Devenir le numéro un dans les services numériques, Thibault Lanxade

Thibault Lanxade, président-directeur général du Groupe Luminess

Créateur d’entreprises et d’associations, ancien vice-président du Medef, auteur d’ouvrages sur la thématique, Thibault Lanxade cultive, depuis une vingtaine d’années, une véritable passion pour l’entrepreneuriat. À 47 ans, il s’est lancé un nouveau défi en reprenant les rênes de Jouve, spécialisé dans les services numériques pour les entreprises et institutions. Son objectif : faire du groupe le leader de son secteur.

Qu’est-ce qui vous a donné cette envie d’entreprendre ?

Après un master, j’ai travaillé pendant plus de dix ans au sein de l’entreprise pétrolière, Shell. J’ai commencé en tant que chef de secteur et deux ans plus tard, j’étais promu secrétaire général et directeur des opérations d’une des filiales du groupe. Je régissais l’ensemble des stations du réseau autoroutier pour la société. J’ai réalisé plusieurs fusions-acquisitions pour le groupe Shell et géré, pendant quatre ans, l’une de ses entreprises, Gazinox (leader sur le marché des tuyaux et accessoires pour le gaz depuis 1993, ndlr). Cette expérience m’a donné le goût de l’entrepreneuriat.

Comment en êtes-vous arrivé à reprendre le groupe Jouve ? Et quel est son concept ?

À la suite du départ du précédent dirigeant, les administrateurs m’ont demandé spontanément de reprendre le groupe. C’était, pour moi, une surprise. Dirigeant de deux autres entreprises, dont une que j’ai revendue, il m’a fallu plusieurs jours pour m’organiser. Cette mission représentait un véritable challenge. Je devais conduire la transformation de l’entreprise et accélérer sa croissance. Je suis maintenant à la tête de Jouve depuis plus d’un an. Le groupe est une entreprise de services numériques qui propose également des services d’impression. Si, depuis sa création en 1903, Jouve continue d’imprimer des livres, l’entreprise a su opérer sa transformation digitale et se diversifier dans les services numériques : BPO (Business Process Outsourcing, soit l’ « Externalisation des Processus d’Affaires », en français, ndlr) et création d’expériences digitales. Aujourd’hui, Jouve compte 2 000 salariés et près de 450 clients, essentiellement des ETI (Entreprises de Taille Intermédiaire), des grands groupes, des organisations du service public mais aussi quelques PME. Côté chiffre d’affaires, on a atteint les 100 millions d’euros.

Qu’est-ce qui vous a conduit à fonder plusieurs entreprises depuis 2008 ?

J’ai souhaité racheter et gérer l’entreprise Gazinox. J’avais réalisé le montage financier de la reprise et mobilisé des équipes clés pour m’accompagner dans cette aventure. Malheureusement, les actionnaires n’ont pas réussi à se mettre d’accord. Malgré cette décision, je savais que j’avais attrapé le virus de l’entrepreneuriat. Avec un associé, nous avons alors fondé en 2008, Aqoba, première société agréée comme établissement de paiement grâce à une nouvelle directive européenne. Nous l’avons ensuite revendue à Edenred en 2013, premier acteur des titres restaurants. Fort de cette vente, j’ai créé, un an plus tard, une autre société, AlgoLinked, spécialisée dans l’univers du numérique, qui permet de digitaliser l’ensemble des processus de relations presse. Celle-ci se trouve, aujourd’hui, entre les mains de mon associé qui poursuit son développement.

Comment percevez-vous le marché des services numériques ? Et en quoi Jouve se distingue-t-il de la concurrence ?

Le marché des services numériques est en constante évolution ! Une multitude de start-up ne cessent d’innover et de proposer de nouveaux services ou modèles économiques, dont certains disruptifs. Les entreprises doivent constamment se réinventer. Dans ce marché concurrentiel, nous devons agréger tous ces savoir-faire, être toujours plus agiles, audacieux et innovants. Apporter une solution globale n’est désormais plus d’actualité, il faut aujourd’hui disposer de ressources extrêmement pointues et répondre aux demandes spécifiques des clients. Sur ce sujet, Jouve apporte des solutions innovantes notamment sur les processus d’identification de flux entrants et de vérification d’identité lors des ouvertures de comptes au sein d’une banque ou d’une compagnie d’assurance. Grâce à ses technologies de reconnaissance de documents et d’intelligence artificielle, elle peut accélérer le parcours de vente de produits complexes. Jouve a également une agence digitale, experte dans la conception UX-UI, le développement d’applications natives et sites responsive. Enfin, le groupe dispose d’une vision européenne et mondiale grâce à sa présence à l’étranger notamment en Allemagne, en Serbie, aux Pays-Bas et aux États-Unis.

