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Relations économiques et commerciales franco-syriennes

Les relations économiques et commerciales franco-syriennes restent dépendantes de l’évolution du contexte politique régional (situation au Liban) et de l’approche des États-Unis (embargo). Pour autant, les échanges commerciaux bilatéraux demeurent équilibrés et la balance commerciale est excédentaire (92 MEUR en 2006, 51° excédent de la France).

Avec une part de marché de 5,3%, la France est le 6° fournisseur (derrière Chine, Italie, Ukraine, Allemagne, Turquie) et le 3° client de la Syrie.

Les exportations françaises vers la Syrie ont enregistré une forte progression en 2005 (+43,7%) et 2006 (+17%) pour atteindre un montant de 508 MEUR, ce qui place ce pays au niveau des Philippines ou du Pakistan. Les exportations françaises se concentrent à 53% sur les produits pétroliers raffinés, le sucre, le tabac manufacturé. La possibilité récente d’importer des médicaments non produits localement a permis d’augmenter de 52% les ventes françaises dans ce domaine (20 MEUR, soit 4ème rang devant l’automobile (-28%). Les ventes françaises de parfums et produits d’hygiène (5MEUR, +12%), d’habillement (3,3 MEUR, +488%) profitent également de l’ouverture, depuis 2006, de ces secteurs aux importations.

Les importations françaises en provenance de Syrie ont atteint un montant de 416 MEUR en 2006 (-7%). La baisse des exportations syriennes de pétrole (-40%) reflète la chute de la production nationale de l’energie due à la réduction des réserves. Les principaux postes à l’importation demeurent l’habillement (15 MEUR), les produits textiles (3 MEUR) et les produits de parfumerie (1,3 MEUR).

Les secteurs prédominants

La prédominance des hydrocarbures dans les échanges bilatéraux se confirme : 41% des exportations de produits raffinés français vers la Syrie (10e client en 2006, 14e en 2005) et 93% des importations en provenance de Syrie (24e fournisseur en 2006, 20e en 2005).

En termes d’Investissements Directs Etrangers-IDE, les avoirs français occupent un rang très modeste en Syrie. L’évolution 2004-2006 démontre une réduction très nette des flux sortant de France : 11 MEUR en 2005 pour 2 MEUR en 2006, soit un recul des positions françaises de la 99e place à la 135ème place. Les flux d’entrant en France accusent une baisse plus réduite : 14 MEUR en 2005 pour 11 MEUR en 2006, soit un recul de la 60ème position à la 69e pour la Syrie.

Pour ce qui concerne les stocks d’IDE détenus par la France en Syrie, le montant de 10 MEUR des avoirs français place le pays au 126e rang en 2005. En détenant 79 MEUR, la Syrie se situe au 70e rang (engagements) en 2005.

Une présence des entreprises françaises limitée mais dynamique.

Dans le secteur énergétique, Total demeure un acteur majeur (activités d’exploration / production ; pétrole mais aussi gaz à l’étude). D’autres entreprises françaises ont conclu des accords avec les entreprises publiques syriennes : Areva finalise avec PEGT le centre national de contrôle et de distribution à Damas ; Alcatel déploie et remet à niveau les systèmes d’information en téléphonie fixe avec STE.

Dans les biens de consommation

Pour les biens de consommation, les Fromageries Bel enregistrent un succès exemplaire dans le secteur agro-alimentaire, grâce à l’unité de production de fromages fondus construite à Damas en 2004 et opérationnelle en 2005 (La Vache Qui Rit, Régal Picon, Kiri) : 310 emplois créés, extension confirmée pour 2008 avec deux lignes de production. En décembre 2005, Altadis a inauguré sa ligne de production de cigarettes « gauloises blondes ». La première franchise dans le secteur habillement a été mise en place en mai 2006 avec la marque Kookai, profitant de l’ouverture du secteur aux importations.

Dans le secteur bancaire

Dans le secteur bancaire, Calyon est indirectement présent en Syrie via la banque privée syrienne BEMO Saudi Fransi : 51% à capitaux syriens ; BEMO (22%), Banque Saudi Fransi (27%), dans laquelle Calyon est actionnaire à 31%. La Société Générale de Banque au Liban (SGBL), filiale de la Société Générale, est implantée à Damas.

Par ailleurs, Accor a signé un contrat pour la gestion du Sofitel de Lattaquié (en cours de finalisation). Lafarge entend investir dans la première cimenterie privée en Syrie (4 M/T par an). Systra vient de remporter un appel d’offres pour la dernière phase de l’étude de la première ligne du futur métro de Damas. La modernisation de l’aéroport international de Damas devrait donner aux Français qualifiés la possibilité de concrétiser ce projet majeur à court/moyen terme.

Certains obstacles aux échanges à observer

Les contrats peuvent parfois déboucher sur des litiges concernant notamment la levée des cautions de bonne fin. Les pratiques locales (bureaucratie, opérateurs privés) laissent parfois à désirer en termes de réactivité. L’embargo américain actuellement en vigueur (financier sur la Banque Commerciale de Syrie, commercial interdisant plus de 10% d’équipements d’origine américaine) dissuade les exportateurs (Airbus notamment) voire les investisseurs potentiels (grands groupes français vis-à-vis de leur actionnariat américain).

Quelques commentaires

La Syrie présente des perspectives intéressantes ; l’engagement du secteur privé est confirmé et devrait s’accentuer dans ce pays qui demeure le marché majeur du Proche Orient (20 Mhabts). L’amélioration générale de l’environnement des affaires (mise à jour de l’appareil juridique, optimisation amorcée des recettes fiscales) restaure progressivement la confiance des investisseurs : 9,2 MdUSD de projets d’investissement inscrits en 2006, soit presque 3 fois plus qu’en 2004.

En Syrie, les principaux indicateurs macroéconomiques virent au vert alors que les autorités poursuivent leur programme d’ouverture (réformes structurelles, accords de libre échange GAFTA et Turquie, dynamisation du secteur privé) : croissance globale de 4,5% en 2006, taux de chômage de 8%, taux d’inflation de 12/14%.

Article par Philippe Galli

Europe centrale : la croissance à notre porte

La disparition des droits de douane dans les pays européens, Europe centrale, la croissance à notre porte, a entraîné une baisse des prix rendant les produits importés plus accessibles. Une région, dont la population est équivalente au quart de celle de l’Europe de l’Ouest et dont la croissance annuelle moyenne du PIB, depuis 2002, est 6 fois supérieure, ne peut laisser ni entreprises, ni entrepreneurs indifférents !

Plus stables et présentant moins de risques que beaucoup d’autres contrées dans le monde, culturellement proches, ces pays promettent de beaux succès et de grandes satisfactions à qui sait les apprivoiser. Voici pourquoi et comment.

Des marchés porteurs

Pratiquement tous les marchés croissent, à des rythmes significatifs mais divers selon les pays et les secteurs. Les infrastructures et les services sont en fort développement. Les matériaux de construction, l’équipement du foyer, l’électronique grand public, la mode, les produits de luxe et l’alimentaire haut de gamme, par exemple, font partie des marchés qui croissent le plus rapidement.

L’inflation, très élevée dans certains pays, au tournant du siècle -près de 60% en Roumanie en 1998-, est revenue à des niveaux raisonnables, inférieurs à 5%, excepté en Roumanie (7%) et en Serbie (6%).

Certaines catégories ont pu voir leur croissance se ralentir depuis quatre à cinq ans. C’est le cas des produits de grande consommation dans les pays où l’accès au crédit a été facilité, conduisant les foyers à reporter une partie de leurs dépenses sur les remboursements d’emprunts concernant le logement, la voiture ou l’équipement de la maison. Croissance ralentie, certes, mais qui se maintient à des niveaux nettement supérieurs à ceux des pays de l’Ouest de l’Europe, de l’ordre de 5% ou plus.

Une classe moyenne désireuse de qualité de vie et de statut

Dans les années 90, seule une minorité -les « oligarques », en quelque sorte- pouvait accéder aux produits importés. Depuis, développement économique et relative stabilité aidant, une classe moyenne a émergé, dont les revenus lui permettent de s’équiper et d’acheter ou de consommer des produits de marque importés. Ces produits plaisent non seulement du fait de leur qualité mais aussi de part leur rôle de « status symbol ». Ce double attrait a pour conséquence un développement rapide des marchés concernés.

