Résiliation du bail commercial : prendre ses précautions

Le bail commercial est régi par un statut particulier, issu du décret n°53-960 du 30 septembre 1953, de sorte que toute analogie avec le bail d’habitation doit, par principe, être écartée.
Le chef d’entreprise ou le commerçant qui souhaite mettre fin au bail commercial, quelle qu’en soit la raison, doit veiller à respecter une procédure spécifique dictée par le code de commerce au risque de voir le bail continuer avec toutes les conséquences que cela entraîne (paiement des loyers, obligation d’entretien des locaux, participation aux charges de copropriété, etc.).
Bien que le bail commercial soit conclu pour une durée minimum de neuf années, le locataire a la possibilité de donner congé, sans motif particulier, tous les trois ans, d’où l’expression couramment utilisée « bail 3,6,9 ».
Autrement dit, le locataire peut donner congé, aux années n+3, n+6 et n+9. 
Il ne peut le faire à aucun autre moment, d’où l’intérêt de s’assurer de la validité du congé.

1. Un acte d’huissier est-il obligatoire ?

Le congé doit obligatoirement être délivré par un Huissier de Justice.
Tout autre moyen pourrait porter à contestation : le congé adressé au bailleur par lettre recommandée ou par lettre simple pourrait ne pas être pris en compte : il vaut donc mieux jouer la prudence même si les recommandations sur le site du service public indiquent qu’il est possible de l’envoyer par lettre recommandée.
Cependant, les tribunaux ont admis dans certains cas que la remise des clefs acceptée par le bailleur pouvait produire les effets d’un congé, bien que la règle formelle n’ait pas été appliquée.
Il s’agissait alors de circonstances particulières à l’occasion desquelles le bailleur reconnaissait de manière non équivoque la validité du congé et acceptait le départ du locataire. Renonçant ainsi à toute contestation postérieure. Mais la jurisprudence est exigeante et incertaine sur ce point de sorte qu’il est toujours préférable de respecter la procédure requise par la loi.

2. Un délai de préavis de six mois doit être respecté

• Le congé donné en cours de bail :

Le locataire qui souhaite mettre fin au bail et quitter les locaux pour les échéances n+3, n+6 ou n+9 doit faire délivrer le congé en respectant un délai de préavis de six mois.
Le congé doit mentionner clairement la date pour laquelle il est donné.
La date de fin de bail correspond alors à l’expiration d’une période triennale : si le bail a démarré le 1er février, il se terminera le 31 janvier. Le congé devra avoir été notifié au plus tard le 31 juillet précédant.

• Le congé donné après la fin du bail :

A l’issue des neuf années du bail, et si aucune des parties ne se manifeste, le bail se poursuit tacitement à durée indéterminée.
Chacune des parties peut alors y mettre fin à tout moment.
Dans ce cas, le congé devra être donné avec un préavis de six mois augmenté du temps nécessaire pour atteindre la fin du trimestre civil : le congé délivré le 5 mars mettra fin au bail le 31 septembre.

• Le congé donné pour un départ à la retraite ou en cas d’une pension d’invalidité :

Le locataire part à la retraite ou Le locataire qui part à la retraite ou qui bénéficie d’une pension d’invalidité peut donner congé à tout moment, en respectant un préavis de 6 mois avant la date prévue pour la restitution des locaux.
La demande de congé peut être faite par lettre recommandée avec avis de réception ou par acte d’huissier.
En cas de congé irrégulier, le bail continue et le locataire est tenu au paiement du loyer.
Si le locataire reste dans les lieux après la date d’effet du congé, il peut être considéré comme ayant renoncé au congé délivré.
Le décès du locataire n’entraîne pas automatiquement la résiliation du bail, sauf si le contrat de bail le prévoit.
Le contrat de bail est transmis aux héritiers. C’est à eux de le résilier, dans les mêmes conditions que la résiliation opérée par le locataire qui part à la retraite ou qui bénéficie d’une pension d’invalidité

3. Quel est le destinataire du congé ?

Le congé doit être délivré au bailleur, c’est-à-dire le propriétaire du local.
Ce principe subsiste même en présence d’un gestionnaire ou d’une agence en charge de l’immeuble. En effet, le congé qui serait délivré à une personne non habilitée à le recevoir pourrait être entaché de nullité, tandis que le congé délivré au propriétaire sera toujours valable.
En cas de pluralité de propriétaires, le congé devra être délivré à chacun d’eux.

4. Attention à l’état de restitution des locaux :

Le locataire doit être particulièrement attentif à ce que prévoit le bail quant à l’état de restitution des locaux.
La restitution « en bon état » correspondra à un état d’usage tenant compte de la durée de l’occupation, les locaux devant être « entretenus » (rebouchage des trous, nettoyage des taches, etc.) tout au long du bail.
La restitution « en parfait état » correspond au contraire, à un état quasi-neuf.
Les bailleurs sont souvent tentés de conserver le dépôt de garantie, d’autant plus qu’aucune loi ne prévoit de délai pour sa restitution (contrairement au bail d’habitation).
Il est donc conseillé aux locataires de faire une visite des locaux dans un délai suffisant avant la restitution définitive des clefs, en présence du bailleur ou de son représentant, pour faire un état des lieux et lister les éventuelles réparations et remises en état à effectuer avant de rendre les locaux. Et de se prémunir contre une éventuelle retenue abusive de tout ou une partie du dépôt de garantie.

Article par Morgane Deniel

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