Parlez-nous de votre engagement au sein du Medef…

En parallèle de ma vie professionnelle, j’ai toujours voulu m’engager pour la cité. En tant que délégué pétrolier auprès de la préfecture de la Meurthe-et-Moselle (département situé en Lorraine, ndlr), j’ai aidé bénévolement le préfet en ce qui concerne l’approvisionnement et la gestion des stocks de carburant. J’ai écrit plusieurs ouvrages comme « Génération 35 heures » qui revient sur la génération Y et sa relation par rapport au travail. Le livre rencontrant un certain succès, j’en ai édité un deuxième, « Jeunes et Entreprises : réussir la connexion » qui m’a conduit à travailler avec le Medef sur la problématique de l’embauche des jeunes. Ensuite, j’ai créé une association, Positive Entreprise, qui connecte les jeunes et l’entreprise, et aide à créer sa société. Fort de mon engagement dans l’univers patronal, Laurence Parisot m’a chargé de réfléchir à un « Small Business Act européen » pendant trois ans. À la fin de son mandat, je me suis présenté à sa succession avec la certitude de ne pas être élu, mais de pouvoir influencer et apporter des idées. Pierre Gattaz m’a alors nommé vice-président en 2015, ce qui m’a permis de représenter le patronat notamment en matière de PME / TPE et d’œuvrer pour leur développement. Tour d’observation permettant de comprendre les enjeux de la France en matière d’entrepreneuriat, le Medef m’a permis de visualiser les modèles économiques, de rencontrer des dirigeants d’entreprise répartis sur l’ensemble du territoire et de comprendre leurs attentes ainsi que leurs difficultés. Je mets à profit cette expérience au sein du groupe Jouve.

En quoi la création d’associations professionnelles et de « think tank » comme Positive Entreprise et Anaxagore vous aide à entreprendre ?

Depuis que je n’œuvre plus au Medef, Jouve est ma priorité. L’enjeu reste de porter des projets de transformation et de développement à l’international. Malgré tout, je garde un œil sur l’activité économique, sur les futurs projets de loi, bien que je le fasse de manière moins engagée. Pour cette raison, j’ai lancé le « think tank » (« groupe de réflexion », en français, ndlr) Anaxagore avec François Perret. Grâce à lui, je continue à réfléchir sur des sujets connexes à mon entreprise. Cette source d’enrichissement me permet également de lever de temps en temps la tête du guidon et s’avère, dans le même temps, un moyen de poursuivre mon engagement envers la cité. De cette manière, je reste impliqué dans les projets sociétaux, toujours avec l’intention de continuer à être inspiré, de partager mes savoir-faire et d’appréhender les enjeux réels des entreprises et les moyens dont elles doivent disposer pour s’améliorer.

Quelles sont les perspectives d’avenir en ce qui concerne votre entreprise ?

Accélérer le développement de nos activités dans les services numériques… Notre dynamique de croissance doit être soutenue et je poursuis notre projet de transformation CAP 2020. Il devrait permettre au groupe d’accélérer sa croissance et de devenir un acteur de référence dans le secteur des services numériques, tant en France qu’en Europe. Pour y parvenir, nous nous donnons dix-huit mois. Autant dire que le défi est de taille.

Quelles ont été votre plus grande difficulté et votre plus grande satisfaction ? Et comment gérez-vous l’aspect vie professionnelle / vie personnelle ?

Ma plus grande difficulté a été de ne pas parvenir à racheter l’entreprise Gazinox. J’avais pourtant réussi à doubler le chiffre d’affaires de la société et réuni une équipe motivée pour mettre en place ce projet entrepreneurial. Malgré cela, les actionnaires n’ont pas été convaincus. Si j’ai réalisé plusieurs de mes ambitions professionnelles, ma plus grande satisfaction reste ma famille, ma femme et mes trois enfants. Ma priorité a toujours été de réussir ma vie privée et je suis fier d’avoir une vie familiale équilibrée. Même si ma vie professionnelle est dense au vu de tous mes engagements, j’essaye de ménager du temps avec mes proches notamment les week-ends. Pour conserver un équilibre, je pratique aussi la course à pied. Ce sport m’offre un véritable espace de liberté. Je décompresse durant l’effort, je ressens pleinement ma liberté et je suis souvent inspiré durant ce temps solitaire.

Qu’est-ce qui vous passionne tant dans l’entrepreneuriat ?

Cette capacité à réaliser et à prendre rapidement des décisions… C’est le fait de pouvoir, à partir d’une feuille blanche ou d’un constat, mettre en œuvre une série de décisions en équilibre et coordonnées. Ceci dans le but de faire grandir une entreprise et de générer du chiffre d’affaires. C’est, aussi et tout simplement, le fait de pouvoir renverser une situation avec une pluralité de décisions qui forme la richesse de l’entrepreneuriat et permet de surmonter les difficultés. Entreprendre, c’est un peu comme la souris blanche qui cherche son chemin et tape dans des murs, mais qui, au bout d’un certain temps, finit par trouver la sortie.

5 Conseils de Thibault Lanxade

« Entreprendre, c’est un peu comme la souris blanche qui cherche son chemin et tape dans des murs, mais qui, au bout d’un certain temps, finit par trouver la sortie. »

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