Deux facteurs contribuent à renforcer cette croissance. D’une part, la disparition des droits de douane dans les pays ayant accédé à L’Union Européenne a entraîné une baisse des prix, rendant les produits importés plus accessibles et plus compétitifs par rapport aux produits locaux ; on constate le même phénomène, mais de moindre ampleur dans la plupart des pays hors Union, qui, sous la pression de Bruxelles, réduisent progressivement, mais de manière sensible, leurs droits de douane. D’autre part, les grands distributeurs d’Europe de l’Ouest se sont implantés pratiquement partout et à un rythme rapide ; ils détiennent, aujourd’hui, des parts de marché significatives et contribuent clairement, de par leurs assortiments et leur savoir-faire, au développement des produits importés.

Des partenaires de qualité

L’un des traits marquants de cette Europe Centrale est la qualité de la main-d’œuvre. Une force des régimes d’avant 1989, que l’on ne saurait leur dénier, était l’enseignement, d’une grande qualité et accessible à tous. Ses effets se font encore sentir aujourd’hui et il n’est pas difficile de trouver du personnel compétent. Les cadres, bien formés du point de vue universitaire, sont désireux de réussir et de se former aux méthodes de management occidentales.

Au-delà des chances de réussite accrue pour l’entreprise que procure cette qualité d’encadrement, c’est gratifiant de nouer avec eux des relations solides et « gagnant – gagnant » ! Ceci n’est pas seulement valable dans le cas d’une filiale locale. Ce l’est également lorsque l’on travaille avec un importateur / distributeur local, chez lequel non seulement l’encadrement, mais bien souvent aussi le patron apprécient le savoir-faire que l’on peut leur apporter.

Mais il faut savoir, que, compte tenu de l’implantation importante et accélérée d’entreprises occidentales, les salaires des cadres ont atteint, ou peu s’en faut, le niveau de leurs homologues de l’Ouest.

Europe centrale Des règles à respecter :

Les spécificités locales diffèrent pays par pays, mais sont importantes à connaître pour ne pas faire de faux-pas et éviter les pièges. Il y a cependant des points communs à tous ces pays.

Parmi ceux-ci, il faut savoir que la corruption est encore très répandue. Il faut refuser de tomber dans ce piège, quelles qu’en soient les conséquences. L’interlocuteur auquel l’on est confronté sait très bien que ce genre de pratique n’est pas accepté ailleurs et il est probable que les conséquences d’un refus ne soient pas trop graves -un refroidissement passager des relations, un délai supplémentaire….

Le choix des partenaires locaux est délicat. Il faut absolument se renseigner sur leur fiabilité et ne pas, au début, les croire sur parole. De nombreuses sources existent pour s’informer, qu’il s’agisse de la Mission Économique de l’ambassade, de la section locale des Conseillers du Commerce Extérieur, des banques ou de sociétés étrangères travaillant déjà avec le partenaire pressenti.

Le risque financier lié au défaut de paiement est important. On peut s’en prémunir par des systèmes d’assurance à l’export et par des conditions de paiement solides (pré-paiement, garanties bancaires).

Enfin, il faut savoir que les réglementations sont souvent fort complexes et que l’administration est puissante, lourde, pointilleuse et capable de changer les règles du jeu sans préavis. Il est utile de s’assurer les services et faire appel à un avocat local, rompu aux coutumes du cru et ayant ses entrées auprès de l’administration ; on réservera aux cabinets internationaux les gros dossiers aux implications transnationales, comme les contrats de distribution ou le montage de « joint ventures ».

Une présence française encore à développer

La présence de la France, dans ces pays d’Europe Centrale, est correcte mais peut encore croître ; nous sommes devancés par l’Allemagne et les pays anglo-saxons. Les pays où nous sommes le mieux implantés sont la Pologne, la Roumanie et la Serbie.

Plus de cent sociétés françaises sont implantées en Pologne, dans des secteurs très divers, allant des matériels de transport et de l’énergie aux services et à l’hôtellerie, en passant par l’agro-alimentaire, l’électronique grand public, l’industrie pharmaceutique, le BTP et les banques. La grande distribution française y est également très présente.

Dans le secteur automobile, nous avons une présence significative en Roumanie et dans ces petits pays que sont la Slovaquie et la Slovénie.

Sur l’ensemble de cette région, nous sommes présents dans de nombreux secteurs, principalement dans le secteur bancaire, l’agro-alimentaire – nous sommes N°1 dans les vins et spiritueux -, les produits de luxe et la grande distribution.

Des chances à saisir

Pour conclure, l’attrait de cette région repose essentiellement sur un rythme de développement élevé associé à un risque économique faible, pour peu que l’on prenne quelques précautions.
Des marchés, des consommateurs, des collaborateurs nous attendent ; allons-y !

Par Jacques Gravelin occupe depuis 24 ans des responsabilités à l’international au sein de la société Pernod-Ricard. Pendant 9 ans, il a été directeur d’un réseau de filiales couvrant une dizaine de pays d’Europe Centrale. Il fut, durant deux années, président de la section Autriche des Conseillers du Commerce Extérieur.

New China : nouvelles opportunités pour les PME, nouveaux enjeux pour les conseils

La Chine offre aujourd’hui de nouvelles opportunités aux entreprises françaises. Ce pays n’est plus uniquement un marché d’exportation bénéficiant principalement aux grands groupes. La New China est désormais le relais de croissance, d’anticipation de concurrence et de financement qui manque tant à nos entreprises de taille moyenne et importante. En voici quelques exemples :

Nouveaux produits et services

La Chine croît à un rythme annuel 4 à 5 fois supérieur au nôtre et absorbe des produits et services toujours plus sophistiqués. Après les biens d’équipement et les projets d’infrastructures, les chinois ont des besoins très diversifiés, allant de la presse, de la décoration aux services informatiques en passant par les loisirs, l’éducation ou les prestations paramédicales. Un vaste marché s’ouvre aujourd’hui à la vaste majorité des sociétés françaises qui souhaitent s’implanter sur place.

Nouvelles formes d’implantation

Une deuxième opportunité s’offre aux grosses PME sous-traitantes des grands groupes. Nombre d’entre eux, installés en Chine, souffrent de ne plus avoir la qualité des relations construite dans la durée avec leurs sous traitants français et souhaiteraient être rejoints par ceux-ci sur place. L’exemple allemand de zones d’implantation dédiées -comme celle de Shunde dans le Delta de la Rivière des Perles- où certaines ressources (finance, contrôle, logistique…) se mutualisent, permet d’envisager une implantation chinoise pragmatique et efficiente. Par ailleurs, l’évolution récente du droit chinois permet d’élargir les modalités d’implantations, de partenariats ainsi que leur financement et rapatriement des profits.

Nouveaux financements

La Chine offre une opportunité nouvelle et financière : celle de son internationalisation. En effet, après 20 ans d’investissements mondiaux en Chine, le pays est désormais doté de moyens financiers considérables -notamment via le fond d’Etat- qui commencent à être investis dans des sociétés étrangères. Ainsi, nombre de sociétés françaises en recherche d’investisseurs pourraient trouver en Chine un partenaire intéressant.

Il est symptomatique de constater l’intérêt grandissant pour la Chine des acteurs du capital investissement français, qui y voient notamment la possibilité de « sorties » par des acquéreurs industriels chinois. Certains secteurs bénéficieront en premier lieu de ces investissements : distribution sélective, marques et enseignes à forte légitimité, industries en phase de consolidation, technologies mûres, voire certains secteurs en difficultés détenteurs d’un savoir-faire spécifique.

Nouvelle compétitivité

Sur les marchés, désormais mondiaux, la compétitivité se gagne chaque jour davantage en zone dollar, à proximité des grands centres de production, de recherche, mais également des futurs concurrents, permettant ainsi de mieux anticiper leur venue sur « nos » marchés.

Dès lors, pourquoi n’observe-t-on pas davantage d’opérations franco-chinoises ? Outre la frilosité générale des PME françaises pour les marchés étrangers et leur réticence à rémunérer des conseils professionnels au niveau du marché international, la réponse tient également dans la nécessaire adaptation des passerelles, que sont les conseils aux entreprises, vers ce marché spécifique. La spécialisation « Chine » de ces consultants est une réponse indispensable mais rare concernant le marché chinois, qui obéit lui aussi à des règles de fonctionnement très spécifiques.

