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Scandale alimentaire : comment gérer la crise ?

Un nouveau trafic alimentaire vient (encore !) d’éclater dans le Sud de la France. Il touche toujours à la traçabilité de la viande.

C’est l’occasion de rappeler, après un rapide survol des évènements, les diverses attitudes de gestion de crise qu’ont adopté l’ancienne entreprise Spanghero et ses partenaires. Défense de leur image, capacité de résilience…

Rappel très rapide des faits

Spanghero avait acheté des stocks de viande de cheval revendus comme bœuf à plusieurs entreprises, leaders de plats cuisinés en Europe via des grandes enseignes de distribution. Ses spécialités vont de la transformation de la viande à la fabrication de plats cuisinés, tout en couvrant de façon mineure le négoce de viande. C’est dans ce dernier domaine qu’elle sera poursuivie et punie d’arrêt d’activité. Elle a joué sa survie via un rachat et le licenciement de 150 employés sur les 240 en CDI à l’époque.

Réaction de Spanghero

L’entreprise, en 2011, s’était déjà fait connaître lors du retrait du marché de viande hachée contaminée par la bactérie E-coli. Quelques semaines après le scandale cheval-bœuf, des stocks de viande de mouton britannique, interdit d’importation pour risque ESB, sont découverts dans ses locaux. La confiance des consommateurs s’est effondrée. Les clients se désistent.

  • Pourtant Spanghero reste dans le déni, cherchant plus à trouver des boucs (si j’ose dire dans ce contexte) émissaires qu’à expliquer dans la transparence. C’est une attitude suicidaire qui laisse penser que cette entreprise est soit responsable, soit totalement incompétente dans la traçabilité de ses viandes.
  • En revanche, elle va agiter la carte du risque social et du licenciement des salariés dans une région au taux de chômage élevé afin de pousser le gouvernement à minimiser ses actions de régulation et de condamnation. Elle a mieux réussi dans ce bras de fer.

La suite est logique : reprise par M. Spanghero, elle change de nom (La Lauragaise) pour faire table rase de ce passé sulfureux, signe le départ de presque deux-tiers des salariés et le limogeage de la responsable qualité. En relançant ses commandes, LIDL, son principal client, redonne espoir au personnel restant. Mais la confiance du consommateur est durablement perdue pour ce type d’alimentation.

Réaction de Findus

Cette société est à l’origine de l’alerte à la fraude. Elle rappelle les produits concernés et s’exprime en premier. Elle choisit d’assumer la crise, d’y faire face et de prendre des mesures.

  • Elle réalise des tests sur 100% de ses produits, crée sur son site Internet une plateforme d’échanges avec ses clients et promet « une chaîne d’approvisionnement plus courte et transparente ».
  • Elle se positionne en victime de tricheurs, à l’image des consommateurs qu’elle défend.

Ce choix de s’exposer en premier lui a donné une image d’entreprise réactive et sérieuse, malgré les premières attaques médiatiques virulentes. Rapidement, elle n’est plus mise en cause. Et les consommateurs lui redonnent petit à petit la confiance.

Réaction de Nestlé

Cette entreprise suisse avait déjà l’expérience d’une confrontation sérieuse avec Greenpeace sur ses engagements à ne plus utiliser de l’huile de palme dans ses barres chocolatées Kit-Kat. En parallèle, ses activités dans la branche « plats cuisinés » se portaient déjà mal.

  • Elle ne retire aucun produit, considérant qu’elle n’est pas touchée par ces évènements. Les ventes chutent de 40% avant de se stabiliser.
  • Forte du RETEX Greenpeace, elle change ses modes de communication en portant l’effort sur les réseaux sociaux et l’information. La confiance revient petit à petit.
  • Elle profite de cette crise pour favoriser un rebond stratégique (doper sa compétitivité) : l’usine MAGGI de Beauvais (production de lasagnes et hachis Parmentier) sera fermée en juin 2014.

Nestlé s’est restructurée, s’est mieux fait connaître sur Internet et regagne la confiance générale sur son nom.

« Le bon général a gagné la bataille avant de l’engager » (Sun-Tzu).

Vous le savez, le plus redoutable dans ces scandales alimentaires, c’est l’impact destructeur sur l’image de l’entreprise touchée et sur la confiance des consommateurs. Ces deux points peuvent être détruits en quelques heures mais demandent plusieurs années pour se reconstruire.

Nestlé, affutée par l’expérience, s’est instantanément recentrée sur ses atouts rentables en soignant son image. En dialoguant immédiatement sur ses produits via Internet, Findus s’est positionnée comme entreprise sérieuse et soucieuse de la santé des consommateurs. Spanghero, dans le déni, s’est suicidée.

Seules les entreprises préparées à la gestion de crise peuvent limiter les dégâts, seules les entreprises proactives peuvent générer cette capacité de résilience offensive. Pensez-y.

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