L’approche SynOpp : la fin du business plan ?

Le business plan serait-il en passe de devenir ringard ? C’est en tout cas ce que semblent penser nos amis start-uppers outre-Atlantique, qui qualifient l’exercice de « psychorigide ultra théorique », totalement inadapté à notre société hyperactive. Quid d’un éventuel successeur ? C’est là qu’intervient Claude Ananou, serial entrepreneur et professeur à HEC Montréal. Sa vision de la création d’entreprise renverse les mentalités établies. L’approche SynOpp est née. Elle va peut-être tout changer…

LE BUSINESS PLAN SEMBLE OBSOLÈTE

Quel entrepreneur n’a jamais angoissé à l’idée de devoir rédiger son fameux business plan ? Le document, conçu pour rassurer les financeurs, est censé prédire l’avenir d’une entreprise, à partir de variables passées, dans un présent en constante mutation. « Un schéma impossible », affirme Claude Ananou, qui reproche également au business plan son aspect long et conceptuel, alors que la création d’entreprise devrait d’abord être une affaire de terrain et de réajustements quotidiens.

DEVENIR ENTREPRENEUR EN ENTREPRENANT

C’est en forgeant que l’on devient forgeron. C’est donc en entreprenant que l’on devient entrepreneur ! Voilà les fondamentaux de l’approche SynOpp, développée en 2007 par une équipe de passionnés de l’entreprise : Claude Ananou donc, mais aussi Louis Jacques Filion et Christophe Schmitt. « Syn » pour « sun », en grec, qui veut dire « avec » ou « ensemble » et « Opp » pour « opportunités ». Avec l’approche SynOpp, c’est l’entrepreneur, et non le marché, qui crée l’entreprise. L’entrepreneur avec ses points forts et ses points faibles, l’entrepreneur avec sa propre perception du besoin à combler, l’entrepreneur dans un environnement donné, à un instant T.

À chaque entrepreneur correspond une vision qui va le conduire à une série de réflexions, de prises de décisions et d’actions, ce que Claude Ananou appelle « RDA » (réflexions, décisions, actions).

De RDA en RDA, le projet prend forme. Les interactions sur le terrain (rencontre avec les futurs clients, découverte de son environnement …), les ressentis et les aspirations propres à l’entrepreneur sont consignés dans un journal de bord. Au final, il dispose de suffisamment de recul pour valider la rentabilité de son entreprise à venir.

L’approche SynOpp repose bel et bien sur une démarche itérative, alors que le business plan pousse à réfléchir d’abord pour agir ensuite… Et peut-être trop tard !

L’APPROCHE SYNOPP : LES QUESTIONS CLÉS

L’approche SynOpp replace nos entrepreneurs au cœur du projet de création d’entreprise. Point de business plan, mais un minimum de méthodologie pour ordonner ses démarches. Ainsi, l’approche SynOpp propose 7 étapes, à valider en appliquant le procédé « RDA » pour chacune d’entre elles. Vous allez le constater, elles rejoignent la philosophie du business plan, mais elles sortent de son cadre formel. Ainsi, l’entrepreneur doit se demander :

  1. Quel est le besoin à combler ?
  2. Quel est le segment de clientèle le plus à même de consommer : son profil, ses habitudes ?
  3. Quels sont ses avantages concurrentiels ?
  4. Le projet est-il viable ? Pourquoi ?
  5. Quelles sont les incertitudes et quels sont les risques liés au développement du projet ?
  6. Quel est le point de départ du projet, sa version la plus simple pour démarrer ?
  7. Quel est le plan d’action pour développer le projet ?

Ajoutez à ce plan des interrogations plus personnelles, comme savoir quelle sera la porte de sortie en cas d’échec, quel risque maximum l’entrepreneur est prêt à encourir, quelle opportunité ou coup du destin serait à même de propulser l’entreprise vers le haut ou vers le bas, et vous obtiendrez ainsi une approche complète de la création d’entreprise, ouverte au terrain.

Vous l’avez compris, l’approche SynOpp permet la construction d’un projet au fur et à mesure, par l’observation, l’action et la rétroaction. Elle remet en question la philosophie du business plan basée sur une vision binaire : un temps pour réfléchir, un temps pour agir. Elle semble beaucoup plus adaptée aux contraintes actuelles de notre société. Alors que les startuppers nord-américains plébiscitent l’approche SynOpp, nos traditionnels financeurs y sont encore réfractaires. Connaître son seuil de rentabilité, anticiper des scénarii et valider son marché par des études macro et micro économiques sont encore d’actualité sur notre bon vieux continent… Affaire à suivre !

Article par Claude Ananou, serial entrepreneur et professeur à HEC Montréal

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