Ainsi par exemple, le décryptage et la qualification de l’information commerciale ou financière requièrent à eux seuls une spécialisation des compétences en termes d’accès réel aux fournisseurs de données qualitatives (fédérations professionnelles, banques, etc.), mais aussi en termes de compréhension de cette information (décryptage juridique, implications fiscales, commerciales, etc.).

Une professionnalisation des conseils nécessaires

La professionnalisation des conseils doit s’affirmer. Avec le temps, les partenaires chinois ont appris nos méthodes et les moyens de s’y adapter. Ainsi, il n’est plus possible d’envisager une implantation réussie sur la durée en s’appuyant sur des consultants généralistes, souvent de médiocre qualité dont la principale compétence est de parler mandarin, ou sur un conseil juridique exclusivement. Les problématiques financières, juridiques, commerciales, opérationnelles ou fiscales sont fortement imbriquées et nécessitent des compétences spécifiques et coordonnées.

Enfin, une meilleure reconnaissance du rôle de chacun et une meilleur coordination entre les nombreux intervenants publics et privés permettrait à chacun de jouer pleinement son rôle et de servir au mieux les intérêts des entreprises.

Quel dirigeant de société peut trouver ses repères parmi les nombreuses aides gouvernementales et locales, le rôle et les limites des chambres de commerce, des agences gouvernementales, des Missions Économiques, ou encore des consultants privés, fonctionnels ou opérationnels ? La clarification des rôles et une meilleure collaboration entre les excellents conseils publics et les conseils privés professionnels, culturellement difficile à mettre en œuvre dans notre pays, permettront d’aider plus efficacement nos entreprises à profiter pleinement de ce marché.

Article par Olivier Marc

L’entrepreneuriat social : un nouveau défi

Interview d’Aude Messean, co-fondatrice de l’association Le PariSolidaire a un parcours riche. Elle a conduit sa carrière professionnelle comme une aventurière et a toujours mis l’humain au centre des métiers qu’elle a exercés. De directrice de casting d’AB production, elle est devenue la directrice de casting des personnes âgées et des jeunes à la recherche d’un logement. En 2004, elle crée l’association Le Parisolidaire pour mettre en relation des jeunes à la recherche d’un logement et des seniors désireux de compagnie ou de complément de revenus avec partage des tâches de la vie quotidienne.

Pourquoi avoir choisi l’entrepreneuriat social ?

Ce changement de voie est intervenu parce que je ne supportais plus de faire du commercial médiocre. Il s’agit d’un choix, une forme d’honnêteté vis-à-vis de moi-même. J’avais depuis longtemps un sentiment d’insatisfaction. Quand j’ai agi pour l’accompagnement de 140 personnes licenciées à l’occasion d’un plan social, je me suis sentie en cohésion avec moi-même. Déjà en tant que directrice de casting d’une production, j’ai rencontré des personnes de valeur qui avaient beaucoup de talent mais n’arrivaient pas à vivre de leurs compétences professionnelles.

Le métier d’intermittent du spectacle est précaire, j’ai donc tout naturellement voulu m’investir dans ce combat social. Licenciée de cette même entreprise, la traversée du désert était voulue mais finalement subie. J’avais besoin de sortir de cet univers et de changer radicalement de profession. Le virage n’a pas été simple. Un coup de fil d’une amie m’a donné l’envie d’entreprendre et créer avec elle Le Parisolidaire.

Comment s’est effectuée la création de votre association ?

Grâce à cette amie. Elle m’a parlé d’une initiative en Espagne. En fait, il s’agit de la copie approximative de leur action. Ce projet ressemblait bien plus à mes valeurs. J’ai toujours voulu aider les autres. Déjà, chez AB production, je fournissais des heures de travail aux comédiens qui risquaient de perdre leurs droits. Cela aussi, c’est un peu faire du social !

Cette association est donc la suite logique de mon cursus professionnel. La création n’a pas été facile. Nous travaillions chacune de chez nous par mails interposés. Nous ne connaissions rien au monde associatif mais avec une bonne dose d’énergie, de vouloir faire, de conviction et de professionnalisme nous avons pu concrétiser notre projet. Il y a encore à ce jour des problèmes à régler dont la reconnaissance officielle d’un statut concernant notre action. Sans l’aide de la région qui nous subventionne une partie des salaires nous n’aurions pu continuer.

Comment se faire connaître en tant qu’association ?

Cela n’a pas vraiment été un problème. Nous avons vraiment eu beaucoup de chance ! Cette chance a un nom, c’est la presse, qui elle aussi a trouvé cette idée géniale. Et comme nous étions pionnières, les médias se sont empressés de diffuser l’information. Si nous sommes là encore aujourd’hui, c’est probablement grâce à leur intervention, mais aussi grâce au fait que la plupart des binômes que nous avons formés ont été ravis de leur expérience. Nous avons des seniors qui quatre ans plus tard sont toujours avec nous, très satisfaits de cette formule et qui en parlent largement autour d’eux.

Quelles ont été vos compétences clés pour mener à bien ce projet ? Y a-t-il un diplôme de relations humaines ?

Bien sûr que non. En ce qui me concerne, l’intérêt porté à l’autre et une bonne dose de psychologie et d’intuition. Je pense que les personnes âgées étaient rassurées quand je venais les voir. Pour ma part j’ai l’impression d’un transfert de compétences. Nous ne sommes pas très loin du casting…

Depuis le début de l’année, nous avons embauché une jeune femme qui a fait des études de psychologie et d’économie sociale et familiale, qui gère les cas les plus lourds. Nous sommes depuis peu soutenues par un médecin gérontologue et une psychologue.

Comme se passe la cohabitation en général ?

Avec un public situé entre 50 et 104 pour les seniors et entre 18 et 28 ans pour les jeunes, c’est véritablement un travail d’orfèvre. Cela marche très bien majoritairement. Et quant c’est bien, c’est mieux que bien. En cas de « misscasting », nous avons prévu contractuellement un préavis d’un mois afin de rompre la cohabitation.

Comment vous financez-vous ?

Nous avons trois types de revenus. Les revenus liés à notre activité (frais de dossiers et cotisations) et des subventions publiques ou privées. Sur les conseils de la fondation du Crédit Coopératif qui s’intéresse à notre action et souhaite nous soutenir, nous attendons la reconnaissance du label utilité publique. Grâce à ce label, des sociétés pourront faire des dons, dont une partie sera déductible de leurs impôts.

Cette démarche peut-elle se développer ou doit-elle rester à taille humaine ?

D’un point de vue individuel, nous sommes trois dans la structure pour gérer la cohabitation de 150 seniors avec leurs jeunes. C’est une belle action mais qui prend beaucoup de temps. Nous visitons toutes les personnes âgées qui viennent à nous sur toute l’île de France. Quant aux étudiants, nous recevons tous ceux dont les dossiers de candidature semblent se rapprocher des demandes des seniors en attentes.

Après qu’ils se soient choisis mutuellement il y a un gros travail de suivi qui s’effectue tout au long de l’année avec un besoin de conciliation. Nous avons naïvement cru, au départ, que nous pourrions travailler main dans la main avec toutes les bonnes volontés qui nous ont demandé conseils. Cela n’a malheureusement pas été le cas, mais nous avons quand même créé un réseau, le réseau C.O.S.I. qui fédèrent plus de vingt associations sur le territoire français plus une en Belgique, à New York et aux Antilles, qui travaillent solidairement afin d’offrir aux jeunes et aux seniors le plus d’occasion de se rencontrer.

En ce qui concerne l’Ile de France, nous tenons à sectoriser cette action afin de maintenir le plus de proximité possible avec les seniors. L’association Besoins Deux Toit, située dans les Yvelines, vient de rallier le réseau C.O.S.I. et nous travaillions étroitement ensemble à la réussite de leurs actions dans leur département.

Trinov innove dans la gestion des coûts des déchets

Interview de Dan Dassier. Après une école de commerce en France, le créateur de la société Trinov travaille pour la Sagem pendant deux ans puis chez IBM durant 7 ans. En 2003 lors d’un congé sabbatique, il fait le tour du monde et a l’idée de créer sa société pendant ce voyage.

Quelle est votre activité ?

