Une serial entrepreneure bien à la page !

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Interview de Catherine Barba qui se lance dans un nouveau défi avec Envi. Après de nombreux succès entrepreneuriaux tels que Cashstore vendu à Plebicom ou Malinea vendu à Veepee, créatrice d’événements promulguant l’égalité hommes/femmes et la diversité (La JFD à paris, le WIN Forum aux USA) et une expérience de 5 ans à New York, la pionnière du digital poursuit son aventure avec passion en restant toujours connectée aux nouvelles tendances.

Que s’est-il passé depuis notre dernière interview ?

Je suis passée de la révolution numérique à la révolution du travail. Après avoir travaillé pendant 20 ans dans le digital, le e-commerce, la transformation du retail et créé trois entreprises dans ces secteurs, je suis partie aux États-Unis. C’était mon rêve d’enfant et j’ai embarqué toute ma famille dans l’aventure ! J’avais envie d’aller voir comment se passait la transformation du travail et du digital aux États-Unis. Je me demandais s’il y avait des bonnes pratiques et des idées innovantes à aller chercher du côté des retailers outre-Atlantique.

Je me suis rendu compte que ce n’était pas aussi innovant que je le pensais. J’y ai tout de même fait un saut quantique sur mes compétences en matière d’omnicanal et de transformation digitale (sur les sujets diversité et inclusion aussi !) et suis revenue en France il y a deux ans. C’est là que la suite de mon histoire d’entrepreneure m’est tombée dessus, comme une évidence. Exactement comme je l’avais vécu il y a vingt-cinq ans avec l’arrivée du digital, qui allait transformer toutes les entreprises, grandes et petites. Aujourd’hui, la nouvelle révolution est celle du travail, elle va aussi profondément transformer les entreprises, pas seulement autour des clients mais aussi autour des collaborateurs. C’est la raison pour laquelle j’ai cofondé ENVI l’école du futur du travail et des indépendants.

Qu’est-ce qui s’est profondément transformé ?

Je perçois, comme vous probablement, un sentiment profond d’aspirations nouvelles, de désir de changement. Une sorte de fin de cycle où travailler 20 ans dans la même entreprise comme salarié n’est plus ni la norme, ni le désir des jeunes ou moins jeunes générations. Tout se passe comme si ce qu’il y a eu avant ne durera pas et que ce qui est très long terme n’a pas de sens. Comme je comprends ceux qui s’orientent dans des voies qui les reconnectent à la nature, au vivant, aux métiers manuels ! Le travail n’a plus la même centralité ou en tout cas, le même visage.

Le Covid et les confinements successifs ont aussi conduit de nombreuses personnes à s’interroger sur le sens de leur travail, et ce questionnement s’est traduit par une forte aspiration à plus d’autonomie, d’équilibre, de sens, d’empowerment, ce mot si difficile à traduire en français qui exprime le fait de décider et prendre le contrôle de sa destinée professionnelle.

Beaucoup ont dès lors été tentés de quitter leur entreprise pour se mettre à leur compte – il n’y a jamais eu autant de création d’entreprises qu’en 2021 et 2022 (plus d’un million selon l’INSEE sur chaque année) notamment de business solos !

On dénombre ainsi aujourd’hui près de quatre millions d’indépendants en France. Si l’on ajoute les « slasheurs » qui ont des vies professionnelles plurielles, cumulant emploi salarié et aventure entrepreneuriale, on atteint vraisemblablement près de dix millions de personnes. Ces talents et ces compétences souvent désormais externes, représentent une opportunité fantastique pour les entreprises, c’est maintenant qu’il faut en prendre la mesure pour ne pas prendre de retard.

Est-ce que cette possibilité est liée aux évolutions technologiques ?

