Interview de Charles Lahmi, Fondateur de LuluCastagnette

Interview de Charles Lahmi, le fondateur de la marque à l’ours en peluche LuluCastagnette. Avec un logo et un nom atypiques, il a réussi à imposer une marque toujours performante plus de 15 ans après sa création.

Quel a été votre parcours jusqu’à la création de LuluCastagnette ?

J’ai été fabricant de prêt-à-porter pendant 16 ans. Je vendais des vêtements sans marques qui étaient logotisés ensuite par les enseignes qui me les achetaient. Puis, en 1996, j’ai décidé de se différencier par rapport au marché en créant ma propre marque.

Et comment est née cette marque ?

J’ai lancé une collection dans laquelle se trouvait un modèle de tee-shirt avec un ourson en peluche sérigraphié dessus. Ce produit a rencontré un succès immédiat, à tel point que j’ai décidé de faire de cet ourson le logo de ma marque. Ce tee-shirt, j’en vendais 10 fois plus que les autres. On a senti qu’il se passait quelque chose avec cet ourson, alors on a décidé d’en faire le cœur de la marque. L’association de l’image de l’ours en peluche qui donne un caractère très affectif avec le nom ludique « LuluCastagnette » a fait démarrer tout de suite la marque. L’alchimie a très bien fonctionné. Bien sûr, c’est aussi la qualité des produits qui nous a fait rapidement connaître.

Justement, d’où vient ce nom très atypique pour une marque ?

Je suis depuis toujours un aficionado de Gainsbourg. Et, quand je l’ai vu faire monter son tout jeune fils Lulu sur la scène du Casino de Paris, j’ai trouvé ça vraiment très touchant ! Mais le nom Lulu tout seul ne fonctionnait pas. J’ai décidé d’apposer le mot Castagnette pour « réveiller » le nom de la marque ! Ce qui est drôle, et qui n’était pas voulu au départ, c’est que LuluCastagnette est devenu le nom du petit ourson du logo.

La marque a donc connu un succès très rapide ?

Oui, l’année du lancement de LuluCastagnette nous avons réussi à faire 1 million d’euros de chiffre d’affaires et l’année d’après nous en faisions déjà 5 ! Nous avons rapidement ouvert des boutiques et des corners en France comme à l’étranger. Puis nous avons signé quelques accords de licence pour l’utilisation de la marque sur d’autres types de produits que des vêtements. La croissance a été constante pendant 10 ans et en 1996 nous avons atteint les 40 millions de chiffre d’affaires.

A partir de là, la croissance de la marque a connu un ralentissement ?

Oui, nous avons connu une érosion de notre chiffre d’affaires. J’ai alors pris la décision de changer complètement le modèle économique de l’entreprise. Nous avons stoppé la fabrication en direct pour nous tourner exclusivement vers la licence. Nous avons augmenté les gammes de produits pour que LuluCastagnette soit plus qu’une marque de vêtements. Désormais elle est présente sur beaucoup d’autres segments comme la bagagerie ou la parfumerie. C’est devenu une marque univers et style de vie. Un choix risqué mais qui a payé ! La force de la marque m’a permis d’élargir ce portefeuille de licence assez facilement et de basculer vers un modèle économique qui nous faisait renouer avec la croissance. Autre avantage, ce changement de modèle nous permettait de lisser les risques de l’entreprises : nous n’étions désormais plus uniquement liés à l’industrie textile et à ses fluctuations.

LuluCastagnette a beaucoup marqué l’époque des années 90/2000. N’avez-vous pas peur que la marque se démode ?

Non, car aujourd’hui les chiffres nous montrent le contraire ! Nous faisons plus de chiffre d’affaires aujourd’hui que quand la marque était le « must have » de toutes les jeunes filles. Je pense que la marque a réussi à devenir transgénérationnelle car elle n’est pas liée aux tendances de la mode.

Vous possédez encore aujourd’hui 100 % du capital. Comment avez-vous fait ?

Si j’ai pu garder 100 % du capital c’est grâce à notre nouveau modèle économique qui n’est pas consommateur de capitaux. Et puis l’entreprise avait des fonds propres assez élevés qui permettaient une restructuration sans besoins de capitaux extérieurs. Donc nous n’avons jamais eu besoin de faire de levées de fonds, alors même qu’au départ nous avons lancé la marque avec aucuns capitaux !

15 ans après sa création, vous gardez le même enthousiasme pour développer la marque ?

Oui, toujours ! Le moteur qui me fait avancer est de prendre du plaisir au travail. C’est vrai qu’en 2006, j’étais arrivé à un point où je ne prenais plus vraiment de plaisir à développer Lulu : ma vie était uniquement rythmée par des soucis à gérer dans l’entreprise. Le changement de modèle économique m’a permis de prendre de nouveau beaucoup de plaisir dans mon travail et d’être plus performant. Ce changement a eu un impact dans ma manière d’être et dans ma vie.

Il y a-t-il une entreprise qui vous inspire pour développer LuluCastagnette ?

Ce serait une association de Ralph Lauren et de Petit Bateau ! Ralph Lauren pour son dynamisme exemplaire, son modèle de distribution et pour la justesse des produits. Petit Bateau pour cette marque très ancienne qui a su garder ses fondamentaux tout en évoluant constamment. C’est remarquable !

Un conseil pour les entrepreneurs ?

Il faut prendre des risques ! Et, lorsqu’une porte s’entrouvre, il faut foncer ! C’est très rare qu’une porte s’entrouvre, alors quand cela arrive, il faut l’ouvrir à fond ! Même si l’on se plante, on n’aura aucun regret, il n’y aura pas de « j’aurais dû ». Le « J’aurais dû » est un sentiment terrible !

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