La banque face aux enjeux du digital

Au même titre que tous les secteurs économiques, le domaine bancaire a dû s’adapter à l’arrivée du numérique. Plus qu’ailleurs, les agences bancaires traditionnelles semblent avoir souffert de la propension des consommateurs à utiliser le digital à tout va. Quels sont ces nouveaux enjeux ? Comment se structure l’émergence de nouveaux acteurs ? Comment la banque réagit-elle ? éléments de réponse.

Un changement dans le comportement des clients…

Pour s’adapter au monde numérique, le secteur bancaire doit d’abord faire face à une tendance générale de digitalisation de la consommation. Dans la sphère privée comme professionnelle, le consommateur a développé, avec le numérique, des habitudes et des caractéristiques qui façonnent les nouvelles générations. Désormais mobile et hyper-connecté, le « consomm’acteur » est ainsi à la fois plus autonome, plus impatient et plus exigeant qu’auparavant. Le digital a contribué à faire émerger une génération de clients qui veulent tout, tout de suite. Le consommateur est aujourd’hui plus à même d’évaluer la qualité du service qu’on lui fournit, en examinant les tarifs des différents prestataires grâce aux comparateurs de prix, ou en partageant leur opinion sur les forums.

… Qui impacte particulièrement le secteur bancaire !

Ces nouvelles tendances de consommation liées à l’omniprésence du digital dans nos vies possèdent un impact particulièrement important dans le monde traditionnel des banques. En particulier, le numérique bouleverse le rapport du client à l’agence physique. Ce dernier attend une forte interactivité et une disponibilité du service 7 jours sur 7, 24h sur 24h. En effet, comment se plier aux horaires d’une agence à l’heure où le mobile et la tablette proposent d’effectuer n’importe quelle démarche administrative en deux clics, à tout moment du jour et de la nuit ? En 2012 déjà, une enquête TNS Sofres commandée par ING Direct montrait que 67 % des détenteurs de smartphone l’avaient utilisés pour effectuer une opération classique (consultation des comptes, virement ou réception d’alertes ou de code sécurisé). En conséquence, la fréquentation dans les agences baisse drastiquement. Dans une étude datant de la même époque, l’Ifop notait qu’en juin 2007, 62 % des interrogés se rendaient dans leur agence physiques plusieurs fois par mois, alors qu’ils étaient seulement 21 % en juin 2012. Plus récemment, en 2015, le cabinet de conseil Mc Kinsey montrait que la fréquentation des agences bancaires a baissé de 30 % en cinq ans.

La concurrence croissante des banques en ligne.

La conjugaison de ces nouvelles tendances de consommation et l’émergence croissante de l’e-commerce a favorisé l’arrivée de nouveaux entrants sur le marché bancaire. Des pure-players, véritables banques en ligne de A à Z, ont progressivement vu le jour ces 15 dernières années. Elles possèdent un succès croissant, qui s’explique à la fois par leur simplicité d’usage et leurs tarifs ultra-compétitifs. Un sondage TNS Sofres publié en février 2013 montrait que la consommation de services bancaires en ligne avait augmenté de 200 % par an entre 2011 et 2012. Les grandes enseignes bancaires ont dû s’adapter à ce nouveau type de concurrence en développant leurs propres services classiques en ligne et sur applications mobiles (virements, consultation de soldes…). Mais au-delà de ces simples services, la plupart des acteurs traditionnels ont aussi développé des filiales 100 % en ligne. C’est le cas du Crédit Mutuel Arkéa avec sa filiale Fortuneo, du Crédit Agricole (avec BforBank), du Crédit Mutuel-CIC (Monabanq), de BNP Paribas (Hello Bank) et de la Société Générale avec Boursorama Banque. Parmi les principaux acteurs de la banque en ligne, seule ING Direct n’est pas affiliée à un groupe bancaire possédant un réseau d’agences en France. Au sein des pure-players, on retrouve aussi des acteurs indépendants comme compte-nickel.fr, une offre bancaire alternative lancée le 11 février 2014 par la Financière de paiements électroniques (FPE). L’organisme a conquis en un an plus de 100 000 clients.

La révolution des moyens de paiement.

La banque ne subit pas seulement la concurrence des acteurs online, mais aussi de nombreuses start-up qui entendent bien révolutionner la manière dont les consommateurs effectuent leurs paiements. C’est le géant américain Paypal, devenu depuis filiale d’eBay, qui a commencé à bouleverser cet écosystème au début des années 2000 en proposant une plateforme de paiement en ligne visant à faciliter les transactions. Depuis, la technologie NFC (Near Field Communication : communication en champ proche) a envahi la plupart des cartes à puce et (de plus en plus) les mobiles des consommateurs, facilitant son utilisation comme un portefeuille électronique dans les transports, les magasins, les supermarchés … Ainsi, les géants du secteur comme Apple, Samsung ou Google ont progressivement pris le virage du NFC avec leurs solutions de paiement mobile Apple Pay, Samsung Pay et Android Pay. Le créneau du paiement mobile est également investi par des petites start-up comme Lydia ou Paytop par exemple.

Le crowdfunding comme alternative de financement.

Les banques ne peuvent pas accompagner tous les projets particuliers et professionnels. C’est pour palier à ces ressources manquantes  que de nouveau mode de financement se sont créer. C’est le cas du fameux crowdfunding, ou financement par la foule. Les acteurs comme Ulule, KissKissBankBank, Anaxago, Wiseed ou bulbintown viennent grignoter des parts de marché aux acteurs bancaires, permettant de façon souvent plus simple et complètement en ligne de récolter des fonds pour un projet, qu’il soit entrepreneurial, ou non. Les plateformes de crowdlending (prêts, entre particuliers ou aux entreprises) comme Lending Club, Unilend ou Prêt D’Union, bousculent également les acteurs bancaires. Preuve de son succès, le crowdfunding affiche des chiffres en forte croissance. Au premier semestre 2015, selon l’association « Financement Participatif France », le montant des fonds collectés par ce biais atteignaient 133,2 millions d’euros au total, soit deux fois le montant de l’an passé.

La nécessité de repenser les agences de proximité.

Face à ces tendances de consommation et à l’émergence de nouveaux acteurs venant concurrencer son mode de fonctionnement, la banque a la nécessité de repenser son mode de fonctionnement. Le modèle traditionnel des agences de proximité semble avoir vécu. Aujourd’hui, il devient impératif pour elles d’inclure la dématérialisation des documents, l’automatisation des processus et la gestion du Big Data, qui constitue principalement les données liées à l’historique des échanges avec tel ou tel client, afin d’être plus réactifs et de répondre de plus en plus précisément aux besoins individuels des consommateurs. Le digital implique à la fois la création, la disparition et la transformation de certains métiers traditionnellement liés à l’univers bancaire. On peut très bien présager d’un développement plus important d’une relation commerciale à distance avec le client, ainsi qu’une hausse de son niveau d’expertise au niveau de l’environnement fiscal et économique. Les banques sont donc face à un enjeu double : il leur faut à la fois comprendre l’évolution numérique de la société, mais également en intégrer l’impact pour délivrer une prestation plus en accord avec une clientèle exigeante et ultra-connectée.

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