Sans aucun doute. Beaucoup de business solos reposent sur des activités de service qui ne nécessitent pas d’apport financier ou matériel important. On vend son savoir-faire de là où on veut, avec son ordinateur et son mobile comme seuls outils de travail, on échange, prospecte, vend par visioconférences.
Quant à la démarche de création d’entreprise, j’ignore si c’est beaucoup plus simple qu’avant. Depuis 2008 des simplifications ont été apportées par Hervé Novelli quand, secrétaire d’État aux PME, il créait le régime de l’auto-entreprise devenu micro-entreprise.
La technologie facilite indéniablement la création et la façon d’opérer au quotidien. Cette simplicité n’est évidemment pas le gage d’une viabilité économique plus facile. La difficulté n’est pas de créer mais de durer !

Pour toi, cela a changé toutes les méthodes de communication, de travail ?

Quand on devient indépendant, tout change ! C’est parfois un sacré choc. On le voit chez nos clients (qu’on appelle talents) qui viennent se former chez ENVI pour se lancer. Quitter un environnement connu, balisé, collectif, sécurisant pour aller vers l’inconnu et l’indépendance est très excitant mais la nécessité d’être un vrai couteau suisse, devoir définir son positionnement, sa proposition de valeur, son modèle économique, se constituer un nouveau réseau, prospecter, se vendre, communiquer seul(e) n’est pas de tout confort !

J’observe aussi que ce qui change radicalement, surtout si on a été manager, est de passer du « faire faire » au « faire » : quand on entreprend on n’a pas le choix, on renoue avec l’action, on fait, on mesure, on recadre, et on le fait soi-même, sans oublier de continuer à apprendre car le savoir est très vite obsolète. Après, si l’envie est forte, si la motivation est là, on s’adapte, on survit et on n’est pas à l’abri de réussir 😉 Surtout si on est bien accompagné par un collectif bienveillant, stimulant et la meilleure méthodologie comme avec ENVI (pardon pour la petite page de pub).

« J’observe aussi que ce qui change radicalement, surtout si on a été manager, est de passer du « faire faire » au « faire » : quand on entreprend on n’a pas le choix, on renoue avec l’action. »

Au niveau des salariés, cela a changé beaucoup les conditions notamment avec le développement du télétravail, etc. ?

Bien sûr. La question des entreprises aujourd’hui est : « Comment créer un engagement solide quand l’entreprise est un corps social hors-les-murs (certains collaborateurs en présentiel, d’autres en distanciel) et hybride avec des freelances et des salariés ? » L’équation est loin d’être simple pour les leaders, les managers, les RH. Pour les équipes non plus !
Toute entreprise a un impératif de rentabilité et une somme d’actions individuelles ne construit pas une réussite collective sans règles, sans rituels. Pour embarquer tous les coéquipiers vers la croissance rentable, il faut un capitaine avec une vision, qui montre le chemin, donne de la cohérence, développe l’autonomie et la confiance. Si l’entreprise libérée est une séduisante utopie, les paquebots avec 50 niveaux de validation sont de vrais repoussoirs.

Tout l’enjeu pour un leader est de réussir cet exercice d’équilibriste entre l’autorité que l’on exerce et l’autonomie que l’on accorde, dans un contexte hybride entre full-remote et office-based. Pardon pour les anglicismes ! Et que l’on soit fondateur, salarié, indépendant, étudiant, je crois qu’il faut se donner pour mission personnelle de créer chaque jour du collectif, être un connecteur, quelqu’un par qui le lien se fait. Le sens se trouve dans le collectif. Et dans ce collectif, la nouvelle donne, ce sont les talents indépendants, digitaux mais pas seulement. Sans talents, point de croissance. Or souvent les meilleurs ne veulent plus de l’ancien sacro-saint CDI.

Comment gérer cette aspiration ?

Des entreprises comme Mazars sont très avancées. Mazars autorise non seulement ses salariés à avoir un « side project » mais encore les y encourage ! Ce travail en mode « multi » répond au besoin de sécurité, de stabilité, autant qu’à l’aspiration à plus d’autonomie, d’équilibre et de sens : je veux appartenir à un collectif qui m’élève, me protège, me forme, autant que je veux être maître de mon travail, établir mes propres règles, récolter le fruit de mes actions. La multi-activité choisie est certainement une réponse à cette ambivalence. Notre identité ne se réduit plus à un seul emploi, à une seule entreprise, une trajectoire linéaire.