Trinov est une entreprise de courtage de déchets industriels dangereux et non dangereux habilitée en préfecture. La mission première de cette société est d’apporter des solutions pour optimiser la gestion globale des déchets de ses clients : optimiser des coûts des déchets, des filières et des sources potentielles de génération de déchets. Trinov a intégré dans son approche une forte dimension de conseils en avant-vente pour aider ses clients à transformer leurs contraintes réglementaires et les valeurs environnementales en opportunités financières.

Pourquoi avoir choisi de l’entrepreneuriat dans le développement durable ?

Ce sujet me passionnait depuis longtemps. Au démarrage du projet, tous les industriels que j’ai rencontrés m’ont dit vouloir, – recycler davantage leurs matières premières secondaires (rebuts de production), – suivre de plus près leurs dépenses et leurs processus d’élimination de déchets (optimiser ce centre de coûts jusqu’ici peu regardé) – et enfin répondre au cahier des charges des donneurs d’ordre (leurs clients).En fait, les industriels sont peu ou pas incités à sortir des sentiers battus. Les évolutions réglementaires paraissent difficiles à suivre et à comprendre. Enfin, la combinaison des compétences à rassembler pour optimiser ce poste de coûts, est difficile à mettre en place dans les entreprises : environnementale, logistique, juridique, financière.

Comment vous démarquez-vous de vos concurrents ?

Notre avantage compétitif réside dans le couple méthodologie et outils informatiques adaptés à notre métier. Notre logiciel permet à partir de la modélisation des flux de déchets d’un site, d’obtenir une vue précise, en moins de deux journées de travail des coûts complets et des scénarii alternatifs envisageables. C’est un formidable outil pour justifier un investissement ou proposer une alternative chiffrée à sa direction.

Comment fonctionnent les différentes étapes ?

Tout d’abord, nous effectuons un état des lieux sur le site du client à l’aide de notre outil informatique. Une fois ce diagnostic réalisé nous remettons au client une feuille de route avec les économies réalisables. S’il souhaite poursuivre avec Trinov, nous sommes en mesure de lui proposer d’autres types de prestations de service y compris du courtage. Pour ce mode de fonctionnement nous pouvons être rémunérés soit au forfait, soit au résultat.

Quel est le profil type de vos clients ?

Notre logiciel a été conçu pour répondre à des problématiques « déchets » sectorielles. Les premiers modules seront spécifiques à la plasturgie et à l’imprimerie, ce qui nous permet de gagner efficacité et en crédibilité chez nos clients. Nous nous adressons à des entreprises d’une cinquantaine de personnes. Parfois des grands groupes, mais souvent des grosses PME.

Pour quelles raisons les déchets sont coûteux pour une entreprise ?

Parce que tout dans une entreprise est susceptible de devenir un déchet. Une entreprise en génère forcément et la réglementation a étendu au fil du temps la responsabilité du producteur jusqu’à l’étape finale d’élimination. La responsabilité des entreprises est engagée conjointement à celles des tiers qui assurent l’élimination. D’où des coûts revus bien souvent à la hausse.

Y a-t-il au sein de Trinov une même stratégie ?

Nous utilisons du papier recyclé, imprimons recto verso. Tous nos détergents sont des produits naturels et nos déplacements se font en transports en commun.

Quels conseils donneriez-vous à un jeune créateur d’entreprise ?

Prendre son temps, se fier à son instinct et se faire aider. Dès que vous avez un concept, une idée il faut aller chercher des appuis et le confronter sur le terrain. L’incubateur d’Advancia nous a apporté une batterie d’experts et bonne dynamique de groupe. Ma fierté est d’avoir créé avec finalement peu de moyens à la base, des outils et une dynamique d’équipe que des grands groupes peuvent nous envier aujourd’hui.

La cartouche verte : Ecolomisez !

Interview de Vincent PIGEARD a suivi une formation initiale en agronomie. Il a débuté sa carrière en agence de communication puis réorienté sa vie professionnelle pour rejoindre un opérateur téléphonique qui deviendra le groupe Neuf Cegetel. Alors Responsable Opérationnel grands Comptes et aussi citoyen engagé, il quitte cet employeur avec une idée qui lui permettra de créer son entreprise en même temps que d’apporter sa contribution à la sauvegarde de notre planète : la recharge des cartouches d’encre et toners laser. Jeter une cartouche est aussi un geste très polluant pour l’environnement. Leur recharge, la cartouche verte, est donc une alternative écologique et économique très intéressante.

Entrepreneuriat vert, quel a été le déclic ? Opportunité ou vocation ?

Les deux. Tout d’abord, j’aime beaucoup voyager, j’ai découvert la beauté des peuples et des paysages de part le monde. De ce fait, l’avenir de notre planète et ce que nous laisserons à nos enfants me préoccupe. L’idée de recharger des cartouches d’encre et de toners m’a été inspirée par l’activité d’un ami. J’ai donc imaginé la mise en place d’un nouveau mode de distribution : je vais chercher le particulier directement sur son lieu de travail par l’intermédiaire du comité d’entreprise. Ce dernier est toujours heureux d’offrir un nouveau service permettant de faire réaliser des économies aux employés qu’il représente. Sur le même modèle que les collecteurs de pellicules photos, La Cartouche Verte met en place des bornes de collecte dans les entreprises. Les salariés peuvent y déposer leurs cartouches vides grâce à des enveloppes prévues à cet effet. Nous récoltons ces cartouches, les remplissons et les retournons sous deux jours. L’offre est donc destinée aux salariés de l’entreprise pour leurs besoins personnels.

Comment êtes-vous passé de l’idée à un projet concret ?

J’ai décidé d’intégrer une formation généraliste de création d’entreprise chez Advancia (école de commerce de la CCIP de PARIS) afin de me doter d’outils (comptabilité, gestion, juridique) pour monter l’aspect théorique du projet. Ensuite, j’ai intégré l’incubateur d’Advancia pour concrétiser ma création d’entreprise. J’ai ainsi bénéficié d’un bon coaching professionnel très enrichissant et d’un accompagnement quant à mon développement personnel.

Vous êtes installé dans une pépinière d’entreprises, est-ce vraiment intéressant pour un jeune créateur ?

Cette pépinière d’entreprise de FRESNES m’apporte un support logistique économique ; elle comporte de nombreux services associés, comme l’accueil téléphonique, l’accueil livraison, un secrétariat, des salles de réunion équipées. Mais l’intérêt réside également dans la proximité avec les autres entrepreneurs de la pépinière. Ils sont pour la plupart « jeunes entrepreneurs » et nous pouvons partager nos expériences. C’est une solution que je recommande à tous ceux qui créent leur entreprise.

Quel est le coût d’un remplissage, par rapport au coût d’une cartouche neuve ?

Pour le particulier, selon les marques, l’économie est de 30 à 60 % par rapport à l’achat d’une cartouche neuve. De plus, au niveau écologique, le geste de recharger ses cartouches évite de les jeter. Les cartouches vides peuvent polluer à plusieurs titres : les produits chimiques qu’elles contiennent contaminent les nappes phréatiques. Même si on les fait incinérer, cela dégage du CO2 dans l’atmosphère. Le consommateur économise donc de l’argent tout en étant dans une démarche de développement durable.

Quelle est la durée pour faire remplir des cartouches pour une entreprise ?

Toujours dans un souci écologique et afin de limiter les déplacements, j’organise jusqu’à deux tournées maximum par semaine et par site. Les clients peuvent donc obtenir leurs cartouches remplies en deux jours.

Quelles sont vos cibles ?

Au départ, je ciblais plutôt les particuliers via les Comités d’Entreprise des grandes entreprises (500 personnes minimum sur un même site). Je réfléchis à une solution de service par correspondance, qui devrait bientôt être mis en place car une demande forte émane des PME-TPE. Je projette également d’installer des bornes dans le Bureau des étudiants des grandes écoles ou facultés. Un premier pilote avec l’EFREI à Villejuif (grande école d’ingénieur informatique) doit démarrer en janvier.

Quel pourrait être votre conseil pour entreprendre dans le « vert » ?

Le créneau développement durable est d’actualité et c’est tant mieux ! Mais il ne faut pas considérer ce créneau comme un simple phénomène de mode ou comme une aubaine mais comme une nécessité. L’idée d’apporter une contribution à la préservation de l’environnement, même à petite échelle, doit sous-tendre le projet.

