme par kilomètre.

L’impôt société

Il procède de deux types de charges non déductibles. La taxe sur les véhicules de société et une quote-part de l’amortissement ou du loyer. Dans son intégralité, la taxe sur les véhicules est non déductible. Ainsi, une taxe de 4.500 euros provoque en fait un coût annuel de 6.000 euros pour l’entreprise (4.500 + 1/3 d’impôt société). Concernant la déduction de l’amortissement du véhicule, nous devons distinguer le véhicule dont le taux d’émission de dioxyde de carbone excède 200 grammes par kilomètre. La fraction déductible du prix d’acquisition est alors ramenée à 9.900 euros. Sinon, l’amortissement reste déductible pour la fraction du prix d’acquisition n’excédant pas 18.300 euros.

La taxe professionnelle

La taxe professionnelle est calculée sur la valeur locative du véhicule. Notons qu’elle est basée sur la valeur à neuf, toutes taxes comprises. Un véhicule vieux de trois ans, ayant parcouru 100.000 kilomètres subit la taxe professionnelle sur sa valeur du premier jour d’exploitation.

Les charges sociales patronales

L’utilisation privative du véhicule de société doit occasionner un avantage en nature. Son évaluation pourra être opérée au réel ou au forfait. L’évaluation au réel comprend, au prorata du kilométrage privé, l’amortissement du prix d’achat public TTC sur 5 ans (ou le coût de location), l’assurance, les frais d’entretien, voire le carburant. Sur le montant de l’avantage en nature ainsi calculé, l’entreprise devra acquitter les charges sociales. L’évaluation au réel confronte à la difficulté de la preuve : comment justifier du kilométrage privé ? L’entreprise peut sécuriser son dispositif en utilisant l’évaluation au forfait. Lorsque le véhicule a moins de 5 ans et que l’employeur prend en charge le carburant, le forfait est égal à 12 % du prix d’achat TTC, ou 40 % du coût global annuel de la location, de l’assurance et de l’entretien.

Calcul de l’équivalent salaire

L’attribution d’un véhicule de fonction se traduit d’abord par une perte de revenu immédiat pour le salarié. L’avantage en nature lui coûte deux prélèvements supplémentaires : les charges sociales salariales et l’impôt sur le revenu. Mais le salarié bénéficie de deux gains. D’abord, les charges sociales déclenchées par l’avantage en nature lui permettent d’acheter des droits retraite supplémentaires. Ensuite, l’utilisation privative du véhicule de société lui évite de devoir financer un véhicule personnel.

Le gain global offert au salarié est donc égal à la somme de ces deux gains, diminuée de la perte de revenu immédiat. L’équivalent salaire du véhicule de fonction devient le salaire brut permettant de générer le même gain global. Quand le gain global s’élève à 10.345, son équivalent salaire est égal à 14.382 euros. Un salaire brut de 14.382 euros distribue en effet au salarié un gain global équivalent à celui de l’avantage voiture. En considérant un taux de charges sociales de 22 %, dont la CSG et la CRDS, et un taux d’impôt sur le revenu de 30 %, nous aboutissons aux résultats suivants, en reprenant nos trois types de véhicule et en faisant varier le nombre des kilomètres privés.

Comparaison entre véhicule de fonction et véhicule privé + indemnités kilométriques

Cette problématique vise particulièrement le dirigeant possédant qui va comparer les stratégies de rémunération possibles en fonction de leur dépense globale pour la société. Nous traitons ici l’exemple du véhicule haut de gamme. Ses conditions d’utilisation sont les suivantes : 30.000 kilomètres par an, dont 5.000 relèvent de la vie privée. Nous considérons que le véhicule est financé à crédit, au taux de 5 % sur 48 mois.

Nous considérons dans notre comparaison que l’entreprise est éligible à l’exonération de taxe sur les véhicules de société sur le remboursement des indemnités kilométriques, dans la limite de 15.000 euros. Le salaire brut annuel du dirigeant s’élève à 100.000 euros. L’option véhicule de fonction est comparée à celle d’un véhicule personnel, donnant lieu au paiement d’indemnités kilométriques relatives au kilométrage professionnel parcouru.

Dans notre exemple, l’option véhicule de société coûte 10.000 euros par an à l’entreprise. Sur les quatre années d’exploitation du véhicule, ce sont 40.000 euros qui sont perdus. De ce cas particulier, nous pouvons tirer une conclusion paradoxale : moins l’exercice des fonctions exige d’accomplir des kilomètres professionnels, plus on a intérêt à opter pour un véhicule de fonction. Il s’agit de la conséquence du poids quasi confiscatoire des coûts indirects.

Le véhicule de fonction affiche cependant deux atouts qui dépassent sa stricte équation calculatoire. Il est doté d’une incontestable force managériale, efficace pour recruter et fidéliser. Ceci, même quand le montant de l’équivalent salaire reste un peu flou. Il offre enfin un vrai confort de gestion. Pas de décompte laborieux des indemnités kilométriques à opérer, pas de trésorerie personnelle à engager.

Reste, pour chaque cas particulier, à vérifier que le prix de ce confort ne se révèle pas fiscalement et socialement exorbitant.