Mazars et d’autres entreprises visionnaires mesurent les bénéfices de cette permaculture d’entreprise : comme cette dernière qui fait cohabiter différentes espèces pour rendre la terre durablement fertile, la multi-activité choisie est régénératrice : accomplissement personnel, développement de compétences plus larges, adaptabilité accrue… ce sont autant d’atouts qui bénéficient à l’entreprise.

Au niveau de l’apport de sens, y a-t-il une nouvelle donne notamment sur la manière dont les entreprises s’adressent à leurs salariés ?

Oui, et cela a été formalisé dès 2018 dans le rapport de Nicole Notat et Jean-Dominique Senard remis aux ministres de la transition écologique et solidaire, de la justice, de l’économie et des finances, dont les recommandations répondaient à l’impératif de « redonner de la substance à l’entreprise, l’amener à réfléchir à sa raison d’être ».

Au-delà de faire de la croissance et du profit, à quoi contribue l’entreprise, quelles valeurs défend-elle, sur quoi s’engage-t-elle pour la planète, les générations futures ? Quelle est l’utilité sociétale ou environnementale des projets qu’on y porte ? Comment augmenter l’employabilité de mes salariés en leur offrant des formations (chez ENVI :), en leur donnant la possibilité de développer sans cesse leurs compétences et d’exprimer leur engagement ?

Quelle que soit la réponse, les entreprises sont désormais contraintes à une radicale authenticité, à une saine transparence. La jeune génération oblige les entreprises à faire ce qu’elles disent et dire ce qu’elles font, ce qui au fond n’est pas si mal comme projet de vie 😉

Est-ce une problématique nouvelle ?

Ce qui est nouveau pour l’entreprise est d’admettre que le rapport de force s’est inversé. Les collaborateurs ont conscience que leur valeur est toute aussi importante que celle des employeurs. Quand quelqu’un rejoint notre équipe, je raisonne toujours dans une logique de « culture add » et non de « culture fit » : je n’espère pas tant que la personne adhère à 100 % à notre ADN qu’elle vienne l’enrichir, nous bousculer, être un poil à gratter pour notre organisation. J’adore quand quelqu’un arrive à bousculer ma façon de faire, à modifier mon regard sur le travail, sur les clients.

Chez ENVI nous avons un onboarding un peu particulier. Lorsque de nouveaux collaborateurs commencent ils sont d’emblée partie prenante. On leur a par exemple laissé la main à 100 % sur la création de notre compte Instagram, @_envischool. Je n’aurais jamais fait des choses pareilles ! On est dans la co-construction.

Toute entreprise, grande ou petite, gagnerait je crois à être dans cette optique. On s’entoure trop de gens qui nous ressemblent. L’entre-soi est mortifère ! Ce sont les frottements et les divergences qui produisent de l’innovation. Il faut accepter d’être dérangé ou à minima, accepter un regard différent sur une activité que l’on croit maîtriser de fond en comble. Les choses bougent si vite ! C’est évidemment plus facile pour une entreprise comme ENVI qui a moins d’un an d’existence d’être agile et ouvert, on n’a pas d’héritage.

Comment cela se traduit-il ?

Je vois aussi de grandes organisations très visionnaires sur le Future of Work qui osent expérimenter des pratiques de travail inédites pour essayer d’aligner les intérêts de l’entreprise et ceux de leurs collaborateurs et créent une adhésion durable. Cela passe par de nouveaux critères de recrutement, la data, de nouveaux outils à base d’intelligence artificielle. Je crois enfin que les entreprises qui réussiront mieux que les autres sont celles qui développeront à tous les étages l’esprit d’entreprendre. Pour devenir des communautés de « bougeurs », d’innovateurs dans le cadre, qui testent, osent, bousculent. Pour y arriver il faut collaborer plus et mieux avec les indépendants, les freelances, et proposer des formations par des entrepreneurs comme celles d’ENVI.

