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Financer sa croissance : le point de vue de Philippe Hayat

Interview de Philippe Hayat, co-fondateur de Serena Capital

Interview de Philippe Hayat, co-fondateur de Serena Capital, fonds d’investissement pour PME innovantes et de l’association 100 000 entrepreneurs.

Quelle est la différence entre les fonds d’amorçage et le financement de la croissance ?

Chercher des fonds d’amorçage lorsque l’entreprise est en phase de développement de son offre. Lorsque la société est déjà présente sur le marché, qu’elle réalise du chiffre d’affaires et qu’elle souhaite développer son activité, c’est vers les financements de croissance qu’elle se tourne. Il existe une étape entre l’amorçage et le développement, c’est le capital risque, ce que les anglo-saxons appellent le venture. Pour accéder à ce type de financements, l’entreprise doit commencer à faire un peu de chiffre d’affaires, sans pour autant être déjà rentable.

Les acteurs de ces deux types de financement sont différents ?

Oui, l’amorçage se fait en général avec des business angels ou auprès de fonds d’amorçage et le développement se fait avec les sociétés de capital développement. Les tickets moyens ne sont pas les mêmes non plus. Au niveau de l’amorçage, les tickets vont de quelques centaines de milliers à 1 ou 2 millions d’euros, tandis que pour le développement, les tickets s’élèvent à plusieurs millions.

Quel est le profil type de l’entreprise éligible à l’obtention de financements pour sa croissance ?

L’entreprise doit être déjà assez mûre, bien vendre son produit et atteindre la capacité d’autofinancement. Il faut déjà faire quand même plusieurs millions d’euros de chiffre d’affaires et avoir une position forte sur le marché. Ce n’est pas par manque de trésorerie qu’on lève des fonds de développement.

Donc les entreprises qui peuvent accéder aux financements de croissance sont celles qui n’en n’ont pas besoin finalement !?

Oui et non. En s’autofinançant ces entreprises peuvent croître, mais à vitesse réduite. L’argent du capital développement va lui servir à accélérer sa croissance, investir pour faire des pas dans son développement et gagner des parts de marché. Une société qui ne cherche pas de financements pour sa croissance peut se développer de 5 à 10 % par an. Par contre, avec du capital développement, elle peut atteindre les 20/30 et même 50 % de croissance par an.

Que peut-on financer avec le capital développement ?

Vous pouvez racheter une entreprise concurrente, un fournisseur ou une entreprise dont l’activité est complémentaire à la vôtre pour vous diversifier. Vous pouvez investir en communication et marketing afin d’accroître votre action commerciale. Il est également possible de financer ainsi des implantations à l’étranger ou en province, la fabrication de nouveaux produits

Combien de pourcentage du capital perd-on en général en finançant son développement ?

Tout dépend du montant que vous levez et de la taille de l’entreprise. En général, une société est valorisée entre 5 et 8 fois son résultat d’exploitation. à partir de la valorisation et du montant que vous souhaitez lever, vous pouvez avoir une idée du pourcentage du capital que vous pourriez perdre en levant des fonds de croissance.

Et la solution de l’entrée en Bourse ?

L’avantage d’entrer en Bourse est que ça vous donne une pub énorme, une bonne renommée sur le marché. L’inconvénient est que vous êtes soumis à de très fortes contraintes en termes d’information des actionnaires. Cela prend beaucoup de temps. L’autre point faible de la Bourse pour les PME est qu’il y a en général une très faible liquidité sur votre titre, car il y a peu d’achats et vente de vos titres. Les investisseurs ne peuvent donc pas sortir comme ils le souhaitent. Enfin, la grosse difficulté est que vos prises de décisions seront influencées par la nécessité de sécuriser le titre, sous la pression des investisseurs. Les décisions rentables à courts termes primeront sur les choix à longs termes plus favorables au développement pérenne de l’entreprise.

Peut-on s’adresser à des fonds étrangers pour financer sa croissance ?

Oui, mais il faut savoir que la France regorge de capitaux de développement ! Concernant les fonds étrangers, il faut alors privilégier les fonds issus des marchés sur lesquels vous souhaitez vous développer. Par exemple, si vous voulez conquérir le marché des États-Unis, il sera intéressant pour vous de vous adresser à un fonds américain.

Comment se faire accompagner dans sa recherche de capitaux développements ?

Je suggère de passer par des leveurs de fonds. Ils vous soulagent de tout le temps passé à structurer votre projet et à démarcher les fonds d’investissement. De plus, ces sociétés vous aident à avoir la meilleure valorisation possible parce qu’ils mettent en concurrence les fonds. Les leveurs de fonds savent également quels fonds s’intéressent à quels types de projets. Cela vous fait économiser du temps et vous fait bénéficier d’une vraie expertise sur le sujet.

3 Conseils

  1. Demandez-vous si vous avez vraiment besoin de lever de l’argent. Il faut savoir que pour une telle levée de fonds, l’entrepreneur devra travailler sur le sujet quasiment à mi-temps pendant six mois ! Beaucoup de temps perdu durant lequel on n’est pas auprès de ses clients !
  2. Privilégiez l’intuitu personae avec le financier lors du choix de votre fonds d’investissement. Il faut se demander si on se voit bien travailler avec lui. C’est plus une affaire de relations humaines que d’argent !
  3. Ne faites pas entrer trop de fonds dans votre capital. Limitez-vous à 1 ou 2 fonds maximum. Avoir trop de monde autour de la table peut paralyser les décisions.

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