De l’intérêt de la saisie-contrefaçon

La saisie-contrefaçon fait l’objet de nombreux débats. Les produits saisis circulent déjà depuis un certain temps. Des contrefaçons sont si « parfaites » qu’il est difficile pour les clients de détecter le vrai du faux.

Si la preuve des actes de contrefaçon peut être rapportée par tous les moyens du droit commun (Cass. civ, 30 mai 1927, Ann. propr. ind. 1928.33), le titulaire de droits, victime d’actes de contrefaçon aura tout intérêt à utiliser la voie d’exception offerte par le Code de la Propriété intellectuelle qu’est la saisie-contrefaçon. Cependant, cette voie n’est nullement un préalable obligatoire à l’action en contrefaçon.

Une voie d’exception

Il s’agit bien là d’une voie d’exception. Elle vient quelque peu tempérer le principe français selon lequel il incombe au demandeur de faire la preuve de ses prétentions (Selon l’article 1315 du Code civil, « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver »). Celle-ci lui sera utile pour éviter la carence d’éléments rapportant la preuve de la matérialité de la contrefaçon, c’est-à-dire de la « masse contrefaisante », dans l’optique de démontrer l’importance du préjudice subi au titre du gain manqué.

Les conditions de l’action

Toute personne disposant du droit d’agir en contrefaçon peut demander au Tribunal de Grande Instance compétent, par requête, l’autorisation de pratiquer la saisie-contrefaçon. Lorsqu’elle est accordée, la saisie-contrefaçon donne lieu à une « saisie description » et éventuellement à une « saisie réelle », ce que le magistrat précise.

Dans le cadre d’une saisie description s’accompagnant d’une saisie réelle, la saisie portera sur un échantillon des objets contrefaisants eux-mêmes. Mais aussi sur les instruments qui ont servi à leur fabrication. La question s’est posée de savoir si l’huissier instrumentaire (ou le commissaire de police) pouvait également saisir des documents commerciaux afin d’établir l’étendue de la contrefaçon alléguée.

La réponse de la jurisprudence

Après quelques hésitations, la jurisprudence s’est fixée sur une réponse affirmative à cette question. L’opération de saisie-contrefaçon peut donc porter sur des documents commerciaux, par exemple des documents comptables. (Paris, 6 fév. 2004, Société Diramodic c./ Sté RB Fashion et Toboggan, PIBD 2004, 791-III-461 admet que « la matérialité de la contrefaçon porte nécessairement sur l’étendue de celle-ci »). L’avantage de cette solution est d’éviter que de telles preuves ne disparaissent par la suite. Elle permet éventuellement de faire l’économie du recours à une expertise in fine.

Aujourd’hui cette possibilité ne saurait être remise en question. En effet, la loi du 29 octobre 2007 de « lutte contre la contrefaçon », transpose la directive communautaire du 29 avril 2004. Elle a en effet ajouté aux « produits ou procédés prétendus contrefaisant » pouvant faire l’objet d’une saisie réelle « tout document s’y rapportant ».

En conclusion

Le titulaire d’un droit de propriété intellectuelle, victime d’actes de contrefaçon trouvera donc dans la saisie-contrefaçon une occasion de se constituer de solides preuves. Il devra démontrer son gain manqué. Ainsi, son étendue (évaluation de la masse contrefaisante), le prix des produits contrefaisants. Mais également dans une certaine mesure la perte subie. Par exemple la piètre qualité d’un produit contrefaisant peut déprécier une marque ou un produit breveté… Une utilisation plus systématique de cette voie permettrait sans doute d’étayer les demandes de dommages et intérêts. Elle offrirait ainsi aux magistrats matière à indemniser.

Le demandeur devra cependant être diligent. La recevabilité de telles preuves est soumise à un délai pour introduire l’action en contrefaçon. Elle compte depuis l’exécution de la saisie, soit à compter de la date figurant sur le procès-verbal.

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