Qu’est-que propose ENVI aujourd’hui ?

Pour les entreprises, nous développons des formations et des coachings pour injecter l’esprit d’entreprendre dans la culture managériale, en vue d’aider les entreprises à bouger les lignes plus vite et attirer les meilleurs. Et ça marche !

Nous avons aussi créé le Do Tank, un club de grandes entreprises de tous secteurs qui expérimentent avec nous les nouvelles pratiques du Future of Work, notamment les ingrédients d’une collaboration réussie avec les indépendants et les freelances. Les sujets sont abordés sous l’angle du partage et de l’expérimentation, avec une dimension internationale ; c’est ce qui rend le Do Tank unique et performant. On prend beaucoup de plaisir aussi. Il faut nous rejoindre pour défricher et prendre une longueur d’avance sur le travail de demain !

Pour les particuliers, nous avons depuis un an des programmes uniques pour apprendre à réussir comme indépendant, que l’on se lance ou que l’on soit déjà à son compte. Ce sont des parcours en ligne collectifs, sur 4 ou 12 semaines, à l’issue desquels tu sais exactement ce que tu dois faire pour être rentable, avoir une offre percutante et singulière, te constituer un super réseau, trouver régulièrement des clients. Nos atouts sont notre incroyable réseau de mentors, tous entrepreneurs de renom qui partagent leur expérience (allez voir la liste sur notre site envischool.com !) et notre réseau soudé et solidaire. On est solo, mais jamais seul !

Penses-tu que la réalité virtuelle ou augmentée va transformer les entreprises ou que cela n’aura d’impact que dans certains secteurs d’activité ?

Dans le retail, AR et VR étaient il y a quelques années le graal ; à dire vrai, en tant que cliente, je ne suis pas sûre que cela ait changé quoi que ce soit dans ma façon de prendre des décisions d’achat ou de consommer. Il est toujours nécessaire d’explorer pour se faire une expérience avec des KPI et mesurer l’impact. Est-ce que cela rend davantage service à mes clients ? Augmente la fréquence d’achat, le panier moyen ? Et au vu du coût de set up et d’exploitation, qu’est-ce que cela crée comme valeur ? Si une solution rend significativement service à tes clients et qu’elle génère de la croissance, alors oui, il faut y aller. Et pour le savoir il faut tester !

Est-ce que tu penses que la vidéo va prendre le pas sur les autres manières de communiquer ?

Ça fait déjà presque 20 ans que la vidéo est partout et qu’on la consomme sans modération ! Le podcast a ouvert une brèche (passionnante !) Mais ma conviction est qu’il y a de l’avenir pour les littéraires dans le digital. L’écrit a une très grande puissance, la puissance des mots. Pour te faire connaître, donner envie, convaincre, vendre, il faut savoir écrire. Un email, un post Linkedin, un argumentaire de vente, une newsletter… tout texte bien écrit, ramassé, dynamique, ciselé, a un énorme impact. On apprend tout cela chez ENVI. Et si Chat CPT fait indéniablement gagner un temps fou pour produire du volume, pour y adjoindre un ton, un style, une âme, rien ne remplace l’humain !

Est-ce qu’il y a un sujet que tu souhaiterais aborder ?

Oui, l’optimisme ! Aujourd’hui il y a à l’évidence beaucoup de raisons de s’inquiéter de l’avenir. Avec Carine Malausséna et Charlotte de Charentenay mes associées, on aime dire comme Sénèque qu’il fait apprendre à « danser sous la pluie » : ne jamais cesser d’espérer, avoir confiance dans les générations futures pour inventer des solutions, être toujours curieux, volontaire, engagé, au service des autres, ensemble, et continuer à « savourer et goûter intérieurement les choses » comme dit Ignace de Loyola.

« Si une solution rend significativement service à tes clients et qu’elle génère de la croissance, alors oui, il faut y aller. Et pour le savoir il faut tester ! »

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