Black Friday 2025 : la France entre fièvre commerciale et prise de conscience

À chaque fin novembre, la fièvre du Black Friday s’empare des enseignes et des consommateurs. Mais derrière les réductions massives et les records de ventes, le phénomène divise. En 2025, entre inflation persistante, pouvoir d’achat sous tension et enjeux écologiques, les Français abordent l’événement avec autant de prudence que de curiosité.

1/ Un rendez-vous qui s’impose… avec nuances

Né aux États-Unis dans les années 1960, le Black Friday est désormais solidement ancré dans le calendrier commercial français. Selon une étude Kantar publiée en octobre 2025, près de 7 Français sur 10 envisagent de profiter des promotions cette année, un chiffre en légère baisse par rapport à 2023 (74 %).
Les raisons ? Une fatigue promotionnelle et une méfiance croissante face aux rabais jugés parfois artificiels.

Pourtant, les enseignes continuent de miser gros. D’après le cabinet GfK, le Black Friday 2024 avait généré plus de 6,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en France, toutes catégories confondues, un record tiré par le e-commerce et l’électronique. En 2025, les distributeurs s’attendent à un léger ralentissement, mais espèrent un rebond grâce à la stabilisation de l’inflation et à l’amélioration du moral des ménages au second semestre.

2/ Le pouvoir d’achat, arbitre du jeu

Le Black Friday tombe cette année dans un contexte où le pouvoir d’achat reste la première préoccupation des Français. Selon une étude de l’Observatoire Cetelem (septembre 2025), 62 % des ménages déclarent avoir réduit leurs dépenses non essentielles depuis un an.
Pour beaucoup, le Black Friday devient donc un moyen de planifier des achats “utiles”, notamment en prévision de Noël : électroménager, produits tech, mode ou jouets.

Les grandes plateformes, comme Amazon, Cdiscount et Fnac-Darty, ont d’ailleurs adapté leurs offres en conséquence. “Les consommateurs recherchent désormais la durabilité et la fiabilité autant que le prix”, note une analyse de NielsenIQ. En clair : la course à la plus grosse remise cède peu à peu la place à une recherche de “bons achats” plutôt que de “bonnes affaires”.

3/ Le revers de la médaille : l’empreinte écologique

Face à la déferlante promotionnelle, la contestation gagne du terrain. Depuis trois ans, le mouvement #MakeFridayGreenAgain, initié par le collectif En Mode Climat, ne cesse de prendre de l’ampleur. En 2025, près d’un tiers des marques françaises de mode ont choisi de ne pas participer au Black Friday, selon un sondage IFM-Première Vision.

Les enjeux environnementaux deviennent centraux. Selon l’ADEME, les ventes en ligne du Black Friday génèrent chaque année plus de 1,2 million de tonnes de CO₂ équivalent en France, en comptant les livraisons express et les retours.
Certaines enseignes, comme Decathlon ou Nature & Découvertes, proposent désormais des alternatives : réparations, reconditionné, dons à des associations.

“Le Black Friday n’est plus seulement un temps fort commercial. C’est devenu un marqueur sociétal : il révèle notre rapport à la consommation”, observe la sociologue Nathalie Damery, cofondatrice de l’Observatoire Société & Consommation.

4/ L’e-commerce reste roi, mais les magasins se défendent

En 2025, près de 75 % des achats du Black Friday en France devraient se faire en ligne, selon la Fevad. Les grands sites misent sur la logistique et les livraisons rapides, tandis que les magasins physiques cherchent à reconquérir le terrain.
Certaines enseignes ont décidé de jouer la carte de l’expérience client : animations, offres exclusives en boutique, ou ventes privées avant le jour J.

Le commerce de proximité n’est pas totalement exclu du mouvement. Des initiatives locales, notamment à Lille, Lyon ou Nantes, ont lancé des “Green Friday” ou “Local Friday”, invitant les consommateurs à soutenir les artisans et les producteurs régionaux.

5/ Un baromètre de la consommation française

Le Black Friday 2025 agit comme un miroir : il reflète l’état d’esprit d’une société en transition. Les Français veulent profiter, mais sans excès. Acheter malin, mais pas à tout prix.
Pour les marques, le défi est clair : réconcilier pouvoir d’achat, transparence et responsabilité.

Selon une étude récente de Deloitte, 56 % des consommateurs français déclarent être prêts à payer un peu plus pour un produit durable ou local, même pendant le Black Friday. Un signe que la frénésie des soldes pourrait peu à peu laisser place à une consommation plus raisonnée.

Le Black Friday reste une fête commerciale incontournable, mais il n’a plus la même saveur qu’il y a cinq ans. En 2025, la France avance à deux vitesses : entre ceux qui voient dans ces promotions une bouffée d’air pour leur budget, et ceux qui y lisent les excès d’un modèle à bout de souffle.
Une chose est sûre : le consommateur français est devenu plus conscient, plus exigeant et peut-être un peu plus sage.

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