Le développement durable : une totale nécessité

Interview de Jean Michel GIRES, ingénieur de l’école Poly-technique, fait ses débuts dans l’administration, notamment dans le contrôle de construction des centrales nucléaires, il travaille ensuite à l’utilisation rationnelle de l’énergie ainsi qu’à la promotion des énergies renouvelables. En 1988, il rejoint le groupe Total. Depuis 2002, il est directeur du développement durable et de l’environnement.

Pourquoi Total s’est-elle engagée dans une politique de développement durable ?

Le développement durable est une aspiration importante de la société civile, le problème de la durabilité des ressources nous concerne tous. Total est impliquée dans l’énergie et les hydrocarbures. Or, Total a le souhait d’être un véritable acteur pour apporter des solutions et être un moteur dans le développement durable. Ce défi est essentiel pour Total.

Depuis combien de temps Total s’engage dans ce schéma ?

Les préoccupations liées à l’environnement sont apparues à la fin des années 80. Au sein de Total, cela fait déjà une quinzaine d’années que cette démarche se structure mais elle est devenue systématique depuis 5 ans. Dans la société civile, plus personne n’y échappe, c’est devenu un enjeu extrêmement important comme le montrent les débats du Grenelle. Il faut donc en être partie prenante pour jouer un rôle d’acteur industriel de premier rang. De même apporter des solutions, compte tenu de la taille et des enjeux dont le groupe est porteur, est une obligation.

Comment préparez-vous l’après pétrole ?

Le premier défi est d’apporter des solutions énergétiques par les hydrocarbures, matière principale du groupe, mais aussi de réfléchir aux autres alternatives, comme les énergies renouvelables. Les alternatives souffrent encore d’un manque d’effet de taille comme le Solaire photovoltaïque, encore trop petit à l’échelle de la demande énergétique mondiale. Il faut encore du temps afin de libérer les solutions techniques, de baisser les coûts, d’avoir de nouveaux moyens sans créer d’autres problèmes. L’autre pari est celui du charbon, qui possède aussi ses inconvénients : le dioxyde de soufre, d’azote, et l’émission de poussière, et surtout les émissions de CO2.

Le projet novateur du captage et stockage du CO2, pouvez-vous nous le décrire ?

Il existe une accumulation de CO2 car l’ensemble de la planète n’a pas la capacité de réabsorber ce CO2 émis par l’homme dans les océans et les écosystèmes terrestres. Alors pour éviter qu’il ne parte dans l’atmosphère, il est tentant de le capter, le comprimer et le réinjecter dans le sous-sol, dans certaines formations géologiques pour qu’il y reste le temps d’affiner d’autres solutions. Un pilote industriel nous ouvrira la voie dès 2011, car il faut deux ans d’injection et de surveillance et le passage en phase de déploiement à grande échelle dès 2015/2020.

Quels sont les moyens mis en place par Total pour sensibiliser le public ?

Nous investissons pour informer correctement les clients sur les produits novateurs qui permettent une émission réduite de CO2. Il est très encourageant de constater que nos clients évoluent eux aussi, de plus en plus sensibilisés au développement durable, avec le souhait de savoir quoi faire à travers le choix des produits qu’ils sont amenés à acheter et ensuite à l’utilisation qu’ils peuvent en faire. Comme par exemple le nouveau carburant excellium qui leur permet d’économiser en moyenne 3,7% d’énergie à l’utilisation.

Qu’est-ce-que les biocarburants ?

C’est un carburant qui intègre une certaine proportion de produits d’origine végétale ou animale, d’ascendance agricole. Total en est le principal distributeur à l’échelle européenne.

Votre lien avec les constructeurs automobiles ?

Il est bien sûr incontournable, comme le couple carburant-moteur : il est la garantie du constructeur afin que le moteur fonctionne de façon satisfaisante, qu’il respecte les conditions d’émissions. Ainsi toute la qualification de ces biocarburants se fait dans un travail en commun avec les constructeurs automobiles, que ce soit pour les véhicules particuliers ou les poids lourds. Nous travaillons beaucoup à la préparation d’une nouvelle génération de biocarburants qui fera appel à des ressources d’une autre nature : bois, paille, autres matières cellulosiques, déchets agricoles et forestiers.

Quelles sont les actions sociales mises en place par Total ?

Dans le cadre des Ressources Humaines, notre politique consiste à renforcer les institutions locales de formation pour qu’elles puissent répondre aux besoins de personnel. Elles doivent pouvoir assurer la formation d’un nombre suffisant d’acteurs capables de rejoindre nos projets et opérations.Sur la partie sociétale, nous avons des problèmes de cohabitation entre nos projets industriels et les riverains. Il faut veiller à la maîtrise des risques environnementaux et sanitaires, à une bonne cohabitation entre nos activités et la vie de ces personnes mais aussi apporter une véritable contribution au développement économique et social des communautés d’accueil.

Pourriez-vous donner un exemple concret de ce type d’aide ?

Nous essayons de contribuer au développement humain par des actions sur l’éducation et sur la santé. Egalement au développement économique, grâce à la batterie des outils du micro développement : l’utilisation de micro crédits par exemple, mais aussi des apports de compétences dans le domaine agricole ou artisanal.

L’environnement est parfois vécu comme une contrainte par certaines entreprises, mais d’autres en font le moteur de leur stratégie, quel est votre ressenti sur ce point ?

Nous ne sommes pas impliqués dans les métiers de l’environnement à proprement parler. Total est dans les métiers de l’énergie. A l’inverse, la maîtrise de la performance environnementale liée à nos activités, est un thème d’excellence, parce que nous n’avons pas le choix ; nous nous devons de maîtriser et de réduire l’impact environnemental de tout ce que nous faisons, c’est une responsabilité. En cherchant à travailler positivement, malgré l’augmentation des coûts, il en résulte des solutions efficaces. Total est reconnue dans sa maîtrise de l’environnement et est plus facilement choisi comme partenaire, au regard de ses performances dans ce domaine.

Quelle est l’action de Total dont vous êtes le plus fier ?

Le captage et stockage du CO2. Savoir aujourd’hui déclencher un tel projet, et le voir se réaliser en France, fait de Total une référence.

Dans quelle mesure un jeune entrepreneur, peut-il mettre en place une politique de développement durable à travers son activité ?

La bonne façon de rentrer dans le sujet est d’identifier ses parties prenantes. L’entreprise doit connaître les partenaires, les interroger pour savoir quelles sont leurs attentes sur cet axe du développement durable.

Développement durable : volonté marketing ou volonté de préserver la planète

Le développement durable est un véritable enjeu mondial et une opportunité commerciale évidente. Il est important de faire la part des choses dans cette médiatisation qui génère autant d’inquiétude, de mobilisation que de répulsion face aux abus marketing. Cette problématique bénéficie-t-elle d’un véritable écho ? Comment se situe la France dans ce contexte international ? Quels sont les espoirs de trouver des solutions durables dans ce monde fragile et instable ?

L’entreprise durable : une harmonie tactique

L’éclosion du phénomène de « développement durable », pousse les entreprises à identifier, au delà de la logique purement écologique, des critères qui pourraient assurer la pérennité de leur existence. Ainsi, bien loin des débats de croissance et de parts de marchés, ce label d’entreprise durable se veut avant tout équilibré pour les hommes, pour les structures et pour leur environnement. C’est tout simplement une réflexion de bons sens. A l’image du slogan du groupe MICHELIN, « Les plus belles performances sont celles qui durent », la logique du « Développement Durable » donne un renouveau aux critères de performance des entreprises actuelles.

Alors que nous avions tendance à croire que ce concept n’avait de sens, que pour des entreprises confrontées aux problématiques énergétiques ou dont les matériaux utilisés devaient respecter l’environnement, nombreux sont ceux qui voient dans les fondements du développement durable, les conditions appropriées au succès des entreprises modernes. Ainsi, les trois critères fondamentaux font de ces entreprises des sociétés économiquement viables, socialement équitables et respectueuses de leur environnement.

Un équilibre nécessaire

Et loin d’une simple utopie pour consultant, cette prise de conscience s’avère aujourd’hui vitale pour résister dans une économie qui s’internationalise à grands pas, réduisant les distances vis-à-vis de nouveaux fournisseurs, des clients, comme des concurrents. Mais au-delà de ces trois critères d’ores et déjà respectés par de nombreuses entreprises, c’est avant tout l’équilibre de l’énergie portée sur ces trois conditions qui font de l’entreprise, une aventure pérenne.

