Entretien exclusif avec Maxime Valette, créateur du site Internet humoristique Vie de merde.
Comment vous est venue l’idée du site Vie de merde (VDM) ?
Avec Antoine, mon associé de l’époque, nous avions l’habitude de nous envoyer chaque jour des petites anecdotes de mésaventures drôles qui nous étaient arrivées. Nous terminions nos messages par VDM (pour Vie de merde). C’était un délire entre nous qui a duré plusieurs mois. Et puis un jour, nous avons eu l’idée de rassembler toutes nos anecdotes sur un blog pour les partager à nos amis. Comme ça les a fait marrer, ils en ont parlé à leurs potes. Là, les gens ont pensé que c’était un forum et ils ont commencé à nous envoyer eux aussi leurs anecdotes de vie de merde… et tout s’est enchaîné. Nous avons créé un site, alors qu’à la base ce n’était absolument pas notre objectif. La demande était telle que nous avons dû transformer le blog en site participatif seulement deux semaines après le lancement.
VDM était-elle votre première boîte ?
Non, j’ai monté ma première entreprise quand j’étais encore au lycée. J’ai revendu cette boîte au moment de passer mon bac avant de créer avec mon associé une autre entreprise, Beta&Cie, qui gère aujourd’hui VDM. Notre objectif était de lancer des sites Internet et nous recherchions donc des idées. Pour cela, dès que nous avons senti que VDM commençait à bien prendre, nous nous sommes lancés à fond dessus. Pour nous, VDM était surtout une grosse blague… nous étions vraiment loin de penser que ça cartonnerait !
Comment expliquez-vous le démarrage rapide de VDM ?
C’est vrai que tout est allé très vite. En trois mois, nous faisions déjà 200 000 visites par mois, sans avoir diffusé de publicité ! 5 ans après, nous sommes à 3,5 millions de visites par jour, tous pays confondus. Nous sommes le premier site de divertissement en termes de pages vues en France. Je pense que ce qui a bien aidé est que nous nous sommes tout de suite mis sur Facebook. Le développement a été très viral, les gens en ont parlé autour d’eux, et notamment sur ce réseau social. Autre facteur : le succès des relations presse. Les médias ont très vite parlé du site car le nom avait un côté décalé qui leur a bien plu. Ils savaient qu’en mettant « vie de merde » dans un titre, les gens allaient forcément avoir envie de lire. Ça nous a énormément aidés…
Justement, le nom du site vous a-t-il posé des problèmes parfois ?
Oui et non. Lorsque nous nous sommes lancés, les régies publicitaires nous mettaient en garde en nous disant que « vie de merde » c’était peut-être un peu limite pour les annonceurs qui risquaient d’être refroidis. Ils nous ont dit « on va essayer de vendre vos espaces publicitaires, mais on ne vous garantit rien ! ». Or, justement les annonceurs ont été séduits par le positionnement décalé du site. Face à des personnes comme les banquiers, c’est vrai que le nom aurait pu nous porter préjudice, mais nous étions connus d’eux par la dénomination de la maison-mère de VDM, Beta&Cie, donc il n’y a pas eu de problèmes. Aujourd’hui, le nom « Vie de merde » est très populaire et c’est devenu plutôt un atout pour nous.
Sur quoi repose votre business model ?
Nous essayons de multiplier au maximum les sources de revenu. Nous avons d’abord commencé par diffuser de la publicité sur notre site Internet, car c’était le moyen le plus simple de le rentabiliser. Dès que nous avons atteint les 100 000 visites par jour, nous avons contacté une régie publicitaire. Nous avons vendu des bannières puis des opérations spéciales pour des sorties de films notamment. En ce qui concerne ce type de partenariats, nous ne choisissons que des bons films qui correspondent à l’esprit de VDM, quitte à en refuser certains et gagner moins d’argent. Puis nous nous sommes lancés dans la vente de produits dérivés en tous genres. Nous avons ainsi édité des livres reprenant les meilleures histoires de VDM. Ces livres ont très bien fonctionné : nous avons ensuite décliné le concept sous forme d’agendas, puis de bandes-dessinées. Nous avons vendu plus de 700 000 exemplaires en tout pour l’ensemble de nos ouvrages papier. Les droits d’auteur ne nous font pas gagner énormément, mais la vente des livres contribue énormément à faire connaître le site Internet. Dernier projet en date : en septembre, une mini-série VDM en format court sur NT1. Il y a déjà 60 épisodes de 5 minutes qui vont être diffusés.
Le site Internet cartonne aussi à l’étranger ?
Oui, et surtout en Angleterre où sa version Fuck my life fait des records d’audience. La page Facebook de Fuck my life était la première fan page anglaise à atteindre le million de fans ! Les livres VDM sont également sortis en anglais et se vendent très bien. Nous avons aussi lancé le site Internet dans une dizaine d’autres pays. Parfois ça n’a pas pris car le concept ne correspondait pas réellement à la culture locale. Mais dans des pays comme l’Indonésie, il se développe très rapidement. Nous lançons les sites étrangers sous forme de franchise, sauf pour les sites Internet en langue anglaise où nous gérons tout de A à Z.
Quels sont vos nouveaux projets entrepreneuriaux ?
Nous sommes en train de développer un nouveau site, mais je ne peux rien dire pour l’instant ! Sinon nous avons créé en interne notre propre régie publicitaire qui gère la publicité du site Internet VDM. Cette régie s’occupe maintenant d’autres sites dans le même esprit que VDM : les applications de Norman ou de Cyprien par exemple.
Quel est votre plus grand plaisir dans cette vie d’entrepreneur ?
C’est de pouvoir travailler de chez moi, à Reims ! C’est mon petit luxe d’entrepreneur ! Pour travailler, j’ai besoin de beaucoup de concentration et j’aurais beaucoup de mal à travailler dans un bureau, en étant dérangé toutes les deux minutes. Chez VDM, tout le monde travaille d’ailleurs de chez soi. Nous venons tout juste de prendre nos premiers locaux, 5 ans après le démarrage de l’entreprise !