
A l’occasion d’une récente interview, le Premier ministre a estimé qu’il fallait simplifier les formalités auxquelles sont soumises les PME en supprimant l’obligation de publication des comptes. Aussitôt après cette annonce, nombre de contributeurs ont pris la plume pour stigmatiser l’idée, rappelant que la simplification n’était ici que virtuelle, tant il est vrai que cette formalité ne relève pas d’une contrainte pour les PME qui l’externalisent en règle générale.
C’est bien plus la portée de cette annonce qui peut agiter car lorsque l’on propose de supprimer l’obligation de publication des comptes, ce qui ne supprime pas l’obligation d’établir ses comptes, vise-t-on le dépôt au greffe ou la publication par le greffe ?
Des échos très variés ont répondu à cette question et nombreux sont ceux qui y voient la fin du dépôt des comptes au greffe du tribunal de commerce, et par voie de conséquence de leur publicité. En effet, en l’état actuel du droit, la notion de publication englobe le dépôt qui en est le préalable nécessaire, d’où la confusion à l’écoute de cette annonce.
Sans sémantique inutile mais au contraire en interrogeant les services ministériels concernés, il semble bien que l’obligation de dépôt des comptes soit maintenue, car elle sanctionne l’obligation de tenir ses comptes en ouvrant au président du tribunal de commerce la faculté d’y contraindre le chef d’entreprise, voire de lui substituer un tiers pour y pourvoir en ses lieux et places.
C’est donc la publicité que le greffe assure après ce dépôt qui serait supprimée : l’annonce de publication au BODACC et la consultation par Internet ou sur commande.
Or certaines entreprises se dispensent déjà aujourd’hui de cette formalité, dont la sanction reste faible avec une amende de 1 500 €, préférant la discrétion pour se dissimuler des vues de leurs concurrents voire pour jeter un voile sur les difficultés financières rencontrées.
Supprimer l’obligation de publier les comptes permettrait alors à ces entreprises de rentrer dans la légalité en assurant le dépôt de leurs comptes tout en restant dans l’ombre faute de publicité.
Mais à cet avantage certain répond un inconvénient majeur : le défaut de publication est actuellement interprété négativement par les partenaires économiques, notamment les fournisseurs et les financiers.
Dans toute enquête de solvabilité, le défaut de publication entraine une note négative de défiance pouvant avoir pour conséquence la perte d’un marché voire le retrait du crédit fournisseur.
Espérons dès lors que la publication par le greffe reste une faculté si cette mesure devenait effective pour permettre aux entreprises de maintenir une transparence sur leurs comptes à l’égard de leurs partenaires. Car avant de voir un intérêt à cette simplification qui n’en est pas une, les PME doivent voir le vrai enjeu qu’est l’accès au financement dans une période tendue où la couverture du BFR est essentielle.
Ainsi, le meilleur conseil qui puisse être raisonnablement donné est de continuer à publier les comptes (à l’exception des marchés très spécifiques) pour donner des gages à l’extérieur.