En effet, nous avons tous autour de nous des exemples d’entreprises dont les qualités économiques sont exceptionnelles, mais dont les conditions humaines du travail ne peuvent durer dans le temps. D’autres sont dites citoyennes, veillant tant au bien-être de leurs collaborateurs qu’à leur gestion énergétique, mais dont la logique financière est un gouffre inacceptable, nécessitant l’intervention permanente de l’Etat ou du citoyen lui-même pour combler ces déficits. Certains surfent sur la vague du boom économique des produits écologiques, mais sans pour autant être cohérents en matière énergétique ou suffisamment à l’écoute de leurs collaborateurs.

Les entreprises durables seront donc celles qui réussiront à gérer le plus harmonieusement possible, ces dimensions humaines, financières et environnementales. Ainsi, depuis que le monde est monde, nous vivons des équilibres instables, précaires, mais sources de capacité d’imagination et d’adaptabilité aux grandes ruptures. Et comme nous cherchons à mieux équilibrer nos vies dans notre vie (amicale, familiale, d’entreprise et des hobbies), l’entreprise sera une aventure durable si elle veille à respecter ces points.

Un climat social à construire

Ces entreprises doivent donc construire un climat social permettant l’épanouissement de leurs collaborateurs, pour que le mot « travail » dont les origines étymologiques issues du latin « tripalium » (instrument de torture) puisse laisser place à une véritable « récréation », favorisant le plaisir de satisfaire ensemble les clients. L’efficacité de ces entreprises doit être basée sur l’adaptabilité, l’innovation et l’anticipation pour que leurs résultats financiers permettent l’enrichissement des compétences.

Enfin la prise de conscience environnementale n’est pas qu’une question de mode temporaire favorisant les messages marketing, mais bel et bien une condition sine qua none, du développement durable dans le respect écologique de son environnement.

L’innovation à l’échelle internationale

L’innovation technologique est au cœur des solutions de développement durable. Après une communication basée sur le catastrophisme remuant les consciences, l’heure est à l’application individuelle de solutions efficaces Les innovations technologiques, fidèles à la fameuse loi des 3 C (Cleve, Clean and Competitive) sont nombreuses et réellement source d’espoir pour le futur.

Je pense à ces solutions d’auto gestion interactive de la consommation énergétique apportant des économies de plus de 50 % dans les bâtiments actuels, à de nouveaux capteurs d’énergie solaire qui suivent le parcours des rayons du soleil concentrant davantage la chaleur, à ces voiles de Kite qui équiperont les bateaux de croisières et autres cargos pollueurs des mers, réduisant ainsi de moitié leur consommation de carburant, à ces nano-membranes filtrant l’eau la rendant potable, à ces nouvelles piles flexibles recyclables de la taille d’un ticket de métro qui à base de nanotechnologies permettent de générer de l’énergie, par simple différence de température de quelques degrés, des ascenseurs à eau de mer fixant quotidiennement 100 millions de tonnes de carbone au cours d’un processus naturel.

Les innovations ne manquent donc pas, pour trouver des solutions respectant les trois dimensions écologiques, sociales et économiques. Ces technologies ont un apport direct pour l’environnement : la vidéoconférence, le télétravail peuvent permettre de diminuer directement les impacts environnementaux de l’activité humaine. Les technologies de l’information permettent l’organisation du covoiturage, du partage de propriété des voitures, facilitent les transports en commun.

L’impact des innovations

Elles ont un apport direct pour l’économie : c’est à travers le développement de compétences que la société évolue en profondeur. Ce besoin de compétence se couple au besoin de recherche pour encourager l’innovation en matière de TIC et d’efficacité énergétique au sens large. De nombreux secteurs économiques peuvent en profiter : des modes de transport moins gourmands en carburant, des bâtiments plus efficaces en matière énergétique (eau, carbone) etc. Il est à rappeler que les transports et le bâtiment représentent aujourd’hui plus de 50 % des pollutions.

Les outils de management environnemental permettent d’identifier et de mettre en œœuvre des démarches de progrès importantes. Ils sont un apport direct pour l’équilibre social : toute démarche de développement durable est fondée sur la participation, la gouvernance. C’est tout l’enjeu du collectif, du collaboratif. Il est envisageable de réellement parler de cogestion, de codécision, de coproduction.

Des mesures à prendre

Pour cela, il convient de faire progresser réellement le niveau culturel global, et donc d’éduquer et de former. En Californie, la bulle Internet semble bien lointaine ! Sous l’impulsion du gouverneur californien Arnold Schwareznegger, la « Silicon Valley » veut se positionner comme le centre de Recherche et Développement mondial, des Technologies de l’Information du développement durable.

Une politique musclée à coups de millions de dollars pour apporter des solutions concrètes au respect de la planète. Alors que les USA sont parmi les plus gros pollueurs de notre belle planète, l’état de Californie montre l’exemple en étant le premier état américain à avoir de fait, adopté le protocole de KYOTO, obligeant l’état à réduire drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre. Et fidèle à la réactivité du « Golden State », les sociétés de capital risque californiennes ont très bien compris que le Développement Durable est probablement la plus forte opportunité économique du XXIème siècle.

L’engagement de l’administration californienne permettra la création de 100.000 emplois et le développement de 4 milliards de dollars de valeur ajoutée. Par ce type d’actions réunissant des politiques, des industriels, des scientifiques et des financiers, l’état californien souhaite devenir l’épicentre des « technologies vertes ».

La France est au cœur de l’action

Dans ce contexte international, la France est au cœur de l’action, étant elle-même très impliquée dans ces problématiques via le transport, l’énergie, l’agriculture et le tourisme. Dans ce cadre, le sillon rhodanien est en train de devenir un terrain fertile aux projets de développement durable.

Capitalisant le savoir-faire de nombreuses entreprises spécialisées dans les technologies de l’information, les projets naissent rapidement dans une dynamique de réseaux synergiques, alliant les compétences du design stéphanois, les nanotechnologies grenobloises, le « serious game » lyonnais… Ainsi voit-on diverses solutions technologiques jouer leur rôle dans les projets de développement durable : sondes wifi d’information de la qualité environnementale de l’air et de l’eau, des solutions de gestion interactive d’énergie solaire apportant des économies de 50 %, de nouvelles piles flexibles génératrices d’énergie.

C’est en s’appuyant sur cette richesse naturelle, en développant des expériences dignes de sens, et en poussant les acteurs variés à coopérer, que cette « Silicon Valley du développement durable Française » peut naître. C’est donc en jouant la « glocalisation » (vision internationale et capitalisation locale), en poussant les coopérations en réseau, entre acteurs aux compétences variées, et en capitalisant les expériences que ces territoires peuvent donner lieu à de grands projets aux résonances internationales.

Une complexité des enjeux

Ce contexte international ne doit pas occulter la véritable complexité des enjeux qui sont devant nous. Pendant que de nombreuses mesures sont prises pour lutter contre une meilleure gestion de ressources planétaires, des gaspillages et des catastrophes écologiques viennent tous les jours réduire à néant cette colossale énergie dépensée pour inverser la tendance actuelle.

Certes, les nombreuses communications sur les conséquences catastrophiques du réchauffement de la planète ont véritablement engendrées une prise de conscience collective, mais il reste encore beaucoup de travail pour faire changer les comportements individuels. Il suffit de regarder le nombre de personnes qui laissent le moteur de voiture fonctionner, alors qu’ils sont en train de vider des emballages dans les containers de recyclages prévus à cet effet.

Stratégies durables : l’affaire de tous

Aujourd’hui la réalité de l’avancée est une affaire de tous, où chaque individu apporte un peu de son action, de son expérience. Et, comme le définit Michel Serres : « La science, c’est ce que les parents apprennent aux enfants, la technologie, ce que les enfants apprennent aux parents ». L’intégration des technologies dites vertes dans notre quotidien familial comme entrepreneurial est issue de la volonté de tous, et non pas d’une décision étatique ou purement économique. A l’image de ce qui se passe dans le monde des technologies de l’information avec le succès des blogs, des forums c’est avant tout les nombreux échanges d’expériences qui donnent lieu à des succès applicatifs.

Chaque individu, chaque entreprise, chaque association, chaque politique, a sa part de responsabilité dans sa capacité à expérimenter, à coopérer et transmettre le fruit de ses succès. C’est sans doute à ce prix que le changement comportemental donnera des résultats visibles à l’échelle internationale. Ceci, en veillant à ce que notre attitude face aux technologies propres évolue progressivement de contre-active à réactive, puis de pro-active à interactive. Le développement durable est une condition vitale de la survie de l’humanité.

