Soft skills ou core skills ? Le basculement silencieux du monde du travail

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En 2025, dans les salles de réunion vitrées, les open spaces aux néons froids et les cafés où les équipes viennent débriefer entre deux réunions, un même constat revient : ce ne sont plus les technologies qui manquent, ni les outils, ni même les données. Ce qui manque, et qui fait désormais la différence entre deux candidats, deux équipes ou deux entreprises, ce sont… les compétences humaines. Celles que l’on appelait autrefois avec un léger sourire “softskills”, comme si elles étaient accessoires, secondaires, presque optionnelles.

Aujourd’hui, ces compétences deviennent la pièce maîtresse du travail moderne. On devrait même changer leur nom : non, elles ne sont plus “soft”. Elles sont stratégiques, structurantes… essentielles. De plus en plus de dirigeants les appellent désormais des core skills.

Un basculement silencieux mais irréversible

Il y a encore dix ans, dans les offres d’emploi, les soft skills n’occupaient que quelques lignes en bas de page :

  • “bon relationnel”,
  • “travail en équipe”,
  • “proactivité”.

Un peu comme on ajoute une touche de politesse à la fin d’un mail. Mais depuis la pandémie, la digitalisation accélérée, l’explosion de l’intelligence artificielle et les bouleversements du monde du travail, les entreprises ont remarqué quelque chose de simple : on peut former quelqu’un à un logiciel en trois semaines, mais pas à gérer un conflit en trois heures.

Selon un rapport du LinkedIn Workplace Learning Report 2024, 69 % des managers considèrent les compétences humaines comme plus importantes que les compétences techniques. Un autre sondage de Deloitte montre que le déficit de soft skills coûte désormais plus cher aux entreprises que le déficit de compétences techniques, notamment parce qu’il touche la cohésion d’équipe, l’innovation et la rétention des talents.

Les entreprises ont compris que si elles avaient investi pendant des années dans la performance, elles doivent désormais investir dans l’humain.

Pourquoi les soft skills deviennent des core skills ?

1. L’hyper-automatisation change la donne

Avec l’IA qui automatise des pans entiers de tâches :

  • rédaction,
  • analyse,
  • calcul,
  • gestion répétitive…

les compétences strictement techniques deviennent moins différenciantes.

Ce que l’IA ne remplace pas, ce qu’elle n’imite qu’en surface, ce qui reste profondément humain, c’est :

  • la sensibilité émotionnelle,
  • la capacité à coopérer,
  • la créativité authentique,
  • l’esprit critique,
  • l’éthique,
  • l’adaptabilité,
  • la communication claire.

Ce sont précisément les “soft skills”. Sauf qu’en réalité, ce sont les moteurs du futur.

2. Les organisations sont plus complexes qu’avant

  • Des équipes hybrides, dispersées sur plusieurs pays.
  • Des réunions en visio où les silences sont plus lourds qu’en présentiel.
  • Des projets transversaux qui s’étendent sur plusieurs métiers.

Dans ce contexte, savoir parler, écouter, négocier, rassurer ou mettre de la clarté vaut de l’or. La communication n’est plus un plus. C’est un pilier.

3. Les jeunes générations changent les attentes

La Génération Z, qui rejoint massivement le marché du travail, demande plus de sens, plus de transparence, plus de bienveillance et plus d’équité. Les managers doivent savoir :

  • fédérer plutôt qu’imposer,
  • expliquer plutôt que contrôler,
  • accompagner plutôt qu’évaluer.

Des compétences, là aussi, humaines avant tout.

4. La performance durable demande du relationnel

  • Plus personne ne veut d’un management écrasant.
  • Plus personne ne reste dans une entreprise où le climat est toxique.
  • Plus personne ne se donne à 100 % dans une équipe où il n’y a ni confiance ni reconnaissance.

Le relationnel n’est plus un supplément. C’est la condition de survie d’une organisation.

Les core skills de 2025 : ce qui fait désormais la différence

Voici les compétences humaines devenues indispensables dans presque tous les métiers.

1. L’intelligence émotionnelle

Savoir décoder ce qui se dit… et ce qui ne se dit pas. Comprendre qu’un collaborateur à cran n’est pas un problème, mais un signal. Reconnaître ses propres émotions et les gérer avec maturité.

Les leaders d’aujourd’hui doivent être aussi forts intérieurement qu’ils le sont techniquement.

2. La communication claire et courageuse

Finies les phrases compliquées, les mails de dix lignes pour un simple “oui” ou “non”, ou les non-dits qui explosent plus tard. Communiquer aujourd’hui, c’est :

  • être clair,
  • être franc,
  • être respectueux,
  • dire les choses difficiles sans blesser.

Les entreprises qui survivent à la vitesse du marché sont celles où la communication est fluide.

3. La collaboration intelligente

Travailler ensemble est devenu un sport extrême : différents fuseaux horaires, outils numériques multiples, contexte instable… La coopération demande un haut niveau de confiance et de coordination.

Ce n’est pas un “soft skill”. C’est un skill essentiel de productivité.

4. L’esprit critique dans un monde saturé d’informations

Avec l’IA générative et la quantité de données accessibles, la question n’est plus “trouver l’information”, mais “l’évaluer”. L’esprit critique est devenu une compétence stratégique.

5. La créativité comme avantage compétitif

On pensait que la créativité appartenait aux designers. Aujourd’hui, elle concerne aussi :

  • les marketeurs,
  • les ingénieurs,
  • les RH,
  • les commerciaux,
  • les dirigeants.

L’innovation commence par une idée. Une idée, c’est du 100 % humain.

6. La capacité d’adaptation

  • Changer de logiciel ?
  • Changer d’organisation ?
  • Changer de marché ?
  • Changer de stratégie ?

Cela arrive désormais toutes les 8 à 12 semaines. L’adaptabilité n’est pas une flexibilité “nice to have”. C’est la condition d’existence de toute carrière moderne.

Les entreprises qui gagnent sont celles qui misent sur l’humain

Les chiffres le confirment. Selon une étude PwC 2024, les entreprises qui investissent massivement dans les compétences humaines voient :

  •  30 % d’amélioration de la performance globale,
  • 42 % d’engagement salarié,
  • 50 % de réduction du turnover.

Et pourtant, beaucoup de dirigeants continuent à sous-estimer ces compétences, parce qu’elles semblent immatérielles, difficiles à mesurer, difficiles à standardiser. Mais ce qui est difficile à mesurer est souvent ce qui a le plus de valeur.

Vers un monde où les compétences humaines deviennent la norme

Le travail change, les métiers changent, les technologies changent. Mais une chose reste : le besoin d’humain dans l’humain.

Les entreprises de demain ne gagneront pas grâce à leurs logiciels. Elles gagneront grâce à leur capacité à devenir :

  • plus empathiques,
  • plus collaboratives,
  • plus créatives,
  • plus clairvoyantes,
  • plus humaines.

Ce ne sont pas des “soft skills”, ce sont des core skills, les compétences centrales, celles qui structurent une culture, qui font respirer une équipe, qui font avancer un projet, qui attirent les talents, et surtout : qui donnent au travail son sens. Et si, finalement, ce que l’on appelait “soft” était simplement ce qu’il y avait de plus fort ?

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