La communication de la part des entreprises, qui ont parfaitement compris les enjeux économiques et les opportunités marketing associées, doit être maniée avec grande précaution. L’effet boomerang d’une communication mercantile exagérée serait évidement lourde de conséquences. Les changements sont donc en cours, mais veillons à rester vigilants afin que la trilogie du développement durable (équitable, économique, écologique) ne devienne pas un argument marketing plus important que la réalité de ses mises en œuvre, vitales pour notre avenir et celui des générations futures.

Article par Bertrand Lazare

Rhodia : des paroles oui ; mais des actes aussi !

Interview de M. Khéliff, directeur du développement durable chez Rhodia, a un parcours quelque peu atypique. Il débute à 16 ans et demi en usine comme tourneur fraiseur ajusteur. Il intègre ensuite la chimie à l’âge de 19 ans, en tant que mécanicien. Pendant une douzaine d’années, il occupe la fonction de délégué syndical sur un site chimique. Devenu permanent syndical par la suite, il quitte son entreprise et devient secrétaire général de la Fédération Chimie Energie de la CFDT. Après avoir occupé durant une vingtaine d’années des fonctions au niveau national, européen et international, il choisit de retourner en entreprise. Il lui paraissait normal, qu’un militant, un responsable syndical puisse retrouver le monde de l’entreprise.

Quelle est la différence entre la charte globale de l’engagement pour le progrès, le global compact, et la global charter ?

Ce sont deux choses complètement différentes. La Global Charter s’inscrit dans le prolongement du programme en « excellence de sécurité » développé par la profession au niveau mondial juste après l’accident dramatique de Bhopâl en 1984, qui a fait des milliers de victimes. L’accident a conduit à la disparition de l’entreprise « Union Carbide ». Le seul nom de l’entreprise était devenu insupportable à la profession et au marché. A cause ou grâce à ce choc, la profession a décidé de définir un code de bonne conduite en matière de sécurité et d’hygiène appelé le « responsible care » auquel les entreprises chimiques étaient conviées à adhérer d’une manière volontaire. Rhodia a adhéré immédiatement. La Global Charter en est une version « sévèrisée » que nous avons signée fin 2006. Le Global Compact est le pacte mondial de l’ONU dont nous sommes également adhérents.

C’est un ensemble de dix principes qui portent sur les droits humains fondamentaux, le respect de l’environnement, les règles anti-corruption. Chaque année, les entreprises signataires sont invitées à mettre en ligne sur le site intranet du Global Compact les actions de progrès qu’elles ont développées durant l’année écoulée.

Dans quelle mesure cela ressort-il dans vos stratégies, vos actions ?

Le développement durable est un concept relativement neuf, dont la compréhension et la réalité de prise en charge peuvent être différentes d’une entreprise à l’autre. Ces différences sont d’ailleurs critiquées notamment par les ONG et sont observées et évaluées par les agences de notations extra financières comme VIGEO pour l’Europe, ou le « Dow Jones sustainability index » au niveau mondial. La dernière notation de VIGEO distingue ainsi Rhodia comme leader du secteur Chimie.

Nous sommes partis relativement tôt dans la démarche de développement durable. Nous avons engagé cette démarche en 1999 ; le premier rapport est celui de 2000.Soulignons qu’en 2002, sur 50 000 multinationales, seules 2 000 sortaient un rapport autre que financier. Si nous remontons plus loin, c’est en 1992 que Rhône Poulenc, ancêtre de Rhodia, a diffusé son premier rapport « environnement ». Cet engagement précoce s’est appuyé sur une solide culture de sécurité.

Depuis les années 70 notre groupe a développé une politique très exigeante en matière de sécurité au travail. Cette politique, régulièrement renforcée, fait que Rhodia a aujourd’hui les meilleurs résultats en France et se place dans les 3, 4 meilleurs mondiaux. Nous avons moins d’un accident de travail par million d’heures travaillées, soit un taux de fréquence de 0,7 % pour les accidents avec arrêts de travail. Ce taux couvre bien évidemment les salariés Rhodia mais également les personnels intervenants sur nos sites (sous-traitants, intérimaires, etc …) car nous considérons que l’appréciation de la sécurité doit prendre en compte tous ceux qui travaillent chez nous.

Est-ce qu’il y a eu d’autres actions ?

En plus de cette expertise, en matière de sécurité, Rhodia est également doté d’une forte culture de dialogue. Dialogue avec les salariés et leurs représentants bien entendu. Mais dialogue aussi avec les riverains de nos sites et c’est très important car la transparence sur la réalité de nos risques et les modalités de leur maîtrise est le fondement d’une relation de confiance qui conditionne notre licence d’opérer.Au plan environnemental nous sommes un des acteurs industriels principaux du protocole de Kyoto.

Cet intérêt pour le problème que pose l’effet de serre remonte aux années 90. Dès cette date, des ingénieurs se sont penchés sur le fait que dans la chaîne de fabrication de l’acide adipique, qui rentre dans la fabrication du nylon, nous émettons du protoxyde d’azote. Ce N2O est un gaz non toxique mais il a un pouvoir réchauffant 310 fois plus élevé que le CO2. Face à cela l’entreprise a investi 100 millions de francs de l’époque dans un projet qui depuis 1997 nous permet de réduire de 80% les émissions de N2O par tonne d’acide adipique produit.

Comment se traduit cet engagement ?

L’engagement de Rhodia en faveur du développement durable s’apprécie aussi au regard de sa permanence dans le temps en dépit des difficultés traversées par le Groupe. En 2003 nous étions au bord de la faillite, et bien des raisons pouvaient conduire à stopper ou ralentir notre action. Or nous avons décidé d’aller plus loin et plus fort dans le développement durable, en construisant un programme que nous avons baptisé Rhodia Way. Ce programme inscrit notre démarche au cœur des processus managériaux. Il se décline sous la forme d’un référentiel de responsabilités par parties prenantes (clients fournisseurs, investisseurs, employés, communautés, environnement).

Face à chacune d’elles nous définissons des ambitions de responsabilité ; chaque ambition renvoie à des bonnes pratiques qui sont classées sur une échelle à quatre niveaux, allant du basique à l’excellence. La grille ainsi formée permet aux managers de Rhodia, partout dans le monde, de réaliser l’auto évaluation des pratiques, de leur entité et d’en repérer les limites pour définir un plan de progrès.

Rhodia Way est en lien avec Ambition 2010 ?

« Ambition 2010 » est un plan qui participe au renouveau de Rhodia. Rhodia Way prend sa part de cet effort mais constitue une démarche de responsabilité permanente.

Le développement durable est-il un point majeur de différenciation face à vos concurrents ? Quels sont vos rapports avec les différentes parties prenantes ?

Nous pensons en effet que l’engagement dans la voie du développement durable et la qualité de cet engagement vont s’affirmer de plus en plus comme un discriminant relationnel. Cet engagement rapproche déjà les entreprises qui le partagent et resserre les liens entre l’entreprise et ses parties prenantes car le niveau de responsabilité qu’appelle le développement durable ne peut être atteint seul.

A l’interne, l’implication des salariés est une absolue nécessité et à l’externe c’est l’exigence d’un dialogue renforcé avec les riverains, les fournisseurs et les clients. Le transport des produits est ainsi pour nous un risque très important et si l’on considère que nous ne possédons pas les camions et que les chauffeurs ne font pas partie de nos employés, on voit aisément l’enjeu que constitue la responsabilité de nos transporteurs.

Sur votre brochure d’entreprise, il est indiqué « Développer l’employabilité sur le volet social » : qu’est ce que cela signifie ?

Cela concerne la bonne gestion des Ressources Humaines, pour assurer le développement des compétences et l’évolution de carrière. Ce qui intéresse les jeunes étudiants qui choisissent Rhodia, c’est que nous sommes un groupe mondial dans lequel on peut évoluer dans des spécialités différentes mais également circuler entre différentes zones géographiques. Le Groupe a conduit sa restructuration en privilégiant le reclassement des salariés concernés.

Dans cet effort, le profil d’employabilité des personnes est un atout essentiel. C’est un élément de la performance du groupe et c’est également la meilleure façon de rendre service à nos salariés. Dans un contexte d’évolution permanente de l’entreprise, la meilleure garantie pour un salarié, c’est en effet de relever constamment le niveau de son employabilité, et nous l’y aidons.

De quel projet en particulier, êtes vous le plus fier ?

C’est bien sûr d’avoir mené à bien la construction de Rhodia Way ; que le groupe ait choisi de le faire et que nous y soyons parvenus dans une période de crise.

Quels conseils donneriez-vous aux entrepreneurs qui souhaitent investir dans le développement durable ?

Il n’y a pas d’avenir pour les entreprises, et plus particulièrement pour les entreprises à risques comme la chimie, en dehors du développement durable. Le développement Durable est certes un cadre d’exigences mais il est aussi un espace d’opportunités. Les problèmes que doit affronter la planète sont souvent nés du développement industriel et le paradoxe est que l’industrie est aussi la source principale des solutions à apporter. Quelque part le développement durable est le moteur de l’industrie parce qu’il faut produire des solutions nouvelles ; Industrie des industriels, la chimie a un rôle important à jouer pour aider ses clients, à répondre aux enjeux de responsabilité qui sont les leurs.

Des marchés nouveaux se dégagent. Prenez par exemple le pneu vert rendu possible grâce aux silices de Rhodia ou encore celui de la dépollution des gaz d’échappement des véhicules. Deux marchés où Rhodia est leader et qui n’existaient pas avant les exigences posées par le Développement Durable. Il faut être attentif aux marchés que dégagent les attentes en matière de responsabilité. Beaucoup de produits que nous connaissons aujourd’hui vont disparaître. Les comportements vont profondément changer et des besoins nouveaux vont naître. Le développement durable n’est pas la fin de l’industrie, c’est sa réinvention.

Environnement : Les actions du ministère

Amoureux de l’environnement de longue date avec 40 ans de militantisme pour l’environnement, Christian Brodhag intègre le parti des verts. Expert en développement durable, il devient ensuite tout naturellement délégué interministériel au développement durable. Théoricien autant que praticien, il est également directeur de recherche à l’école des mines de Saint-Étienne où, dans ce cadre, il travaille souvent avec des PME.

Quelle est votre action au sein du ministère ?

En tant que délégué interministériel, je coordonne l’action entre ministères, je contribue à l’élaboration et l’animation de la stratégie nationale de développement durable. C’est ce programme qui coordonne la politique de développement durable. Depuis 2004, de nets progrès sont constatés car plus d’un tiers des Français estiment posséder les connaissances en matière de développement durable. Il en est de même pour les collectivités locales et les autres acteurs qui affirment posséder les outils et mettre en place des politiques de développement durable.

Pour les collectivités locales nous avons développé un cadre de référence pour les Agendas 21 locaux. Pour les PME, le SD 21000 de l’AFNOR aide les entreprises à implanter leurs politiques de développement durable et de responsabilité sociétale. Cette norme induit une trentaine d’enjeux et hiérarchise les questions clefs, de façon à avoir une approche structurée et stratégique du développement durable.

Des actions collectives et des clubs de développement durable en région ont permis aux différents acteurs de s’engager concrètement dans ce mode de développement. Ce n’est plus un discours, nous avons de l’expérience. En 2000, la difficulté était l’absence de savoir-faire, maintenant il existe un réel retour d’expérience.

En quoi consistent vos actions ?

Pour les PME, l’action s’est appuyée sur des expérimentations régionales, et des animations dans les chambres de commerce. Des réseaux sont en place. Néanmoins il nous faudra sans doute mener une réflexion par filière. Mais nous jouons aussi sur la demande, par les marchés publics. En effet, nous orientons la demande publique vers le développement durable, elle représente 10 à 15 pour cent du PIB. Il s’agit de développer un modèle économique viable pour valoriser les entreprises vertueuses en développement durable.

Quels sont les résultats et les mesures primordiales du Grenelle de l’environnement ?

Maintenant les discussions sont finies, les pistes ont été lancées, nous entrons dans la phase de traduction opérationnelle. Ce rassemblement a généré une réelle émulation entre acteurs et a montré une maturité et un consensus.La question de l’environnement a progressé dans les institutions. Avant il y avait seulement un dialogue binaire entre l’économique et le social, maintenant il s’agit d’une discussion à trois avec l’environnement pour le développement durable.

Les mesures phares concernent notamment une réorientation des investissements vers les transports collectifs et les logements anciens qui eux génèrent beaucoup de CO2.Quant aux actions pour inciter les entreprises à avoir une attitude de responsabilité sociétale, elles s’inscrivent dans le cadre de la loi NRE, avec les obligations de reporting.

Les PME peuvent-elles changer leur mode de fonctionnement pour rentrer dans cette logique ?

Effectivement, il y a des contraintes fortes sur le développement en termes de ressources notamment. La gestion est obligatoire, si les entreprises mettent de coté le développement durable, elles vont se faire dépasser par d’autres qui l’auront pris en considération. Le lien entre compétitivité et développement durable existe bien. La question n’est donc pas de savoir si j’ai les moyens de faire du développement durable, mais plutôt si j’ai les moyens de ne pas m’inscrire dans ce contexte !

Le problème reste le consommateur. En effet, il se dit capable de payer plus cher un bien produit par une entreprise qui s’inscrit dans le développement durable. Cependant, quand le produit arrive en tête de gondole, l’acte d’achat se volatilise. Il existe donc un fossé entre le dire et le faire. Tout dépend de la responsabilité des consommateurs. Nous réfléchissons à ce que nous devons faire pour que ce type de produits reste accessible, comme la proposition d’une baisse de la TVA sur les produits dits « durables ».Ce qui est intéressant pour les entreprises, c’est l’évolution des coûts que nous avons constatée.

En effet, une entreprise vertueuse en développement durable utilise moins de ressources, moins d’énergie. De fait, elle gagne de l’argent. C’est pourquoi, bien gérer une entreprise vertueuse peut être plus efficace qu’une entreprise qui ne l’est pas. Un de nos objectifs, est d’amener le consommateur à raisonner sur l’ensemble du cycle de vie du produit, comme par exemple : les ampoules à basse consommation. Elles sont rentables sur le cycle de vie mais plus chères à l’achat. Sur le long terme, elles permettent une économie certaine, tant énergétique que monétaire. Pour réaliser notre objectif, la pédagogie et l’information s’avèrent nécessaires.

Y a-t-il une réflexion internationale ?

Différentes initiatives comme le Pacte mondial sur 10 principes (droit de l’homme, droit du travail, environnement et lutte contre la corruption) ou la Global reporting initiative sur les rapports de développement durable. L’ISO vient de lancer la rédaction de lignes directrices sur la responsabilité sociétale : l’ISO 26000. Cette norme touche à l’environnement mais aussi au droit du travail, à l’éthique, 80 pays y contribuent, cependant il n’y a pas de certification, pas de labellisation.

Des aides existent-elles pour la création d’entreprises dans le développement durable ?

Non, il n’y a pas d’approches spécifiques, c’est juste une prise en compte supplémentaire et plus sérieuse. Il s’agit d’une intégration dans les critères, cela permet une meilleure évaluation, Oséo et le Crédit Foncier les ont d’ailleurs intégrées.

Quels sont les conseils que vous donneriez à un jeune entrepreneur ?

Le monde qui se profile offre des opportunités. Il s’agit de trouver à travers le développement durable un nouveau créneau et une meilleure exploitation d’anciens projets ; un regard neuf pourrait prolonger leur pérennité. L’innovation principale est de passer du produit au service avec de nouveaux systèmes d’insertion, de nouveaux modèles. Ainsi, la source Internet est essentielle. Son réseau d’information est d’ailleurs le résultat d’une hybridation entre la société de connaissances et des projets concrets.

L’innovation est obligatoire car nous devons diviser notre émission de CO2 par 4 d’ici à 2050, ce qui se traduit en une baisse de 3 pour cent par an. De toute façon le changement s’effectue par l’innovation, les solutions sont complexes mais la rétribution par le service apporté est plus grande. C’est tout à fait possible pour les PME et le TPE car il existe de vraies opportunités. N’importe quelle entreprise peut faire de l’innovation, la rupture s’effectue si l’on se pose les bonnes questions. Le développement durable permet désormais d’intégrer des raretés nouvelles dans l’ensemble des métiers. Il ne faut éviter à tout prix de rester englué dans des anciennes pratiques.